Plusieurs membres de la hiérarchie de l’ancienne Armée de Libération du Kosovo (UCK) seront poursuivis pour crimes contre l’humanité et trafic d’organes devant le tribunal international chargé de juger les crimes de guerre commis pendant le conflit serbo-kosovar, a annoncé mardi à Bruxelles le procureur responsable de l’enquête internationale.
"Les individus poursuivis étaient tout en haut de la hiérarchie militaire de l’UCK", a précisé le procureur américain Clint Williamson au cours d’une conférence de presse à l’occasion de la fin de son mandat.
"Au stade actuel, il y aura un seul acte d’accusation visant plusieurs personnes", a-t-il indiqué.
M. Williamson a refusé de donner les identités des personnes qui seront mises en accusation. Le Premier ministre kosovar Hashim Thaçi était le chef de la guérilla indépendantiste kosovare pendant le conflit et a été mis en cause par le rapporteur du Conseil de l’Europe Dick Marty.
"Je ne peux pas être plus spécifique, ni entrer dans ce niveau de détails à ce stade. Les mises en accusation se feront une fois la cour mise en place et pour le moment nous devons rester discrets sur la teneur de nos enquêtes", a-t-il expliqué.
"Mais je peux dire que nos conclusions sont cohérentes avec le rapport Marty", a-t-il toutefois précisé.
Le procureur Williamson a tenu à préciser que la partie de l’enquête sur un trafic d’organes prélevés sur les victimes du conflit portait sur "moins de dix cas".
"Exagérer les chiffres ou dire que chaque serbe porté disparu ou tué a fait l’objet d’un prélèvement d’organes ne sert aucun intérêt, mais augmente la détresse des familles des disparus, car il n’y a aucune preuve", a-t-il insisté.
A Belgrade, le procureur serbe pour crimes de guerre, Vladimir Vukcevic, a salué le rapport de M. Williamson, affirmant qu’il représentait une "satisfaction pour les victimes et une grande contribution à la justice internationale".
"Il en ressort indubitablement que des crimes de guerre ont été commis et on verra bien s’il y a eu un trafic d’organes", a déclaré M. Vukcevic.
"M. Williamson a prouvé qu’il n’est pas sujet aux influences et je m’attends à ce que le tribunal (qui sera mis en place, ndlr) en soit épargné aussi", a-t-il poursuivi.
Clint Williamson a confié que des pressions ont été exercées pour "intimider ou influencer les témoins".
À Pristina, le gouvernement kosovar, dirigé par M. Thaçi, a indiqué pour sa part "avoir pris en considération la déclaration" de M. Williamson, et assuré qu’il allait continuer à coopérer avec les enquêteurs internationaux jusqu’à la fin de leurs travaux.
L’enquête internationale est une "étape importante pour déterminer une potentielle responsabilité individuelle et mettre fin à des accusations infondées", lit-on dans un communiqué.
L’enquête menée par les services dirigés par le procureur Williamson a porté sur 500 personnes tuées et 300 personnes portées disparues. "Il s’agit de Serbes, de Roms et d’Albanais du Kosovo", a-t-il précisé.
Le tribunal international pour les crimes de guerre commis au Kosovo doit encore être mis en place. "Un État a dit être prêt à l’accueillir, mais les négociations sont encore en cours", a-t-il indiqué.
Il sera composé de procureurs, de magistrats et de juristes internationaux, a-t-il ajouté.