Dans la série des « révolutions de couleur » (coups d’États par manipulation de foules) fomentées par les États-Unis depuis une quinzaine d’années selon le modèle de la bleue fomentée en France par la Grande-Bretagne en représailles à son soutien à l’indépendance des États-Unis, celle-ci est aussi multicolore que la fameuse salade.
On y trouve évidemment des ingrédients rayés rouge et blanc avec coin bleu et étoiles blanches, comme chaque fois qu’apparaît une opportunité de semer le chaos en Europe. On y trouve des ingrédients bleu marial avec des étoiles jaunes, puisque l’Union européenne veut faire sauter le nouveau verrou à l’invasion asiatique. On y trouve des étoiles blanches à quatre branches, puisque l’OTAN veut punir un pays qui a refusé de se joindre aux hostilités contre la Russie. On y trouve du vert plus ou moins bronzé, accumulé à la frontière sud, et du rouge avec aigle noir, dans le nord.
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Il se trouve qu’en février un groupe de dix pays submergés par l’intrusion illégale massive s’est entendu sur la nécessité de restaurer l’application des accords de Schengen et de Dublin (suspendue en 2015 sur injonction des grandes puissances de l’UE), c’est-à-dire de rétablir un contrôle aux frontières à partir de début mars. La Macédoine ne pouvait logiquement plus laisser entrer des foules de clandestins si elles ne pouvaient pas ensuite passer dans les pays voisins. Des dizaines de milliers de migrants illégaux se sont donc retrouvés bloqués en Grèce, raison pour laquelle l’Union européenne a vite négocié et signé un accord avec la Turquie pour que celle-ci reprenne une partie du corps expéditionnaire migratoire qu’elle avait débarqué en Grèce, et que l’Union irait ensuite chercher en Turquie par avion. Mais les décideurs immigratoires n’avaient pas l’intention de laisser fermer la voie terrestre (et maritime), puisqu’ils venaient de décider, en raison de la fermeture des frontières de la Serbie et des pays voisins de l’Autriche et de la Hongrie, de réorienter les flux un peu vers l’ouest (bien que plus montagneux), les faisant passer par la partie occupée de la Serbie, en chargeant les forces d’occupation de l’OTAN au Kosovo de transférer les intéressés de la frontière macédonienne à la frontière albanaise puis d’assurer leur transport par bateaux d’Albanie en Italie. Mais la Macédoine restait une voie de passage incontournable. On avait compris, dès qu’elle a rétabli ses contrôles frontaliers avec la Grèce, qu’elle serait déstabilisée.
Les portes seront rouvertes de l’intérieur, de gré ou de force, par le gouvernement actuel ou par le prochain. Donnant le ton, la Grèce, encore menacée de mise en faillite par le FMI la semaine dernière, objet d’incursions aériennes quotidiennes par l’aviation turque et soumise au chantage d’un accroissement de l’invasion de ses îles, a elle-même reproché au gouvernement macédonien l’usage d’outils de maintien de l’ordre (lacrymogènes et balles de caoutchouc...) pour repousser les tentatives d’enfoncement de sa frontière. Or, sachant que l’effectif de candidats à l’intrusion par effraction, en attente et échauffement dans le camp d’Idomeni (côté grec), est déjà officiellement supérieur à l’effectif total de l’armée macédonienne, sifflets et matraques ne pourront pas suffire à les contenir.
Comme si cette situation ne portait pas assez de risques de déstabilisation, l’Union européenne a intimé au gouvernement macédonien d’annuler les élections législatives qu’elle avait elle-même exigées. Le motif de cette intimation n’est pas seulement que l’opposition n’a aucune chance de l’emporter dans la situation de crise multiple actuelle, mais qu’on cherche désormais des thèmes politiques forts pour mobiliser et manipuler les foules de manœuvre qui constituent toujours, dans les scenarii bien préparés de « révolution de couleur », la couverture et le véhicule des petits commandos professionnalisés (par Otpor) banalisés, chargés des provocations d’escalade de la violence, des éliminations physiques ciblées puis de l’escorte et la mise en place du futur pouvoir.
De leur côté, les populations européennes sont préparées à l’issue inéluctable par leurs médias qui, comme d’habitude, commencent par remplacer l’expression « gouvernement macédonien » par « régime Ivanov », puis l’accusent de la pire des infâmies, celle d’être « soutenu par Poutine ». Ce n’est d’ailleurs pas faux, puisque le gouvernement russe, toujours respectueux de la légalité internationale et de la souveraineté des pays tiers, s’interdit de soutenir les mouvements internes « d’opposition » violente, c’est-à-dire de déstabilisation armée, et continue son dialogue diplomatique avec le gouvernement légal de tous les pays du monde, y compris d’ailleurs ses ennemis (Géorgie ou Turquie par exemple). Pour leur part, les États-Unis ont aussi clamé que les élections sont inopportunes et la presse annonce que les pays de l’OTAN menacent la petite Macédoine de « sanctions », langage essentiellement destiné à faire savoir au monde qu’un jugement a été rendu et que le pays est mis au ban des nations, bien qu’on ne compte pas prendre le temps de déterminer et appliquer la moindre sanction.
La déstabilisation est en cours et prévue pour être conclue rapidement. Trois pions sont en place, les foules de manœuvre Otpor au centre, les unités albanaises supplétives de l’OTAN au nord, et la division asiatique venue à pied (et en canots) de Turquie au sud. Les carottes de la macédoine sont cuites.
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#Macédoine > des milliers de Macédoniens ont manifesté pour demander le départ du président Ivanovhttps://t.co/NFbJWrRTkE
— iTELE (@itele) 14 avril 2016
Lire également : « Réunion à Vienne sur la crise en Macédoine : l’opposition pose des conditions » (Romandie.com, 20 avril 2016)