A quelques exceptions près, l’art moderne, et ça commence avec le cubisme, c’est largement de la frime, de la provocation (voir les gesticulations des Dadaïstes, des Actionnistes viennois, des Fluxus et de bien d’autres), de l’imposture, de la grandiloquence, etc.
Duchamp sort du cubisme, plus particulièrement des papiers collés et des collages inventés par Picasso et Braque. A ses débuts, le collage consiste à importer dans l’oeuvre peinte ou dessinée des fragments de journaux, de tapisserie, de partitions de musique, ou d’autres matériaux bidimensionnels (des titres de transport ou des étiquettes, comme l’on verra dans les travaux de Kurt Schwitters), et même des images trouvées (voir Pablo Picasso, "Nature morte avec fruits et violon" de 1913 ou "Nature morte à la chaise cannée" de 1912, qui non seulement inclut un morceau de toile cirée au motif de cannage, mais aussi une corde encadrant la composition).
Le premier ready-made de Duchampp, la Roue de bicyclette de 1913, est une généralisation (tridimensionnelle) du collage (un ready-made assisté, comme on dira), ce qu’un peu plus tard on appellera aussi un assemblage. Par la suite, il ne se fatiguera même plus à assembler, il présentera simplement un truc tout fait, prêt à l’usage (ce que veut dire ’ready-made, un raccourci pour ’made ready for use, c’est-à-dire ‘rendu prêt à l’usage’ ou ‘déjà apprêté pour l’emploi’), tel le sèche-bouteille qu’il acheta au Bazar de l’Hotel de Ville en 1914.