La suspension de l’écotaxe par le gouvernement à la suite du mouvement social en Bretagne a permis de reprendre le dossier général d’une hypothétique taxation des transports routiers visant à diminuer l’utilisation de la route au profit du rail. On comprend bien la logique du projet, et on l’approuve, mais l’application en est difficile. De plus, on entend désormais dire que l’écotaxe va être une incitation à la relocalisation des activités. Pourquoi pas ? Mais alors il faut que ceci soit d’emblée pensé. En réalité l’écotaxe révèle des incohérences, mais aussi des dérives importantes, dans l’action de l’État.
(1) On a recréé à propos de l’écotaxe une « ferme des impôts » car c’est une société privée (Ecomouv) qui est chargée de collecter cette taxe. Ceci nous ramène, sous couvert d’une prétendue « modernité » du Partenariat Public Privé (PPP) directement à l’Ancien Régime. Cette dérive doit être dénoncée et abolie.
(2) L’écotaxe ne sera pas payée sur les portions d’autoroutes privatisées. On comprend la logique : éviter une « fuite » du trafic des poids lourds vers le réseau des routes départementales. Mais, c’est aussi une prime donnée aux transports à longue distance, ceux là même qui sont les plus susceptibles d’être détournés vers le train, et là où la question de la relocalisation des activités se pose le plus. Si l’on veut décourager ces transports à longue distance, et ne pas pénaliser les activités locales qui, elles, doivent nécessairement passer par la route, il faut revoir ce principe et l’accompagner de mesures réglementaires limitant la circulation des poids lourds hors autoroutes, et en particulier des poids lourds étrangers. C’est la combinaison de réglementation et de taxes qui aura alors l’effet le plus dissuasif.
(3) Il convient de revoir le tarif de l’écotaxe qui n’est pas assez progressif et qui pénalise trop les petits trajets. Ce tarif est fondé sur une taxe kilométrique (0,11 Euro par kilomètre pour un véhicule de 2 essieux). Il est donc en proportion du kilométrage. Si l’on adopte un coût du kilomètre qui varie en fonction du nombre de kilomètre, on change la donne.
On a adopté ici une formule de type exponentielle avec un recoupement au niveau du 475e kilomètre puis un plafonnement par la suite, à hauteur de 0,2242 € à partir du kilomètre 675.
Coût kilométrique = 3(n/250) + 3, où n représente le nombre de kilomètres parcourus par le véhicule.
Le coût total est ainsi inférieur dans la nouvelle formulation à ce qui était prévu avec le mode de calcul originel jusqu’à 470 km. Un véhicule couvrant 255 km ne paierait que 15,47 € contre 28,05 €.
Ce système pénalise fortement les « grands » trajets, soient ceux qui peuvent être réalisés par le rail (objectif de la taxe) et ceux qui sont le fait de marchandises importés et qui transitent par un Marché d’Importance National (tel Rungis). Par contre, il avantage le transport local et semi-local, et donc les producteurs d’un certain territoire.
CQFD !