Tout le monde connaît l’ex-dealer des stars, passé partouze (contraction de partout et par tous) en télé il y a un an, égrenant ses révélations sur le monde imparfait du show-biz, et ça inclut la politique : Machin sniffe, Bidule baise, Trucmuche triche. Après sa tournée triomphale chez les animateurs des médias mainstream (qui tapent eux aussi de la C), et après avoir écoulé 30 000 exemplaires de son bouquin, Gégé-la-schnouff revient avec un deuxième opus, menace d’en sortir un troisième, puis de tout révéler dans une vidéo payante sur YouTube. Révéler quoi ? En gros qui baise qui et qui sniffe quoi, plus quelques menus meurtres politiques.
Invité chez Éric Morillot le dimanche 2 février 2020, un Morillot flanqué (on a d’abord écrit flanché et on a corrigé, mais on n’aurait peut-être pas dû) de Chloé Belloy, avocate de son état, et Hadrien Desuin, officier de gendarmerie et auteur à Causeur, Gégé a fait son boulot de promo. Mais vous allez voir qu’il ne suffit pas d’avoir un invité bourré d’infos, encore faut-il savoir les lui arracher.
De prime abord, Gégé nous explique les raisons de son acharnement anti-chnouffés.
Fauré : « Avant de mourir, je veux… D’abord, tous ceux qui ont jusque-là vécu dans l’impunité après avoir fait de grosses saloperies, ceux-là, on va savoir qui ils sont… Je balance pas, j’informe. Y a une différence entre balancer et informer… Le mot balancer il est trop fort, moi ça me va pas ça, je suis pas une balance, du tout, j’informe. Je veux que les gens sachent. »
Morillot : « Vous êtes un peu journaliste… »
Fauré : « Les journalistes vous avez pas, excusez-moi, dans le pantalon, vous tremblez, là. »
Après ce taquet au Morillot, qui ne montre aucun signe de révolte contre l’insulte à sa virilité, Gégé répond aux questions des deux chroniqueurs. La blonde (Chloé) insiste sur les méfaits de la cocaïne… Ah non, pitié, cette propension des médiateurs mainstream à ne poser que les mauvaises questions ou les questions inintéressantes, alors que toutes les pistes sont là… Cela donne un échange moraline/contre-moraline confondant alors que les révélations politiques leur tendaient les bras.
Le journalisme mainstream français en question(s)
Les secondants de Morillot ne sont pas au niveau de leur invité et des infos qu’il détient, aucune relance n’est possible, quel gâchis ! Il faut attendre la douzième minute pour parler de la coke « à la sarbacane », probable responsable des cancers de Delarue, Giraudeau et Tapie. Mais Chloé remet ça...
Blonde : « Et ça, en tant que dealer, ça vous posait pas des questions, quand vous voyez les gens autour de vous, quand vous parlez de gens qui se sont suicidés, je parle pas de morale, je parle vous en tant que vendeur à l’époque de ces produits stupéfiants, est-ce que ça vous a interrogé ? »
- Blonde pose une question
« Je parle pas de morale » mais je pose une question morale, c’est de la psychologie (et encore, si peu), pas de l’information. Il y a aussi stérile que Blonde, c’est Brun, qui intervient pour dire n’importe quoi. On voit que le gendarme a plus l’habitude d’écouter que d’intervenir... Sud Radio, on leur aurait refilé (JF) Kennedy sur un plateau, après sa mort, ils lui auraient posé des questions sur son mal de dos, sur les robes de Jackie, sur la maison de vacances de Rhode Island, sur Charlie, le terrier gallois de John !
À la 18e, on aborde le chapitre Pasqua, mais les intervenants en plateau vont louper quelque chose...
Fauré : « Zampa, avant de tuer quelqu’un, il réfléchissait, mais Pasqua il s’en foutait, lui il avait dans sa tête le droit de vie et de mort sur tout le monde, il vous envoyait le SAC et puis c’était terminé, ni vu ni connu, il y en a un paquet qui sont morts comme ça à cause de Pasqua ! »
Personne ne relance sur le SAC (Service d’action civique) et ses éliminations ciblées. Pourtant, ça touche à la République et à ses petits secrets ! Comme tout service parallèle, Pasqua finançait ses ou des opérations noires avec l’argent de la came et des bracos (voir Les Lyonnais, le film de Marchal, qui évoque les liaisons entre voyous et membres de la police politique de l’époque).
Hélas, Morillot ne relance pas sur le SAC, et ses deux clampins encore moins. Fauré continue sur la came et la politique, et il accuse directement les gouvernements :
« C’est eux qui font rentrer, je pense, la cocaïne, le shit c’est sûr, pour pacifier les banlieues, c’est eux qui font la distribution dans les banlieues, en même temps ils rentrent du fric, ils vendent aux grands caïds, et ils obtiennent la paix sociale !
Et au lieu de faire le parallèle avec SOS racisme, le PS et la came, Morillot retombe dans les questions à la Jérôme Pierrat, le journaliste fasciné par les voyous :
Morillot : « Y a encore des grands caïds dans les banlieues ? »
Pourtant, le deal entre le PS et les banlieues est aujourd’hui assez clair : il y avait les trafics dans les quartiers, les assoces tenues par les grands frères, les subventions qui arrosaient la vie culturelle locale et qui permettaient de vivre sans travailler, un deal autorisé avec en contrepartie un réservoir de voix pour le parti des Potes. C’est pour ça, en partie, que les banlieues ont coûté aussi cher à la France, avec le résultat que l’on voit aujourd’hui.
Morillot : « La justice, selon vous, elle est complètement à deux vitesses ? »
Fauré : « Pff, même trois, même sept vitesses, y a plus rien, la justice française ne m’en parlez pas… Les avocats, en général, c’est des crapules, je le dis dans mon livre. Dupond-Moretti il s’en prend plein la gueule. Je l’appelle le Baloo, l’ours Baloo, c’est une pourriture ce mec !... Me Moretti c’est un nul, c’est l’avocat des causes perdues, comme Vergès… Ah ouais ça coûte 15 000, minimum. »
On est désolés pour Morillot, mais poser des questions pareilles...
Morillot : « C’est incroyable ce que vous dites, y a de la drogue qui circule en prison ? »
Fauré explique qu’il a beaucoup plus confiance dans les racailles de banlieue, « des hommes de parole », que dans les ministres. Brun pose alors la question que tout le monde ne se pose pas :
« Vous regrettez ce que vous avez fait ? »
- Brun pose une question
À la 27e, enfin, Morillot annonce que le livre de Gégé « regorge de noms » et on aborde les « élites pédophiles ». Gégé parle alors du fournisseur du tout-Paris, qui vendait des enfants et de la cocaïne, un certain Bernard L., nommé « la pire des saloperies qui existe sur la Terre ». Un homme protégé par le commissaire de police du VIIIe arrondissement (dans les années 80). Puis vient la question de Chloé, essentielle...
« Quand on vous lit, le grand danger, c’est pas la drogue, c’est les femmes. »
C’est à 33’30 qu’on évoque les relation d’Alain Delon, protégé par le Milieu, avec Zampa commanditaire de l’assassinat du garde du corps de l’acteur. Gégé aura un joli mot :
« Ils se sont mis à deux, Dieu et le diable pour faire Alain Delon, Dieu lui a donné sa grande beauté, et le diable lui a donné sa noirceur d’âme. »
Puis Gégé, fils d’une empoisonneuse berbère, annonce avoir « fourni la drogue spéciale » qui a tué Mike Brant à la mafia juive qui se faisait passer pour le Mossad, idem pour Joe Dassin. L’interview se termine dans le néant avec une autre question essentielle...
Blonde : « Est-ce que vous avez pensé justement à aller voir des jeunes dans les écoles ou autres pour expliquer ce qu’est les dangers de la drogue, tout ça ? »
Gégé : « Non non c’est pas mon truc ça, ça sert à rien. »
Blonde : « Pourquoi ça sert à rien ? »
Gégé : « Parce qu’un voyou ça reste un voyou, je suis désolé, vous allez pas demander à un homard de devenir une langouste »
Pour info, on a envoyé une demande d’interview à l’attachée de presse de Gégé, qui n’a jamais répondu. Pourtant on a de bonnes questions, garanties 100 % sans moraline.