Philippe Sollers ne m’était pas sympathique mais demande-t-on à un écrivain de l’être ? Demande-t-on à Proust de l’être ? Le demande-t-on à Céline ? Et d’ailleurs, ainsi qu’il faisait pouffer de rire son gamin, qui demandait à Papa de recommencer une énième fois d’imiter Picasso, répondant à une dame peu satisfaite "vous voyez Monsieur Picasso, je n’aime pas votre style"..."Mais Mâdâme, ça n’a aucoune immportance"...
Ce que l’on ne pourra jamais lui ôter, c’est son amour infini pour la Littérature, qu’il savait transmettre à ses lecteurs ou auditeurs, pour la Beauté, Venise, les femmes !
C’est déjà une vie extrêmement bien remplie.
Redoutablement intelligent et subversif, donc assez irresponsable, mégalomane sur les bords, et bien d’autres travers déplaisants mais il avait des fulgurances dont l’une me revient à l’esprit : en parlant du rétablissement éventuel de la monarchie en France, il avait répliqué que c’était comme recoller la tête d’une statue de porcelaine.
J’avais trouvé géniale la formule, il n’y a qu’un littéraire pour exprimer si bien la réalité : les temps jadis ne reviendront jamais, les Français ont assassiné - ou laissé assassiner - leur famille royale. Quand bien même on rebâtirait le palais des Tuileries, et y logerait un lointain descendant, l’irrémédiable a été accompli. Il l’avait si bien dit, peut-être même avec une pointe de nostalgie, en captant les énergies venues des profondeurs de l’âme française à l’agonie.