Malgré l’élection du socialiste François Hollande à la présidence de la République, la France, loin de rompre avec le modèle néolibéral qui a conduit une grande partie de l’Europe au désastre, a choisi la voie de l’austérité.
Les politiques d’austérité préconisées par l’Union européenne – l’Allemagne d’Angela Merkel en tête –, le Fond monétaire international et la Banque centrale européenne mènent à l’impasse. Elles sont politiquement impopulaires, économiquement inefficaces et socialement désastreuses. Partout où elles ont été appliquées, que ce soit en Grèce, en Irlande, en Italie, au Portugal ou en Espagne – sans aucune exception –, elles se sont soldées par un échec, avec une hausse de la pauvreté et du chômage, une hausse de la dette publique, un démantèlement de l’État providence avec la destruction des services publics et une baisse drastique des revenus de l’État.
L’élection de François Hollande à la présidence de la République en mai 2012 a suscité un certain espoir chez les citoyens français d’une alternative aux politiques d’austérité. Mais loin d’augmenter le salaire minimum de manière significative et de stimuler l’investissement public – mesures qui auraient permis de relancer la croissance économique –, le gouvernement du Premier ministre Jean-Marc Ayrault s’est évertué à appliquer des recettes qui ont démontré leur inefficacité à travers toute l’Europe, avec l’adoption du « pacte pour la compétitivité », recommandé par le rapport Gallois [1].
Le « pacte pour la compétitivité » du rapport Gallois
Le gouvernement a en effet décidé d’appliquer les mesures préconisées par Louis Gallois, commissaire général à l’investissement, qui permettront, selon lui, d’améliorer la compétitivité des entreprises françaises au niveau international, relancer l’économie et créer de l’emploi. Le président Hollande a donc choisi d’alléger la fiscalité des entreprises par le biais d’un crédit d’impôt de 20 milliards d’euros [2].
Pour ce faire, l’Élysée a adopté deux mesures. Dans un premier temps, les dépenses publiques seront réduites de 10 milliards d’euros. Cela signifie que les services publics mis à disposition des citoyens français se verront fortement affectés, avec un impact direct sur la qualité de vie de la population la plus fragile [3].
La seconde mesure est la plus impopulaire puisque François Hollande a décidé d’augmenter la TVA, revenant ainsi sur sa promesse de campagne. En effet, l’ancien président Nicolas Sarkozy avait fait adopter une hausse de la TVA avec une augmentation des différents taux : le taux intermédiaire était passé de 5 % à 7 % et le taux général avait été augmenté de 19,6 % à 21,4 %. Cela représentait une hausse de la TVA de 10,6 milliards d’euros pour les citoyens. L’une des premières mesures prises par la nouvelle Assemblée nationale a été de supprimer cette hausse de la TVA en juillet 2012 [4].
Or, trois mois plus tard, le gouvernement socialiste est revenu sur cette décision en relevant les principaux taux de TVA. Ainsi, à partir du 1er janvier 2014, le taux général passera de 19,6 % à 20 % et le taux intermédiaire de 7 % à 10 %. Seul le taux le plus bas a été abaissé de 5,5 % à 5 %. Ces mesures représentent une hausse des impôts pour les Français de 7 milliards d’euros et affecteront tout particulièrement les catégories populaires. En effet, cette nouvelle TVA représente une perte de pouvoir d’achat de 260 euros par personne et par an, c’est-à-dire 25 % du salaire minimum mensuel [5].
La hausse de la TVA (+ 3 % pour des produits aussi nécessaires que le gaz, l’électricité, les transports, les livres ou les médicaments non remboursés par la sécurité sociale) entraînera inévitablement une réduction de l’activité économique. En effet, la perte du pouvoir d’achat des ménages se traduira automatiquement par une baisse de la consommation, donc une diminution de la production. Celle-ci conduira à une augmentation du chômage, et par conséquent par une baisse des recettes fiscales pour l’État et une hausse des dépenses liées aux allocations à verser aux personnes sans emploi.
Par ailleurs, ce plan n’est destiné qu’à stimuler 20 % de l’économie du pays. En effet, en France, la production à l’exportation ne représente qu’1/5 de la richesse produite. 80 % de la production du pays est destinée à l’usage national et s’en trouvera affectée par la hausse de la TVA [6].
Selon le gouvernement, ce cadeau fiscal de 20 milliards d’euros offert aux grandes entreprises permettra potentiellement de créer 300 000 emplois en France d’ici 2017. Cependant, il n’y a aucune certitude à ce sujet [7]. Par ailleurs, cette affirmation se trouve rapidement en contradiction avec la logique économique. En effet, en admettant que le nombre soit exact, cela revient à chiffrer à 67 000 € le coût d’un emploi créé. Or, la création d’un poste de professeur, d’infirmière, d’assistante sociale ou d’attaché culturel dans la fonction publique coûte 40 000 € annuels à la nation. Ainsi, si l’État avait alloué ces 20 milliards d’euros à la fonction publique, 500 000 emplois de qualité auraient pu être créés de manière sûre, c’est-à-dire 200 000 de plus, et auraient grandement contribué à l’amélioration des services publics et du bien-être des citoyens.
Les mesures prises par le président François Hollande et le gouvernement de Jean-Marc Ayrault constituent un contresens économique et sont vouées à l’échec. Elles s’inscrivent dans la droite ligne des politiques d’austérité appliquées partout en Europe qui ont conduit les populations les plus vulnérables au désastre.
Salim Lamrani