L’autre jour au coin des rues Labat, Ramey et Custine à Paris, j’avise un gros barbu en haillons à l’air débonnaire qui mendie, assis devant le distributeur. Je lui file ma monnaie, il fait froid. Un pote (résident du quartier depuis des décennies) m’avise et me dira plus tard "pendant des années j’ai donné à ce gars, jusqu’à ce que j’apprenne d’un ami qu’il est plus riche que moi ; le mec est là, en permanence, du matin au soir, il a comme qui dirait le monopole sur ce carrefour" j’étais vert, j’enrage encore rien que d’y penser ; personnellement je trouve que c’est ça le plus grave, la prédation de la charité. Moi non plus j’ai pas de fric, et je partage avec qui me demande, j’ai été élevé comme ça.
La charité est un dispositif fondamental de notre société. Tu dois (oui, toi) pouvoir compter dessus toi-même. La court-circuiter ainsi, la pervertir jusqu’à sa disparition (ben oui, tu donnes à tout le monde ou à personne, t’as pas le temps de faire de la social-philosophie dans la rue) est un moyen particulièrement vil de destruction d’un monde. De tout le monde.
Quant aux vols dans les cimetières, j’ai pas les mots, là.