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La fondation Gates s’intéresse de près à la production de diverses ressources à partir des excréments humains – dans le domaine alimentaire, notamment. Siège de la Toilet Board Coalition, la Suisse semble être particulièrement impliquée dans le projet peu ragoûtant de la « toilet economy »…
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De fait, il semblerait bien qu’aujourd’hui, l’emploi d’insectes ait vocation à se généraliser dans nos productions agroalimentaires. C’est ce que la prestigieuse École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) appelle, dans un jargon d’affaires un peu comique, les « insect value chains ».
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Le Prof. Mathys a ainsi été récompensé cette année par la société d’agroalimentaire Kellogg pour ses travaux sur « l’utilisation efficiente de larves dans la production d’aliments pour animaux sûrs et plus durables ». Une offre destinée à l’élevage de poules, par exemple…
Le site de l’EPFZ précisant que les chenilles en question (larves de mouches soldats noires) peuvent en réalité aussi bien être utilisées comme nourriture pour animaux (feed) que pour servir de base à l’alimentation humaine (food).
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Dès 2010, un étudiant de l’EPFZ expliquait dans sa thèse de doctorat :
« La technologie de traitement des déchets organiques utilisant les larves de mouches soldats noires (hermetia illucens) ouvrent la voie à une option économiquement viable […] L’alimentation [des larves] réduit jusqu’à 80 % de la biomasse des déchets organiques tels que les restes de marché/cuisine, le fumier animal ou même les excréments humains. »
Le doctorant en question, un certain Stefan Diener, n’allait pas tarder à rejoindre l’Institut fédéral des sciences et technologies de l’eau (EAWAG), où il allait notamment travailler sur des questions liées aux « boues fécales »… et au « compostage à l’aide de mouches soldats noires » ! Car il est de fait que pour l’EAWAG les mouches soldats noires peuvent être nourries « de manière appropriée » avec des « excréments humains » et autres détritus provenant de « fosses septiques »…
En juillet 2018, Stefan Diener allait ainsi cosigner un article scientifique avec le Prof. Mathys portant précisément sur cette thématique du « traitement des déchets à l’aide de mouches soldats noires »… Le texte précisant que les « excréments humains » faisaient partie de « l’alimentation naturelle » des mouches soldats noires – et qu’ils permettaient de maximiser la production de protéines des larves en question.
Et voilà que dès le mois suivant, le Prof. Mathys faisait breveter ses méthodes innovantes pour tuer les insectes « de manière éthique » avant des les transformer en aliments. (« Anesthésier les insectes par refroidissement, puis les couper, ce qui détruit leur système nerveux »)
Étant donné l’intérêt persistant de l’EPFZ pour ces nouvelles techniques « alimentaires », on devine que l’élevage de poules n’est pas la seule activité qui pourrait bénéficier (financièrement) de la culture de larves coprophages… Ce type de protéines n’aurait-il pas, en effet, vocation à être employé dans la fabrication de viande synthétique ? Il se trouve en effet que Micarna, la filiale du groupe Migros chargée de développer des produits à base de viande synthétique, est membre du réseau Swiss Food Research, qui s’intéresse tout particulièrement à l’emploi d’insectes « comme source de protéines ». Or, pour développer son offre de « protéines saines », le Swiss Food Research fait bel et bien appel aux compétences scientifiques… du Prof. Mathys de l’EPFZ !
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Il nous faut encore souligner ici le fait qu’Alexander Mathys travaille avec Nestlé depuis une bonne dizaine d’années déjà – et qu’ils ont développé ensemble la quasi-totalité des brevets de son institut « d’agroalimentaire durable ».
Il n’est donc guère étonnant que Nestlé cherche à développer des « cultures d’insectes et d’algues » comme source de protéines – puisqu’il s’agit-là, précisément, des deux sujets de prédilection du Prof. Mathys.
Mais au fait, que viennent faire les algues dans tout cela ?
Avant tout, précisons que l’EAWAG – qui propose de cultiver des larves de mouches soldats noires en les nourrissant d’excréments – est l’un des « partenaires clés » de la Swiss Food & Nutrition Valley, lancée par Nestlé en janvier dernier.
Précisons encore que l’EAWAG travaille activement à l’idée de « collecter séparément l’urine [humaine] », si riche en « précieux nutriments », en l’isolant des excréments.
Précisons enfin que la chlorella, la « micro-algue » dont le Prof. Mathys (EPFZ) souhaite développer l’exploitation à des fins alimentaires, peut être cultivée en utilisant exclusivement de l’urine humaine. De fait, diverses études ont été conduites à ce propos au cours des dernières années, avec des résultats visiblement très probants.
Il est ainsi passablement troublant de constater qu’Alver, une start-up issue de Nestlé et qui collabore justement avec l’EPFZ, commercialise déjà divers produits « véganes » et « détox » à base de chlorella. N’y a-t-il pas quelque raison de supposer que les protéines de synthèse avec lesquelles cette société fabrique ses « pâtes véganes » et autres « barres de protéines » (en attendant les « steaks » et autres « muesli »), ont été cultivées avec l’eau des égouts ?
Une chose est certaine. C’est que le Prof. Mathys a participé à une récente étude vantant les qualités nutritives de la poudre de chlorella commercialisée par Alver – celle-ci pouvant servir à créer des « analogues de viande »…
On notera d’ailleurs que la « Golden Chlorella » produite par Alver se présente sous la forme « d’une poudre jaunâtre et sans goût ». Or, il se trouve justement qu’un autre membre de la Swiss Food & Nutrition Valley, le parfumeur Firmenich, propose précisément de rendre les protéines végétales « délicieuses » – en y ajoutant des arômes « naturels »… avec la possibilité, par exemple, de donner un goût de « bœuf légèrement grillé » à des « analogues de viandes » créés à base de « protéines végétales » !
Se pourrait-il alors que Firmenich ambitionne de donner bon goût à des algues insipides cultivées à l’urine humaine ?
Une hypothèse d’autant plus envisageable que Firmenich a noué, au cours des dernières années, un partenariat de « développement durable » avec l’EAWAG – qui propose, comme on l’a vu, d’utiliser l’eau des égouts à des fins alimentaires. Mieux encore : Firmenich fait partie de la « Toilet Board Coalition ». Un groupement mené par la Bill & Melinda Gates Foundation – et dont la raison d’être est de produire des « marchandises de valeur » à partir de « déchets biologiques » !
Or, là encore, il se trouve que l’EAWAG collabore avec la Toilet Board Coalition en tant que « partenaire académique » ! On sera donc peu surpris d’apprendre que la Toilet Board Coalition s’intéresse énormément à la production de mouches soldats noires à partir de matières fécales…
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Dans « l’économie circulaire », l’eau issue de la cuvette de vos toilettes (« poop water ») vous sera donc à nouveau servie à boire. Quant à votre mixtion et vos selles, quelques transformations biochimiques plus ou moins présentables permettront de vous les resservir à manger. Pour le plus grand bonheur des leaders mondiaux de l’agroalimentaire, qui pourront puiser dans des ressources « nutritionnelles » abondantes et bon marché, tout en accroissant considérablement leurs exportations d’eau minérale – vers l’Asie, par exemple.
Bienvenue dans « l’économie consciente et durable » du XXIe siècle, où la coprophagie devient « saine » et « l’écologie »… extrêmement rentable.
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