La presse internationale a largement relayé l’annonce faite par le CNT libyen de la prise de Brega, un port hautement stratégique pour le commerce d’hydrocarbures. Les journalistes présents dans le monde arabe ont immédiatement pu vérifier que cette annonce n’était qu’une intox, simplement en regardant la télévision qui émettait en direct de Brega. Ils ont pourtant choisi de n’en rien dire.
Comment fonctionne l’AFP en Libye ? En voici un exemple.
Dans une dépêche datée du 19 juillet 2011 [1], l’Agence France Presse annonce : « Le gros des forces de Kadhafi s’est retiré à Ras Lanouf", à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de Brega, a déclaré Shamseddine Abdelmolah, un porte-parole des rebelles, précisant qu’il restait 150 à 200 loyalistes bloqués sur le site pétrolier.
Brega est complètement sous le contrôle de nos forces, aidées par les tribus et les volontaires, et tout ce qui a été annoncé par le soi-disant Conseil national de transition (organe des rebelles) relève du mensonge et de la désinformation", a rétorqué lundi soir le porte-parole du régime, Moussa Ibrahim. Selon lui, les rebelles ont "tenté de reprendre la ville, mais ont été repoussés". L’AFP n’était pas en mesure mardi matin de vérifier les affirmations des deux camps sur ce point. »
Qui ment ? L’AFP affirme n’en rien savoir.
Or, la télévision nationale libyenne a diffusé toute la nuit des images en direct du centre de Brega permettant de constater, sans possibilité d’erreur, que la ville est contrôlée par les forces nationales.
Pour faire cesser ce spectacle susceptible de démoraliser un peu plus les forces rebelles, l’OTAN a bombardé l’émetteur TV de Brega, mais la diffusion a repris une heure plus tard.
Pour créditer ce qu’elle sait donc être une intox, l’AFP poursuit dans la même dépêche en citant le ministre français de la Défense : « Je pense profondément que le compte à rebours est engagé et que, dans ce type d’opération, les choses peuvent aller plus vite qu’on ne le pense, a dit M. Longuet dans un entretien télévisé (…).
Cela bouge sur le terrain
Des femmes et des hommes qui n’ont jamais été des combattants ont décidé de s’organiser pour ne plus supporter l’autorité militaire et dictatoriale de Kadhafi et cela bouge sur le terrain après c’est vrai des semaines où des gens se sont préparés à ce qui n’était pas leur métier il y a quelques mois encore, a-t-il souligné. »
Le lecteur observera la méthode :
- la nouvelle est annoncée de manière balancée (point de vue de chacun des deux camps) ;
- l’AFP affirme mensongèrement ne pas être en mesure de trancher, renvoyant les deux camps dos-à-dos ;
- l’AFP relaie la propagande du ministre de la Défense sans la questionner. M. Longuet fait part de sa conviction ("On va gagner…") qui peut ainsi se substituer aux faits.