Nombreux sont ceux qui après s’être informés, comprennent que l’intérêt de leur banquier n’est pas forcément celui de leur client, que leurs économies seraient bien plus en sécurité ailleurs que sur un livret A ou une assurance vie, et en viennent à s’interroger sur la possibilité de thésauriser une quantité donnée de métaux précieux afin de se prémunir de l’inflation (inflation réelle > rémunération nette des livrets) et de la confiscation pure et simple de leur épargne en cas de crise bancaire (cf Chypre).
Cependant, après avoir pris la décision de franchir le cap, beaucoup d’entre nous finissent par rebrousser chemin par peur de l’inconnu, et de ce qui semble être un domaine de spécialiste. Voici donc ici quelques questions de base que peut se poser le novice en la matière avant de se lancer dans l’acquisition, à but non spéculatif, de métaux précieux.
Y a-t-il une durée de détention minimum quand on achète des métaux précieux ?
Du fait des fluctuations des cours des métaux, on part généralement sur une durée de détention minimum de cinq ans. En dessous de cette durée vous pourriez avoir des surprises (bonnes comme mauvaises). Si vous n’êtes pas sûr de pouvoir bloquer une somme sur cinq ans dans ce cas n’achetez pas de métaux et utilisez votre argent pour vos besoins quotidiens réels ou placez les dans des actifs.
Lingots vs pièces ?
Pour tout un tas de raisons l’achat de métaux sous forme de lingots est peu conseillé. Premièrement parce que la prime (voir définition plus bas) d’un lingot est généralement plus importante à poids équivalent en comparaison avec celle d’une pièce. Deuxièmement car de faux lingots sous faux scellés inondent le marché ces dernières années. Dans le cas d’une revente, un lingot est plus difficile à revendre à bon prix, à moins d’avoir une traçabilité d’origine professionnelle (facture, noms des anciens propriétaires, etc.), ce qui est rarement le cas.
Quels types de pièces privilégier ?
Pour l’or : on trouve sur le marché des pièces pures (dites quatre neuf ; 999,9 ‰ – du type Maple Leaves, Philarmoniques, Pandas, etc.) et des pièces en alliage (généralement 900 ‰ ou 916 ‰). À la base, les pièces en alliage étaient faites pour circuler lors de transactions courantes (l’alliage or/cuivre étant plus solide que l’or pur qui est fragile). En théorie si votre métal est destiné à être stocké sur de longues périodes, alors les deux types sont acceptables, mais si vous avez un peu le sens du pratique, alors privilégiez plutôt les pièces en alliage.
Parmi ces dernières, si vous demeurez en France, les meilleures ambassadrices restent les pièce françaises dite “Napoléon” (aussi appelée “Louis d’or”). Pièces avec valeur faciale de 20 Francs, et un titre de 900 ‰. Il en existe de plusieurs types. En investissement pur (pas en collection) nous retrouvons les Napoléon III tête nue, les Napoléon III tête laurée, les types Cérès, les Génie de la République et les plus récentes qui sont les Marianne/coq. D’un poids brut total de 6,45g (soit 5,81g d’or fin) on évite les pièces qui pèsent moins de 6,43g car on considère qu’elles sont trop usées. En parallèle on appréciera avec grand intérêt les inscriptions "Dieu protège la France" sur les tranches de ces pièces. Inscriptions qui furent retirées sur les pièces frappées à partir de 1907. On trouve les exactes équivalentes en dimensions et en poids des Napoléon dans d’autres pays (cf standard monétaire Union Latine) ; à savoir les équivalentes belges (20F or), italiennes (20 Lire or), de Sardaigne/Savoie (20 Lire or), suisses (20F or), grecques (20 Drachmes or), et certaines plus rares comme les roumaines (20 Lei or), bulgares (20 Leva or), serbes (20 Dinars or), etc.
En parallèle, d’autres pièces de type alliage ont un intérêt, sans toutefois cumuler tous les avantages des “Napoléon” (facilité en cas de revente). Parmi les pièces de moins de 10 g on pourra citer : la 20F suisse, le Souverain britannique “Sovereign” (usuelles à l’international), la 20 ReichsMark allemande ou encore les pièces autrichiennes. Les autres restant relativement exotiques. Parmi les pièces de plus gros calibre (+30g) on citera : la 100F Napoléon française, la Krugerrand (Afrique du Sud), la 20$ US (pièces antérieures à 1933), la 50 pesos mexicaine (plus grosse pièce d’or de circulation courante, 37,5g d’or fin).
Si toutefois vous optez pour des pièces en or pur (999 ‰) sachez que seules les pièces d’ 1 once se vendent à des primes à peu près correctes, les pièces plus petites (1/2, 1/4, 1/10 et 1/20 d’once) se vendent à des primes qui sont parfaitement rédhibitoires. Cela signifie que vous allez vous retrouver à acheter des pièces qui valent entre 1100 € et 1200 € l’unité.
Généralement, si vous le pouvez, prenez des petites pièces entre 5 et 10 g, plutôt que des grosses galettes, et évitez d’avoir trop de types de pièces différents ... Quatre ou cinq au grand max. Idéalement deux ou trois.
Pour l’argent : privilégiez les pièces avec un titre de 900 ‰ ou supérieur. Les 50 Francs Hercule ou les 10 Francs Hercule (pièce plus rare, avec une prime plus importante que la 50F Hercule) ont un titre de 900 ‰. Ce sont de splendides galettes numismatiquement parlant. Quiconque en a eu en main s’en souvient. Parallèlement on trouve sur le marché énormément de pièces modernes de 1 once (31,1g) en argent pur 999 ‰. Si vous choisissez cette option limitez votre choix aux pièces suivantes les plus répandues et les plus facile à revendre à savoir les Maple Leaves (Canada), Philarmoniques (Autriche), Kurgerrand (Af. du Sud), ou encore les American Eagle (USA). Attention, sur ces pièces très souvent les prix à l’achat dépassent souvent spot + 30% ... De plus comme il s’agit de pièces neuves, elles sont à manipuler avec précaution (les empruntes de vos doigts laisseront des traces). Pour des questions de stockage pensez bien à les acheter par quantité permettant de les recevoir dans leur conditionnement d’origine (tube plastique) – généralement par 20 ou 25 unités selon fabriquant.
Malgré son titre inférieur à 900 ‰, une autre pièce intéressante est la 5 Francs semeuse argent (frappée de 1959 à 1969) – en 835 ‰ contenant 10 gr d’argent fin. Relativement facile à trouver et avec une prime assez faible (rarement au dessus de 10%). Attention de ne pas confondre la 5F semeuse argent avec la 5F semeuse en cupro-nickel. On identifie aisément la variante en argent car y on lit « liberté égalité fraternité » sur la tranche. Tandis que la tranche de la version cupro-nickel est striée.
Comment se calcule le prix d’une pièce ?
Le prix d’une pièce ou d’un lingot est constitué de sa valeur en métal à laquelle se rajoute la prime (exprimée en %). Autrement dit de sa valeur intrinsèque (cours du métal x quantité de métal fin contenu) dit prix spot plus un pourcentage (correspondant à l’offre et à la demande du marché + commission revendeur + commission du fondeur/certificateur).
Quand on dit qu’une pièce est négociée à spot + 10% cela signifie qu’on paie la valeur du métal à laquelle on ajoute 10%.
Quel est le prix d’achat le plus juste en fonction du type de pièce ? (Hors cas de crises)
Pour de l’or, on évitera généralement d’acheter au dessus de spot + 10%, sauf cas particulier. Pour une pièce de moins de 10 g un bon cours se situe aux alentours de spot + 5%. Pour les très petites pièces (type 2-3g) la prime peut être relativement élevée (20% et plus), il y a donc ici peu d’intérêt à acheter ce type de pièces. Pour l’argent, on évitera d’acheter au dessus de spot + 20%. Pour une pièce d’une trentaine de grammes, un bon cours se situe aux alentours de spot + 10%.
En général plus une pièce est petite plus sa prime augmente et inversement. Exemple de calcul : le cours de l’or est à 34,42 €. J’ai une offre pour des Napoléons à 212 €. Ce prix est-il réaliste ?
Ici, la valeur intrinsèque d’une seule pièce est de 34,42 €/g x 5,81g (6,45g d’or à 90%, soit 5,81g d’or fin) soit 200 €. À 212 € je paie donc une prime de 12/200 soit 6%.
A contrario, il va sans dire que si l’on vous propose de l’or à -10% de sa valeur spot ... fuyez.
Les pièces que j’ai achetées sont sales, dois-je les nettoyer ?
Il n’est pas rare d’avoir un dépôt noirâtre niché entre les détails des motifs frappés sur une pièce d’or. En particulier si votre pièce à 150 ans. Sur les pièces en argent, vous retrouverez quasi systématiquement une couche noirâtre plus ou moins prononcée et caractéristique de l’oxydation du métal argent. Aussi bien pour l’or que pour l’argent ceci n’est pas un problème. Sous aucun prétexte ne tentez de nettoyer vos pièces. Ne les frottez pas, même si vous le faites de façon consciencieuse. Cela laissera des micro rayures, visibles à la loupe pour un œil averti. Laissez-les dans leur jus afin de garder la patine d’origine !
Quelle proportion d’or/argent thésauriser ?
Cela dépend de chacun, des capacités de stockage, etc. Il n’y a pas de règle préétablie valant pour tous les cas de figure. Cependant on peut se fixer la règle suivante et adapter en fonction de sa situation personnelle : pas plus de 10% de valeur en métal argent en évitant de dépasser 10 kg d’argent (stockage volumineux).
Où acheter des pièces d’investissement ?
Le cas le plus courant est celui de l’achat dans un comptoir d’or où l’on vous annonce une prime majorée de frais additionnels dits de courtage, ceux-ci sont variables selon le montant de votre commande. Cependant, si vous aimez le challenge vous pouvez aussi vous rapprocher des numismates (si vous avez un club près de chez vous, allez y jeter un œil). Très souvent les numismates rachètent des lots pour des pièces de collection et accumulent des pièces d’investissement qui ne les intéressent pas réellement, à ce titre ils sont souvent capables de sortir ces pièces à des prix très corrects. N’hésitez pas à faire les salons ou foires numismatiques, il y en a un peu partout en France tout au long de l’année, il est très fréquent que tel vendeur particulier ou pro ait 50, 100 ou plus de pièces d’investissement en stock disponibles immédiatement au moment de l’événement.
En tout temps, posez-vous bien les bonnes questions avant de commencer à acheter des métaux, une fois que vous êtes sûrs achetez-en régulièrement mais consciencieusement. Surtout, rappelons-nous que les métaux ne sont pas des actifs ni un investissement. Vos meilleurs investissements restent bien entendu ceux que vous faites dans la pierre, dans l’éducation, dans l’entrepreneuriat, ou dans votre jardin, etc. ... les métaux, eux, ne se reproduisent pas et ne se mangent pas. À garder à l’esprit !