Elle s’appelle en réalité Ramatoulaye Yade-Zimet, ayant épousé Joseph Zimet, militant socialiste (…) et chargé de mission à la communication de l’Agence française du développement (…) et fils du célèbre chanteur yiddish Ben Zimet (…).
Née le 13 décembre 1976 à Dakar (Sénégal), Rama Yade est issue de la haute bourgeoisie noire : sa mère est professeur et son père, professeur d’histoire, fut le bras droit et secrétaire particulier du président (accessoirement socialiste) Léopold Sédar Sengor.
De confession musulmane (elle est toujours pratiquante et volontiers prosélyte en cette matière), elle a été éduquée dans un collège catholique. Elle est arrivée en France en 1987, lorsque son père fut pratiquement exilé à Paris, le successeur de Senghor, le président Abdou Diouf ne le détestant même pas cordialement. La famille s’installe donc dans un immeuble résidentiel de Colombes (Hauts-de-Seine). Son père ayant divorcé, elle est demeurée avec sa mère et ses trois frères et soeurs. Elle continue à fréquenter des écoles privées catholiques, passant son baccalauréat en 1994.
Sa mère se rapproche du Parti communiste, via le Secours populaire français. Rama Yade s’implique dans cette organisation para-communiste, devenant monitrice pour les enfants défavorisés. Elle visite ainsi la « France profonde », en retirant un grand respect envers « ce communisme de proximité, non idéologique mais humaniste ». Elle aura ensuite sa période Black Panthers, avec portraits de Malcolm X sur les murs de sa chambre.
Après hypokhagne, cette femme aux idées bien arrêtées, et parfois cassante et trop sûre d’elle, s’oriente vers l’Institut d’études politiques de Paris (diplômée en 2000). Elle a été reçue, en 2002, au concours d’administrateur du Sénat (elle serait la première femme noire à réussir ce concours, mais d’autres femmes noires avaient déjà atteint ce poste par voie interne), étant alors affectée à la commission des affaires sociales, pour les secteurs de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’outremer.
En septembre 2005, elle bénéficie d’une promotion fulgurante comme adjointe à la directrice des programmes de Public-Sénat, la très coûteuse chaîne de télévision dirigée par Jean- Pierre Elkabbach, qui la protégera dès cet instant et la fera profiter de son entregent (notamment auprès de Christian Poncelet).
En février 2006, elle réintègre les services du Sénat, étant une nouvelle fois promue comme directrice adjointe du département des ressources humaines. Elle a également rejoint le Club XXIe Siècle, le groupe de pression des personnalités issues de l’immigration dont elle est vice-présidente, tout comme Rachida Dati (pour des détails sur ce club, cf son portrait paru dans F&D 235). On la retrouve au Club Averroès, nettement plus engagé à gauche, qui réunit également des membres des « minorités visibles ».
À la suite de l’incendie d’un immeuble du XIIIe arrondissement occupé illégalement par des familles africaines en 2005, elle signe alors, sous le pseudonyme d’Aminata Fall une tribune vengeresse dans Le Monde afin que la France « cesse de regarder ses enfants comme des gens d’ailleurs et les reconnaisse enfin comme les siens ».
Suivra alors un livre, Noirs de France (Calmann-Lévy,), dont on cite rarement le sous-titre : Les Nouveaux Neg’Marrons (les nègres marrons, étant les esclaves noirs en fuite). Un livre qui, s’il était lu aujourd’hui par les dirigeants de l’UMP, susciterait des grincements de dents et plus, tant il présente le communautarisme sous un angle favorable ainsi que l’islam.
Bien qu’hostile à la Constitution européenne et favorable à l’intervention américaine en Irak (même si « le résultat n’est pas à la hauteur des attentes »), elle adhère finalement fin 2005 à l’UMP et non au PS comme on l’aurait pensé : « Rama fait l’unanimité à gauche. Le paradoxe est qu’elle n’existerait pas au Parti socialiste. Les gens de talent et d’expérience appartenant aux minorités sont nombreux au PS » explique un cadre du PS (Le Monde, 2 mars 2007).
Il semble qu’en réalité, elle fait un rapide passage au Parti socialiste comme l’assurent plusieurs responsables de ce parti, mais en soit parti, faute de bénéficier d’une promotion rapide.
Elle demande aussitôt à rencontrer personnellement Nicolas Sarközy, « qui a mis fin à la double peine » et va désormais lier son destin avec lui. Ce dernier qui l’a remarquée et recherche des responsables issus des « minorités visibles », la propulse dès le 6 mars 2006 secrétaire national de l’UMP en charge de la francophonie, un poste très recherché alors qu’elle n’a aucune expérience ni militante ni politique.
Cette adepte de la discrimination positive » (c’est-à-dire la discrimination à l’égard des Français de souche) apparaît sur la scène médiatique le 14 janvier 2007 lors du congrès d’investiture de Sarközy où elle dénonce le Parti socialiste, accusant ses dirigeants d’être « sans projet, sans idées, sans vision » et d’avoir créé une « République du guichet » en accordant aux enfants de l’immigration « de la pitié plutôt que le respect », allant jusqu’à évoquer la mémoire de Gaston Monnerville, ancien président du Sénat.
Très vite, avec Rachida Dati, elle bénéficie des faveurs des médias. Bien que fréquemment citée parmi les candidats des minorités pour l’UMP à Paris ou en Ile-de-France, elle préfère ne pas être candidate et se contente de fréquenter les plateaux audiovisuels. Sans doute a-t-elle raison : aucun candidat des minorités visibles, sauf une socialiste, d’origine guadeloupéenne, à Paris, n’a été élu en métropole.
Elle aurait dû devenir secrétaire d’Etat à la Francophonie (poste finalement confié à Jean-Marie Bockel) mais, quelques heures avant sa nomination, certains ont quand même remarqué l’inimitié totale que lui porte (comme à son père) Abdou Diouf, président de l’Organisation internationale de la francophonie (il refuse même de lui parler). Elle a donc été affectée aux Affaires étrangères et aux Droits de l’homme même si elle ne connaît strictement rien au premier sujet. Selon des sources orales, elle appartiendrait à la franc-maçonnerie féminine mais nous n’en avons pas trouvé de trace écrite.
[Lettre Faits&Documents d’Emmanuel Ratier - n°239 - Juin 2007]