Les négociations entre les autorités libyennes et les protestataires qui bloquent les principaux sites pétroliers du pays traînent sans progrès depuis plus de trois mois, faisant prolonger une crise qui a fait chuter la production d’hydrocarbures et les revenus de l’Etat de plus de 80%.
"La crise dans les terminaux pétroliers se poursuit et la situation est totalement bloquée", a déploré lundi le président de la commission de crise au Congrès général national (CGN), la plus haute autorité du pays, Abddelwaheb al-Gaied.
Cette commission, formée en août, a été chargée de négocier avec les protestataires pour trouver une issue à la crise.
Intervenant lors d’une séance plénière du CGN retransmise par la télévision nationale, M. Al-Gaied a précisé que les protestataires campaient sur leurs positions.
Des gardes des installations pétrolières bloquent depuis fin juillet les principaux terminaux pétroliers de Zueitina, Ras Lanouf et al-Sedra, situés dans l’est du pays.
Depuis plusieurs semaines, le gouvernement est en conflit ouvert avec ce groupe de gardes qu’il accuse de chercher à détourner du brut, ces derniers reprochant à leur tour aux autorités de vendre du pétrole de façon irrégulière.
Ibrahim Jodhrane, chef des protestataires partisans d’un système fédéral en Libye, s’était autoproclamé en août président du bureau politique de la Cyrénaïque. Il a annoncé la semaine dernière la formation d’un gouvernement local pour gérer les affaires de cette région.
Cette annonce semble s’inscrire dans le cadre du bras de fer avec les autorités centrales de Tripoli qui considèrent ce gouvernement hors-la loi.
Elle illustre aussi la faiblesse de l’Etat incapable d’asseoir son autorité sur des milliers d’ex-rebelles armés qui avaient combattu le régime de Mouammar Kadhafi en 2011.
Les mouvements de protestation ont provoqué une chute de la production de pétrole à 250 000 barils par jour (b/j), contre près de 1,5 million de barils par jour (mbj) avant le déclenchement de la crise fin juillet, a indiqué lundi à l’AFP Mohamed al-Harairi, responsable de la Compagnie nationale de pétrole (NOC).
Ces troubles dans l’industrie pétrolière qui génère 96% des revenus de l’Etat, ont causé des pertes estimées jusqu’ici à quelque 13 milliards de dollars, selon les autorités.
Puiser dans les réserves
Le représentant d’une institution monétaire internationale en Libye, a averti que si la crise se prolongeait, les autorités pourraient être obligées à puiser dans les réserves en devises.
Si la crise se prolonge, l’économie pourrait se contracter en 2013 et le gouvernement sera contraint de puiser dans ses réserves pour pouvoir payer des salaires et honorer ses engagements, a-t-il dit sous couvert de l’anonymat.
Les réserves du pays sont estimés entre 130 et 140 milliards de dollars, selon la même source.
Dans son dernier rapport, le Fonds monétaire international (FMI) a prévu une contraction du PIB de 5,1% pour 2013, en raison de la crise pétrolière contre 104,5% en 2012.
Une reprise des exportations à partir du terminal al-Harriga (est), annoncée par le gouvernement pour lundi, n’a pu avoir lieu comme prévu pour des raisons de logistique, selon le responsable de la NOC.
"Le port est totalement sous le contrôle de la Arabian Gulf Oil Company (AGOCO, filiale de la NOC)", a indiqué lundi M. al-Harairi, soulignant que des procédures de marketing avec les clients retardent le début des exportations du brut à partir de ce port.
La crise a été réglée. Deux cargaisons de brut sont prêtes pour l’exportation de ce terminal pétrolier d’une capacité de 110 000 b/j, a-t-il ajouté.
Par contre, la production n’a toujours pas repris dans le site pétrolier d’al-Charara (330 000 b/j), bloqué depuis le 28 octobre par des habitants de la région d’Oubari (sud), selon ce responsable.
Les habitants protestent contre leur marginalisation et réclament une répartition plus équitable des revenus pétroliers.
Des négociations sont toujours en cours avec les protestataires, a indiqué le responsable libyen.