Youssef Hindi et Rachid Achachi – Morale et réalisme politique
18 mai 09:37, par ProtégeonslaPalestine Dans cet exposé dense et de très belle facture, Rachid Achachi explique que la césure doctrinale opposant l’idéalisme grec au réalisme romain demeure un schisme structurant du politique. Le politique, dans son acception de schémas de distribution du pouvoir et de dynamiques d’interactions qui façonnent la mise en œuvre politique, s’articule autour de la dichotomie réalisme / idéalisme, qui permet de discriminer les doctrines, les modes de gouvernance et l’esprit des lois : ces épistémê contraires, au fondement de systèmes de valeurs et de représentations antagonistes, sont des archaïsmes de pensée et de civilisation qui informent, encore aujourd’hui, les logiques de discours et la mise en œuvre du pouvoir.
Cette approche du politique et de la politique sous la détermination de l’anthropologie culturelle donne lieu à des développements lumineux : la parabole du jeu de go par opposition au jeu d’échec constitue un temps fort de la réflexion en mouvement. C’est au terme d’1h17 minutes d’échanges que Rachid Achachi a l’intuition tardive que la dichotomie idéalisme grec versus réalisme romain est intellectuellement insatisfaisante, car limitante : son expression « des cyniques absolus » effleure brièvement le point nodal du sujet, qui aurait pu / dû faire partie des prolégomènes à la présentation de Youssef Hindi, à savoir que le politique accueille aussi d’autres catégories épistémologiques :
. le cynisme anglo-saxon : pragmatisme utilitariste d’essence protestante où l’efficacité prévaut sur la morale (le néo-conservatisme, dont le père fondateur est, contre toute attente, le latin Machiavel... à méditer)
. le tsarisme asiatique : mode gouvernance paradoxalement libéral, contre-libertaire et contre-démocratique (Russie, Chine, Turquie, Iran), où le temps long (le règne) permet les réformes structurelles profondes que ne permet pas la pilule démocratique du lendemain (le quinquennat)
. le déconstructionnisme axiologique (idéologie du genre)
. le transhumanisme s&&ste : par-delà le respect de la vie, du droit international, des conventions de la guerre, une romance territoriale d’une radicalité et d’un obscurantisme inédits justifient un militarisme exterminateur jusqu’au-boutiste. Cette politique de dépassement de l’humanisme, du légalisme et du cynisme est un déluge transhumain au service d’un colonialisme intégral
Conclusion : Magnifique travail du duo, qui mériterait une seconde partie, pour échapper à l’écueil de la binarité.