Après Martine Aubry, qui a évoqué un « accord avec l’armée pour réduire l’armée » et le président du groupe écologiste au Sénat, Jean-Vincent Placé, qui a récemment suggéré de se passer de « l’arme nucléaire française, totalement autonome, totalement indépendante », c’est au tour de l’ancien Premier ministre socialiste, Michel Rocard, de plaider pour une réduction du budget de la Défense afin de ramener le déficit des finances publiques à 3% du PIB en 2013.
« On supprime la force de dissuasion nucléaire, 16 milliards d’euros par an qui ne servent absolument à rien » a-t-il ainsi déclaré sur BFMTV, le 19 juin, en répondant à une question portant sur les « recettes nouvelles » à mettre en oeuvre pour lutter contre les déficits.
Cela étant, Michel Rocard est bien loin du compte et semble avoir confondu entre les francs et les euros. La force de frappe française coûtera en effet 3,403 milliards d’euros en 2012 (du moins selon le projet de Loi de finances adopté par le Parlement à la fin de l’année dernière), soit 4,7 moins !
La position de l’ancien Premier ministre de François Mitterrand (et par ailleurs ambassadeur de France chargé des négociations sur l’Arctique et l’Antarctique depuis 2009) n’est pas nouvelle. Il l’a exprimée à plusieurs reprises ces dernières années, notamment en co-signant avec Alain Juppé, avec qui il a présidé la commission du Grand emprunt, Alain Richard et le général Norlain, une tribune qui, publiée par le quotidien Le Monde, plaidait pour un désarmement nucléaire mondial.
En juin 2008, en plein débat au sujet des recommandations du nouveau Livre blanc sur la Défense et la sécurité nationale (LBDSN), Michel Rocard avait défendu l’idée de supprimer la dissuasion nucléaire pour en réaffecter les crédits à la construction d’un second porte-avions, au crédits d’équipements des forces armées et à l’entraînement de ces dernières, et non à la réduction de la dette publique, comme il vient de le proposer.
« L’arrivé à la détention d’armes nucléaires par des Etats gouvernés par des fanatiques religieux, en dehors de toute référence à la rationalité dans le traitement des conflits, est un danger extrême. Comme l’est davantage, peut-être, la saisie de bombes ou même seulement de matières nucléaires par des groupes terroristes non étatiques », écrivait-il alors dans les colonnes du Figaro.
« Devant de telles menaces, qui sont celles d’aujourd’hui, il est clair que la destruction de populations entières n’est pas la bonne réponse. La bonne réponse, c’est la destruction ponctuelle et précise d’installations et d’engins, voire de personnes. Le nucléaire n’est ici d’aucune utilité », avait-il poursuivi, alors que le président de la République de l’époque, Nicolas Sarkozy déclara, trois mois plus tôt, que la dissuasion était « l’assurance-vie de la Nation ». Et de conclure : « C’est dans le secteur du nucléaire qu’il faut commencer à faire les économies nécessaires pour (…) le deuxième porte-avions, qui, lui, répond concrètement à beaucoup de conflits aujourd’hui. »
Quoi qu’il en soit, lors de la campagne électorale qui l’a mené à l’Elysée, le président François Hollande a répété qu’il n’entendait pas remettre en cause la dissuasion nucléaire nucléaire. Mieux même : il n’était pas question pour lui de remettre en cause la composante aéroportée de la force de frappe française.
Mais, en tout cas, il est certain que les ressources allouées à la dissuasion suscitent des convoitises en ces temps de crise…