Vainqueur du premier prix du concours international de dessins et de caricatures sur l’holocauste organisé par l’organisme iranien House of Cartoon, le dessinateur Zéon a répondu aux questions de RT France.
RT France : Pouvez-vous nous expliquer le sens de ce dessin qui vous a fait remporter ce concours ?
Zéon : Ce dessin, intitulé « Shoah Business » dénonce la marchandisation et l’utilisation comme arme politique de l’Holocauste, qui est aussi un des principaux tabous « sacrés » du monde occidental contemporain. Il ne fait que retranscrire la vérité connue de tous les initiés, qui consiste à traiter d’antisémite toute personne qui pose problème. Une ex-ministre israélienne, Shulamit Aloni, le reconnait très simplement : lorsque quelqu’un critique Israël, on lui sort la « combine de l’Holocauste » pour le faire taire.
Comment définissez-vous le « Shoah Business », et selon-vous, qui en profiterait ?
Le « Shoah Business » est une arme de domination politique, de racket et d’intimidation utilisée jusqu’à l’excès par certaines élites mondialisées juives et plus spécifiquement par les lobbies pro-israéliens. L’historien Norman Finkelstein en parle très bien dans son livre L’Industrie de l’Holocauste, ou Tova Reich dans son roman satirique Mon Holocauste.
Avez-vous conscience du fait que ce genre de dessin puisse heurter les survivants des camps nazis et leurs descendants ? Est-ce que cela vous pose problème ?
Au contraire, c’est rendre hommage à toutes les victimes (au sens le plus large) de la Seconde Guerre mondiale, que de dénoncer ceux qui utilisent leur martyr à des fins de basse politique et de justification de massacres comme en Palestine. Tout dessin satirique heurte, sinon il ne serait pas satirique. Bien sûr que cela me pose un problème d’être mal compris, peut être ai-je été parfois un peu maladroit dans ma manière d’aborder mes sujets... Mais derrière cette première impression de provocation, il y a une volonté sincère d’ouverture, de dialogue et de réconciliation avec ceux qui peuvent être choqués pas mes dessins.
Nombre de vos dessins tournent autour de la communauté juive, ou des défenseurs de l’État d’Israël. Pourquoi choisir ces thématiques en priorité ?
On peut avoir l’impression que je suis centré uniquement sur ces sujets mais c’est faux (d’ailleurs mes dessins ne parlent pas de la communauté juive dans son ensemble mais de ceux qui se réclament de leurs élites politiques), j’ai abordé bien d’autres thèmes, divers et variés, mais ces dessins n’ont pas fait scandale donc il est normal qu’on les ai moins vus.
Certains vous accusent d’être antisémite, que répondez-vous à cela ?
Les personnes qui me traitent d’antisémite ont souvent tendance à traiter quasiment tout le monde d’antisémite, y compris des juifs. Cela doit être terrible pour eux de vivre dans un monde aussi hostile... Je n’ai pas grand chose à répondre de plus, leurs gesticulations ne m’intéressent pas plus que ça.
En France, vous avez été poursuivi en 2013, notamment par la LICRA, pour un dessin portant sur la thématique de l’Holocauste. En Iran, on vous donne le premier prix pour votre travail. Comment expliquez-vous cette différence de perspective ?
C’est simplement que les tabous et les « sacrés » dont on a peur de parler ne sont pas toujours les mêmes en fonction des lieux géographiques.
Iriez-vous jusqu’à dire que la liberté d’expression est plus grande en Iran ? Plusieurs artistes ont déjà été condamnés pour leurs dessins critiques du pouvoir en place, voir d’autres forcés à l’exil...
La liberté d’expression n’existe nulle part, il n’y a qu’un combat pour la liberté d’expression. Une fois que le pouvoir change de mains, les « sacrés » sont remplacés par d’autres « sacrés ». Quand on remet en cause le pouvoir en place, il est naturel qu’il vous attaque, cela vaut pour la France comme pour l’Iran... Il en a toujours été ainsi. Si le pouvoir local est en danger, il sera plus radical dans sa riposte. Cuba à résisté face à l’impérialisme américain mais il y avait peu de place pour la liberté d’expression dans les années d’embargo.
En mars 2015, lorsque la police est venue me chercher à mon domicile [suite à une plainte du BNVCA pour un dessin sur un enfant palestinien poignardé par un couteau ayant la forme de l’Etat d’Israël], j’ai contacté Plantu et Cartooning for Peace, mais je n’ai eu aucun soutien de leur part, et cela ne m’a pas étonné... J’ai été mis en examen et mon procès est prévu pour la fin de l’année 2016.
Il est vrai que je ne connais pas en détail la politique iranienne, un dessinateur iranien exilé en France me l’a très justement fait remarquer. Mais lui-même ne comprend pas grand chose à la situation du monde occidental puisqu’il a fini chez Charlie Hebdo en pensant qu’il s’agissait d’un réel journal de résistance alors que c’est à mon sens le journal le plus collaborationniste avec le pouvoir, puisqu’il défend avec fougue tous les « sacrés » du monde occidental. S’il se documentait intelligemment et se mettait à redessiner avec courage sur les thématiques qui posent problème chez nous, il serait vite censuré, puis harcelé de procès, de condamnations, ainsi que de menaces de morts, voire d’agressions physiques. Il pourrait finir par devoir s’exiler sur une île déserte pour être tranquille !