Dans le restaurant huppé d’une station de ski , ce printemps, nous sommes servis par une bombe sexuelle ukrainienne. A la question : « Qui sont vos héros en Ukraine ? » La réponse fuse : « Iarosh, Andriy Biletski , et Valéry Markus, un blogger. » Ce sont en quelque sorte les icônes du roman national de l’Ukraine. Les deux premiers ont été députés de 2014 à 2019. Cette opération spéciale , c’est un pâle succédané de la grande guerre patriotique des bolcheviks contre l’Allemagne nationale-socialiste et ses supplétifs ukrainiens. Avec une différence de taille, à savoir que cette fois-ci , la Russie n’est plus communiste et ne reçoit pas d’armes du complexe militaro-industriel de l’Amérique. Au contraire, ce sont les forces militaires ukrainiennes qui sont armées par les puissances atlantistes que l’Ukraine combattait , aux côtés des allemands, pendant la deuxième guerre mondiale. Le nationalisme de certains russes se confond avec la nostalgie du communisme.Dans ces discours, Poutine titille l’orgueil national avec les réminiscences de la grande guerre patriotique contre le national-socialisme. Poutine s’enorgueillit d’une période glauque où la pureté d’un idéal rêvé se fracassait contre les atrocités de la révolution vécue. Staline a envoyé au combat 20 millions de soldats en excitant la fibre patriotique russe pour sauver la révolution bolchevique des démons du « capitalisme » qu’incarnait l’armée allemande. Staline et sa vision égalitariste de la société sans classes n’ a jamais été vraiment un modèle pour les ukrainiens. L’Ukraine est située au carrefour du monde indo-européen. Elle est attachée à La Défense de son identité nationale. La Russie est un empire multiculturel, victime des invasions turco-mongoles, qui, composé d’une mosaïque d’ethnies aux aspirations contradictoires, a vocation à se désintégrer sous la pression de pays turcophones, agités par des vélléités d’indépendance, et d’une Chine grignotant des portions du territoire de la Sibérie orientale. Le patriotisme russe est donc le produit des menaces qui pèsent sur l’intégrité territoriale du pays. La présence de forces de l’OTAN massées à la frontière avec la Russie est à l’origine des craintes qui ont conduit à l’opération spéciale. L’Ukraine, quant à elle, jalouse de son indépendance, joue la suprématie culturelle de l’Europe blanche sur le multiculturalisme euro-asiate de la fédération de Russie, pour galvaniser ses héros abreuvés de références nazies.