Une rixe entre des centaines d’exilés afghans et érythréens a fait 22 blessés dont cinq par balles ce jeudi à Calais. Entre précarité, insécurité et tensions quotidiennes avec les forces de l’ordre, cette explosion de violence ne surprend pas Claire Millot, bénévole de l’association Salam, l’une des trois organisations les plus actives à Calais.
Depuis la visite d’Emmanuel Macron à Calais le 16 janvier, on observe une hausse des incidents entre migrants ou avec les forces de l’ordre. Comment l’expliquer ?
Les affrontements de jeudi soir ne sont pas dus au hasard. Ils interviennent à un moment où la tension est terrible. Cela fait des jours que les migrants sont de plus en plus vulnérables. Il fait froid, il pleut. Après la visite du chef de l’État, environ 200 migrants de plus sont arrivés, de jeunes Érythréens en majorité. Emmanuel Macron leur a promis de la nourriture, mais en même temps, les forces de l’ordre leur enlèvent les toiles qu’ils ont au-dessus de la tête. Il y a quelque chose de malsain. Alors forcément, les moindres brouilles s’exacerbent.
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Et les passeurs en profitent ?
Lorsqu’il y a des bagarres de ce genre, il y a toujours des problèmes de territoire, donc des problèmes de passeurs. Ils se battent pour des clients qui sont de plus en plus désespérés.
Les passeurs sont-ils les seuls à détenir des armes à feu ?
La plupart du temps, les usages d’armes à feu se passent la nuit entre passeurs. Mais il y a aussi des migrants qui en possèdent (ndlr : l’association « L’Auberge des migrants » estime, elle, que les passeurs sont les seuls à en avoir). De manière générale, il y a toujours eu des armes. On l’a toujours su et la police en saisit souvent. Si ce ne sont pas des armes à feu, ce sont des couteaux. Ils ont fait des milliers de kilomètres dans des conditions très dangereuses, alors forcément ils sont armés, avec des couteaux la plupart du temps. Parfois, on dirait des couteaux de boucher.
Vient-on d’atteindre « un degré de violence jamais connu » comme l’a affirmé Gérard Collomb jeudi soir ?
C’est difficile à dire. C’est peut-être le pire depuis l’ouverture du centre d’accueil de jour Jules-Ferry en 2015 (ndlr : fermé au moment du démantèlement de la « jungle » en octobre 2016 ). Des grosses bagarres rangées, on en a déjà eu, entre Soudanais et Afghans notamment dans le camp. Mais on a tendance à oublier. Il suffit de trois mois où c’est un peu plus calme pour dire qu’on n’a jamais vu ça.
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Très critique envers les associations, la maire de Calais (LR) Natacha Bouchart cible notamment ceux qu’on appelle les « No Border ».
Des problèmes avec les « No Border », on en a eu beaucoup à une période où ils logeaient à l’intérieur de la Jungle. Mais depuis le démantèlement, ils sont presque inexistants. D’ailleurs, soyons clairs, « No Border », ce n’est pas une organisation. Ils n’ont aucune ligne directrice politique. Chez eux, il y a des gens extraordinaires qui mettent les migrants à l’abri, qui s’occupent des papiers de demande d’asile, des dépôts de plainte en cas d’agressions. Et de l’autre côté, il y a ceux qui les poussent à lancer des pierres contre la police et leur disent qu’elle est leur ennemie. Bref, en disant cela, Madame Bouchard trouve une nouvelle occasion de tirer sur les associations sans distinction.
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Elle me fait rire la Maire de Calais @NatachaBouchart avec ses déclarations aujourd’hui sur les migrants, elle qui disait en 2015 que les migrants étaient “une richesse culturelle exceptionnelle.” pic.twitter.com/CW45ho4YmW
— Pont d'Arcole ن (@PtdArcole2) 2 février 2018
Migrants blessés par balle à Calais : "On a vu des scènes de guerre", lance l'Auberge des migrants pic.twitter.com/rJ1aszVolQ
— BFMTV (@BFMTV) 1 février 2018