Formules cinglantes et répliques aigres : la première des deux journées d’été du Front de Gauche à Grenoble a vu croître la tension entre les deux leaders de cette alliance : Pierre Laurent (PCF) et Jean-Luc Mélenchon (PG), qui divergent sur l’attitude à adopter vis-à-vis du PS.
"Ils se reparleront...Aujourd’hui ? Je ne pense pas", a résumé Éric Coquerel, secrétaire national du PG, proche de l’ancien candidat FG à l ?Élysée.
Samedi, ce dernier, coprésident du Parti de Gauche, n’est apparu aux Estivales du FG que pour une table ronde sur l’OTAN.
Le reste de l’après-midi, il est resté cloîtré loin de la presse et du sénateur Laurent, secrétaire national du PCF.
Origine de la crise ouverte entre les deux porte-parole du Front de gauche : une interview de Pierre Laurent au journal Libération mercredi dans laquelle il reprochait à Jean-Luc Mélenchon ses "invectives".
"Une faute politique", a tranché Éric Coquerel, "au moment où le Front de gauche réussissait bien sa rentrée", notamment sur le "thème de Valls", accusé par M. Mélenchon dans le JDD du 18 août, d’avoir été "contaminé" par les idées de Marine Le Pen.
La réponse de l’eurodéputé n’a pas tardé. Jeudi matin, lors des "Remue-Méninges" du PG, il lançait : "Depuis mon départ du PS, les dirigeants socialistes n’ont pas cessé un seul mois d’avoir recours à l’invective contre moi (...) Vous comprendrez que, dans ce contexte, j’ai si mal vécu que Pierre Laurent réponde de manière quasi instantanée, dans un garde-à-vous si impeccable, aux injonctions d’Harlem Désir"
Le soir, à la tribune, l’ancien socialiste rajoutait qu’on "ne gagne rien au rôle de tireur dans le dos".
"Inutilement blessant", a réagi Pierre Laurent à son arrivée samedi en fin de matinée au Estivales. "Le garde-à-vous ne fait pas partie de ma culture politique. les communistes ne sont au garde-à-vous devant personne".
Le chef des communistes était alors encore persuadé de "croiser" Jean-Luc Mélenchon dans la journée. "J’ai cru comprendre qu’il était un peu déçu, mais on va s’expliquer", a-t-il dit.
"Je suis dans l’état d’esprit de faire avancer le Front de gauche. La remarque sur le ton qui doit être le nôtre a vocation à nous rendre plus efficaces et plus performants", a argumenté le patron des communistes.
"Cette interview nous a posé un problème qui est un problème politique", rétorque Éric Coquerel, visiblement encore agacé.
"Nous souhaitons que Pierre (Laurent) revienne sur ses propos pour remettre les choses en marche", "le temps fera qu’il y aura des explications".
"Ce n’est pas neutre politiquement, quand le PS demande au PCF de se positionner, que le secrétaire général du PCF le fasse", a ajouté M. Coquerel.
Après les accusations de M. Mélenchon contre le ministre de l’Intérieur, mais aussi François Hollande, accusé d’avoir "plongé notre pays dans la déprime", le PS avait demandé au PCF de "se dissocier de ces propos et de ces outrances". Le porte-parole du PCF, Olivier Dartigolles, avait répondu que "l’outrance" était "plutôt du côté du ministre de l’Intérieur".
Ces tensions illustrent une divergence de stratégie pour les élections municipales de 2014. Le Parti de gauche prône une autonomie dans toutes les villes, alors que le PCF est associé au PS dans de nombreuses communes.
"Il y a eu d’autres moments de tension, on s’est toujours bien sortis de ces moments", assure Clémentine Autain de la FASE (Fédération pour une alternative sociale et écologique), une composante du Front de gauche.
Jusqu’à présent ces différends ne s’étaient encore jamais réglés par médias interposés, les deux hommes ayant toujours réussi à discuter.
Le FG a été constitué en 2009 pour les élections européennes. A la présidence de 2012, son champion Mélenchon avait réuni 11,1% des voix.