Egalité et Réconciliation
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Soral, de Marx à Maurras

« J’ai juré de vous émouvoir, d’amitié ou de colère, qu’importe ! » Cette formule de Bernanos, Alain Soral aurait pu la mettre en exergue de chacune de ses œuvres. Aucun de ses essais ne peut en effet laisser indifférent le lecteur de bonne volonté et tous ont contribué, d’une manière ou d’une autre, à entretenir la grande peur des bien pensants !

La publication récente chez Blanche et Kontre-Kulture, sous le titre de Chroniques d’avant-guerre , d’un recueil de ses articles parus dans le bimensuel Flash entre 2008 et 2011 ne fait pas exception à la règle. On y retrouve avec plaisir son talent de pamphlétaire, son flair de sociologue de terrain, son aisance à manier le concept, à faire bouger les lignes et à prendre le réel dans les mailles d’une dialectique qui n’hésite pas à s’inspirer des traditions intellectuelles les plus diverses.

L’art du boxeur

La forme brève qui est ici imposée par le genre du recueil d’articles n’est pas dépaysante pour le lecteur familier de Soral dont les ouvrages, même les plus construits, comme le roboratif Comprendre l’empire, paru en 2011, se présentent généralement sous la forme d’une succession de textes brefs qui épuisent en quelque sorte leur sujet à la manière du boxeur enchaînant les directs, les crochets et les uppercuts pour mettre KO son adversaire.

La spécificité de ces Chroniques d’avant-guerre n’est donc pas à proprement parler la forme mais plutôt la composition générale. Là où des ouvrages comme Sociologie du dragueur ou Comprendre l’empire (qui de l’aveu de l’auteur aurait pu s’intituler Sociologie de la domination) rassemblent les textes courts dont ils sont composés dans une progression logique en sept ou huit parties, les Chroniques d’avant-guerre progressent, elles, au fil de l’actualité des deux années et quelques mois de collaboration d’Alain Soral à Flash. Si l’impression de cohérence est moindre que dans Comprendre l’empire, on prend un réel plaisir à revivre les événements grands ou petits de cette période. Le fait d’être parfois en désaccord avec l’auteur sur telle analyse de circonstance ou de ne pas épouser tous ses goûts et dégoûts ne nuit en rien à ce plaisir.

Alain Soral a d’ailleurs lui-même l’honnêteté de montrer ses propres évolutions sur des sujets comme les printemps arabes ou sur des personnalités comme Jean-Luc Mélenchon ou Éric Zemmour. Sur ce dernier, nous appelons pour notre part de nos vœux une réconciliation entre les deux talentueux essayistes et polémistes. Sur le fond, et au-delà du cas particulier des Chroniques d’avant-guerre, le principal intérêt de la lecture d’Alain Soral réside dans sa capacité à produire des axes à la fois politiques et stratégiques toujours cohérents, souvent audacieux, à travers lesquels il va pouvoir donner une intelligibilité aux événements.

Gauche du travail, droite des valeurs

Le premier de ces axes est bien résumé par le slogan de son association Égalité et Réconciliation : « Gauche du travail, droite des valeurs. » À la manière de Christopher Lasch, de Jean-Claude Michéa, et à la suite de son maître en marxisme Michel Clousclard, Soral dénonce la collusion entre les libéraux et les libertaires, entre la droite et la gauche du capital comme dirait cet autre marxiste original qu’est Francis Cousin ; la gauche sociétale, soixante-huitarde, en fait libérale, ne faisant que s’acharner à détruire les reliquats de la société pré-capitaliste (« mettre une claque à sa grand-mère » selon l’expression de Marx) au nom d’un progressisme qu’elle partage avec la droite libérale, la droite des affaires, la droite du commerce ; la fonction objective de cette gauche étant de briser les moyens de résister au système que sont les solidarités traditionnelles comme la famille, la communauté, la nation. L’acharnement actuel du PS et des Verts à liquider le mariage civil en est une bonne illustration. Face à cette alliance des deux rives du libéralisme, Soral appelle à une unité militante de la gauche réellement sociale et de la droite contre-révolutionnaire. De Marx à Maurras en quelque sorte. Rappelons au passage que ce dernier écrivait qu’« un socialisme libéré de ses éléments démocratiques et cosmopolites peut aller au nationalisme comme un gant bien fait à une belle main ».

Le second axe soralien est une ligne de crête un peu comparable à celle sur laquelle s’était installé Maurras entre 1940 et 1944 quand il critiquait à la fois le camp des « Ya » et le camp des « Yes ». Elle consiste aujourd’hui à dénoncer la politique d’immigration voulue par le patronat et les libéraux de gauche comme de droite, autant d’un point de vue marxiste (l’armée de réserve du capital, la pression à la baisse sur les salaires, la destruction de l’esprit de solidarité et de lutte du prolétariat autochtone) que du point de vue de la défense de l’identité nationale, tout en refusant absolument toute forme d’islamophobie, et même en tendant la main aux musulmans.

La thèse de Soral et de son mouvement est la suivante : il y a beaucoup de musulmans en France, une bonne partie d’entre eux a la nationalité française. Il est dans l’intérêt des Français de souche de s’entendre avec la partie la plus saine de cette population. Pour cela, il faut combattre énergiquement tout ce qui peut s’opposer à cette réconciliation : l’islamophobie laïciste de la gauche, l’islamophobie xénophobe de la droite, la poursuite de la politique immigrationniste, principale pourvoyeuse du racisme que ses propres promoteurs prétendent hypocritement combattre, la repentance coloniale permanente, qui entretient la haine entre les communautés et qu’il faudrait remplacer par une valorisation de notre histoire commune, les tentatives de puissances étrangères de financer ou de manipuler la population musulmane de France, le refus par la République de reconnaître la dimension catholique traditionnelle de la civilisation française, préalable pourtant indispensable à une discussion sur la place de l’islam en France.

Tout pouvoir est une conspiration permanente

Un troisième axe est actuellement développé par Alain Soral, qui n’est pas sans rapport avec le précédent. Il s’agit cette fois d’une synthèse entre Marx et l’école traditionaliste de René Guénon et Julius Evola. Sensible aux convergences entre son analyse marxiste de l’économie, en particulier de la crise financière que nous traversons, et les analyses de l’école traditionaliste comme de certains maîtres spirituels musulmans contemporains, Soral semble orienter sa réflexion vers une lecture plus spiritualiste, voire plus eschatologique des événements. Cette veine plus récente dans son œuvre, mais qui est associée à un souci chez lui beaucoup plus ancien de toujours chercher à débusquer les hommes et les intérêts derrière les idées, souci en lui-même très utile du point de vue méthodologique, peut parfois le conduire à s’intéresser à une lecture conspirationniste de l’Histoire, illustrée il est vrai par des personnalités éminentes, mais sur laquelle nous avons pour notre part quelques réserves.

Cela dit, comme l’écrivait Balzac : « Tout pouvoir est une conspiration permanente. » Il faudrait en effet être bien naïf pour imaginer que le monde fonctionne sur le seul mode du pilotage automatique ! Les analyses développées par Soral mais aussi par Michel Drac ou Aymeric Chauprade sur les stratégies conduites au niveau de l’État profond américain par les conseillers du Prince, néo-conservateurs ou autres, qui gravitent dans les sphères dirigeantes de l’Empire, sont d’ailleurs du plus grand intérêt pour comprendre la géopolitique du monde contemporain.

Pour finir, nous ne pouvons qu’encourager nos lecteurs, quelles que soient leurs réticences à l’égard de l’un ou l’autre des axes de la pensée soralienne, que nous avons tenté de résumer brièvement, à se faire une idée par eux-même en lisant ces textes qui présentent une forme toujours attrayante et une réflexion toujours stimulante. Ils y goûteront un climat intellectuel qui n’est pas sans rappeler celui des premiers années de l’Action française.

Stéphane Blanchonnet

Retrouvez Chroniques d’avant-guerre chez Kontre Kulture :

 






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6 Commentaires

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  • #364791
    Le 21 mars 2013 à 14:51 par paco
    Soral, de Marx à Maurras

    C’est donc ca un journaliste ! Tellement habitué aux crachats, vomissures, haine des tapins du PAF !

    Excellent article bien évidemment.

    Ce journaliste a retracé ce que je pense moi-meme de mOssieur Alain Soral (Applaudissements nourris puis hystériques de la foule E&R), tout en constatant qu’il évite soigneusement d’évoquer le COEUR DU PROBLEME MULTIMILLENAIRE que sont les dajjalistes de souche et leurs esclaves, soumis par conviction, dont l’énergie vitale se ressource au plus abject mode de pensée qu’aucune créature sur Terre n’a jamais déféquer !!

    Mais c’est bien quand meme.

     

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  • #364937
    Le 21 mars 2013 à 18:34 par Yann
    Soral, de Marx à Maurras

    Zemmour c’est un peu un lâche. Il parle de certains sujets de manière juste (immigration, sans-papier, féminisme...) mais ne s’attaque jamais à Israël, se prétend anti-communautarisme alors qu’il fait preuve d’un tribalisme et d’une dialcetique talmudique impardonnable (ne parle quasiment jamais du CRIF, de la LDJ, du fait que Libération soit un journal de Rothschild, évite de parler des services secrets français dans l’affaire Merah, fait croire que l’Islam se réduit au Wahabisme et enfin, lui qui se dit journaliste politique, n’évoque jamais la Franc-maçonnerie).

    Soral, s’allier avec Zemmour c’est vendre son âme. Zemmour est un journaliste, qui travaille en plus pour la TV et la radio. Et tout le monde sait qu’un journaliste c’est soit un chômeur soit une ****

     

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  • #365041
    Le 21 mars 2013 à 21:29 par max
    Soral, de Marx à Maurras

    Dommage, Flash était vraiment sympa et son arrêt n’a pas tardé après le départ d’Alain.

    "Soral semble orienter sa réflexion vers une lecture plus spiritualiste, voire plus eschatologique des événements"

    C’est ce qui fait que Soral est Soral, et qu’il n’y a aucun intellectuel équivalent dans la francophonie. Lui il ose et sait parler à l’instinct des gens. Il fait le postulat d’une possible double lecture du monde : eschatologique et matérialiste. Et ça ouvre des champs de réflexion particulièrement pertinents au regard de l’air du temps.

    Les fouilles sous la mosquée Al-Aqsa, les vues 3D du futur 3ème temple de Salomon, Jérusalem, la capitale du monde globalisé comme le précise sans cligner des yeux Jacques Attali. La rencontre entre le temporel et le spirituel, avec soumission du goyim par la dévotion inextinguible à leur vision du monde.

    Il ose utiliser le terme galvaudé jusqu’ici de satanisme pour exprimer ce qu’il est avant tout, c’est à dire l’inversion des valeurs, de toutes les valeurs. On pourra alors tirer un ligne entre la volonté acharnée des élites à bouleverser notre monde, nos moeurs, pour nous amener dans une direction totalement opposée au bon sens de la masse. Vers le chaos. Dès lors ceux qui annoncent le retour du Djahal, de l’Antéchrist peuvent comprendre que celui-ci viendra asseoir sa domination sur le monde et imposer ce gouvernement mondial tant espéré par les élites.

    Un homme, une nation, une bête. Nul ne sait précisément ce que sera l’Antéchrist, mais on peut supposer que les temps sont proches et que si une nouvelle guerre mondiale éclate, alors ça sera probablement durant cette période qu’il apparaîtra.

     

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  • #365800
    Le 22 mars 2013 à 18:03 par oflerm
    Soral, de Marx à Maurras

    Tres bonne article, j’ai une petite question :
    Comment peut on expliquer que les moyens de résister au système sont les solidarités traditionnelles comme la famille, la communauté, la nation ?
    Si la réponse est trop longue, je veux bien que l’on me conseille un livre qui pourrai m’expliquer cela.
    Par avance merci.

     

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    • #365995
      Le Mars 2013 à 23:32 par Dolan
      Soral, de Marx à Maurras

      Parce que le système fait tout pour détruire ces structures, car saines, elles nous prodiguent les éléments de résistance à celui-ci.

       
  • #365825
    Le 22 mars 2013 à 18:41 par karimbaud
    Soral, de Marx à Maurras

    c’est parce que Soral est avant tout un être moral et de plus, intellectuellement sain !...il produit ses propres "grilles de lecture" dans un dialogue constant entre ce qui a été fait et proposé avant et les "réponses" que le réel en donne aux travers d’évènements qui s’inscrivent dans un processus historique dont la cohérence et la logique, bien souvent, nous échappe...un disciple à la fois de Clouscard et de Rousseau !

     

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