Méditations pour tous les jours de l’année liturgique, tirées des œuvres de saint Thomas d’Aquin par le R.P. Mézard O.P.
I
L’Ascension du Christ fut sublime, car il est monté aux cieux. Ceci peut être exposé de trois manières :
1° D’abord, Il est monté au-dessus des cieux corporels. Il est monté au-dessus de tous les cieux, dit saint Paul aux Éphésiens (4, 10). Le Christ, le premier, réalisa une telle ascension ; auparavant, en effet, il n’y avait de corps terrestre que sur la terre, si bien que même le paradis où vécut Adam était situé sur la terre.
2° En second lieu, le Christ est monté au-dessus de tous les cieux spirituels, c’est-à-dire de toutes les natures spirituelles. Il a fait asseoir Jésus à sa droite dans les cieux au-dessus de toute Principauté et Puissance, Vertu et Seigneurie et de tout nom quel qu’il soit, non seulement dans ce siècle-ci, mais dans le siècle à venir. Il a tout mis sous ses pieds (Éphés. 1, 20-22).
3° En troisième lieu, Il est monté jusqu’au trône de son Père. Le prophète Daniel dit de lui en effet (7,13) : Voici que, sur les nuées du ciel venait comme un fils d’homme, et il parvint jusqu’à l’Ancien des jours ; et nous lisons dans saint Marc : Il fut élevé dans le ciel (16, 19) et il est assis à la droite de Dieu : ce qui s’entend métaphoriquement, car si en disant de Jésus Il est assis à la droite de Dieu nous pensons à sa divinité, cela veut dire alors : Jésus est égal en tout à son Père ; mais si nous pensons à sa nature humaine, cela veut dire alors que le Christ jouit des dons les plus excellents. C’est une telle excellence que Lucifer a ambitionnée. Isaïe (14, 13) lui fait dire : Je monterai au ciel ; j’établirai mon trône au-dessus des astres de Dieu. Mais le Christ seul est parvenu à cette éminence. C’est pourquoi nous lisons au Psaume 109, 1 : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite.
II
L’Ascension fut conforme à la raison, parce qu’elle a pour terme les cieux et cela pour trois motifs :
1° Le ciel était dû au Christ de par sa nature. Il est conforme à la nature que chacun retourne à son origine. Or, le principe d’origine du Christ, c’est Dieu, qui est au-dessus de tout. Le Christ dit en effet à ses Apôtres : Je suis sorti du Père et je suis venu en ce monde : maintenant je quitte le monde et je vais au Père. Et, bien que les saints montent au ciel, ce n’est cependant pas comme le Christ, car le Christ y est monté par sa vertu propre, tandis que les saints y sont tirés par le Christ. On peut dire également que seul le Christ monte au ciel, car les saints n’y montent qu’autant qu’ils sont membres du Christ, qui est la tête de l’Église.
2° Le ciel lui était dû de par sa victoire ; car le Christ a été envoyé dans le monde pour combattre contre le diable, et il l’a vaincu ; et c’est pourquoi il a mérité d’être exalté au-dessus de tout.
3° À cause de son humilité. Aucune humilité ne surpasse celle du Christ qui, étant Dieu, a voulu devenir homme ; et étant Seigneur et Maître, a voulu prendre la forme d’un esclave : Il s’est fait obéissant jusqu’à la mort et il est descendu jusqu’aux enfers. Et c’est pourquoi il a mérité d’être exalté jusqu’au ciel jusqu’au trône de Dieu ; car l’humilité est le chemin de l’exaltation.
III
L’Ascension du Christ fut utile de trois manières :
a) Pour notre itinéraire, car il est monté au ciel pour nous conduire. Nous ne savions pas le chemin ; mais il nous le montre lui-même. Et pour nous donner l’assurance de la possession du royaume céleste. Je vais, dit-Il aux Apôtres, vous préparer une place (Jean 14, 2).
b) Pour notre sécurité, car il monte au ciel pour intercéder en notre faveur auprès du Père. Saint Jean écrit : Nous avons près du Père un avocat, Jésus-Christ (1 Jean 2, 1).
c) Pour attirer à lui nos cœurs. Là où est votre trésor, là aussi est votre cœur (Matth. 6, 21). Pour que nous méprisions les choses temporelles : Si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les choses d’en haut où siège le Christ, à la droite de Dieu. Appliquez votre cœur aux choses d’en haut et non pas à celles de la terre (Col. 3, 1).
Illustration : Rembrandt, L’Ascension du Christ, 1636.