Les achats rapides, ni programmés, ni même envisagés, intéressent particulièrement les chercheurs en gestion et marketing, car dans certaines enseignes, ils représentent 80 % du chiffre d’affaires. Une conséquence de l’abondance de produits qui nous sont proposés ?
Pour Intissar Abbes, docteur en sciences de gestion, et Isabelle Barth, professeur des universités de sciences de gestion, qui signent l’excellent Voyage au cœur de l’impulsion d’achat (Éditions L’Harmattan), ces comportements n’ont rien de pathologique et sont désormais vécus comme des expériences maîtrisées. C’est le cas lorsque vous décidez de partir au supermarché en vous disant : « J’achèterai ce qui m’inspirera pour mon dîner de ce soir. » « On observe, de plus en plus, que les achats non planifiés sont délibérés et constituent un nouvel aspect de l’efficience des courses contemporaines », expliquent-elles.
Rien à voir avec les « achats compulsifs ». Eux sont des comportements de consommation chroniques, répétitifs et aux conséquences émotionnelles essentiellement négatives. Le Dr Marie Grall-Bronnec, psychiatre au service d’addictologie du CHU de Nantes, précise que l’on parle addiction à l’achat lorsque celui-ci s’enclenche chez l’« addict », soit pour soulager un état d’inconfort (dépression, anxiété…), soit pour se créer des émotions positives. « C’est donc une forme d’autotraitement visant à réguler des émotions envahissantes, explique la psychiatre. Mais même si elle sait que le plaisir immédiat ne durera pas, la personne “accrochée” à l’achat compulsif ne peut plus s’en libérer. » Tentative de contrôle, perte de son libre arbitre, assujettissement à cette conduite… Peu à peu, comme dans les cas d’alcoolisme, de jeu pathologique ou de cyberdépendance, ce comportement de moins en moins satisfaisant devient le centre de l’existence de la personne dépendante et prend peu à peu la place d’autres sources de plaisirs.
Achats à conséquences négatives
Dans l’achat impulsif au contraire, toujours provoqué par des stimuli extérieurs (ventes flash, aménagement des sites ou des boutiques…), la notion de « négociation intérieure » devient déterminante et décidera de la satisfaction éprouvée ou non après l’achat. Dans leur étude, les chercheuses Intissar Abbes et Isabelle Barth montrent bien que face aux stimuli (l’objet est beau, attractif, bien mis en valeur ou très peu cher), ce sont la rapidité de la prise de décision, la non-réflexion et la non-planification associées à une mauvaise humeur qui entraîneront des achats à conséquences négatives (mauvais choix, taille inadaptée, etc.). Autant d’influences qui expliquent peut-être pourquoi 50 % des personnes qui ont « fait les soldes » regrettent leurs achats.