J’ai lu beaucoup de conneries dans les commentaires. Ce qui revient souvent, c’est le manque de spiritualité, et la perte des valeurs, ou de la morale. Mais le fait qu’on acquiert ou adopte telle ou telle spiritualité, valeurs, ou morale, viens déjà en soit d’une autorité. Ce que certains ne comprennent manifestement pas, c’est que justement, la "spiritualité" (on va dire, de manière plus générale, ce qui remplit l’esprit), les valeurs, la morale, sont en train de changer car les autorités qui les édictent ont changé.
L’Inquisition condamnait au bûcher les relapses, et personne ne s’indignait contre cette violation du commandement "tu ne tuera point". Aujourd’hui, on s’en indignerait, mais on autorise l’avortement. On voit bien qu’il y a toujours une morale, c’est seulement qu’elle est différente. Imposer une morale ou des valeurs, c’est précisément ça le niveau suprême de l’autorité, car alors on peut légitimer toute oppression, et faire condamner toute opposition, par ceux même qui subissent l’oppression et bénéficieraient d’être influencé par l’opposition.
Et concrètement, il se passe quoi dans l’expérience de Milgram ? C’est que ces valeurs, cette morale, est une forme d’autorité de seconde main. Quand on a à faire à l’autorité en personne, le cheminement mental qu’on a, c’est qu’il sait mieux ce qu’il veut que ce qu’on croit qu’il veut. Ainsi, même dans des sociétés où faire souffrir et tuer est immoral, si on reçoit directement l’ordre de faire souffrir ou de tuer de ceux qui en même temps font que cette morale a de la force, on obéi. Car la morale est aussi une forme d’obéissance, mais plus distante, plus individuelle.
Ce qui permet à résister à l’ordre, c’est la capacité de rébellion. Et ça peut être aussi bien dans le sens d’obéir aux valeurs que de désobéir aux valeurs. C’est à dire que celui qui, sans ayant le moindre déséquilibre psychologique, bafouera au grand jour et publiquement une morale forte est, en ce sens, assez proche de celui qui refusera d’obéir à l’autorité quand on lui ordonnera de violer ces mêmes règles morales.
Concrètement, ça veut dire qu’entre les premiers avorteurs militants, qui risquaient de lourdes peines de prison, et les derniers militants pro-vie qui vont jusqu’à tenter d’assassiner des médecins avorteurs, il y a plus en commun qu’on ne pourrait l’imaginer : une capacité de rébellion pour un idéal en opposition aux valeurs admises ou aux ordres de l’autorité qui les fait admettre.
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