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OGM : vers la levée du moratoire français sur le maïs Monsanto

Vendredi 5 juillet, le rapporteur publique du Conseil d’État, Mme Cortot-Boucher, a rendu publiques ses conclusions dans l’affaire opposant le gouvernement français à deux exploitations agricoles (les EARL de Commenian et de Candelon), Monsanto SAS, ainsi que l’Union française des semenciers et l’Association des producteurs de maïs. Elle a considéré que l’interdiction de culture du maïs MON810 était non-juridiquement fondée. Cette culture pourrait être à nouveau autorisée d’ici une quinzaine de jours, si le Conseil d’État suit ces conclusions, ce qu’il fait dans la majorité des cas.

Pour soutenir le moratoire, neuf structures issues de la société civile s’étaient jointes au ministère de l’Agriculture : Amis de la terre, Confédération paysanne, Fédération française des apiculteurs professionnels, Fédération nationale d’agriculture biologique, France Nature Environnement, Greenpeace, Nature & Progrès, Réseau Semences paysannes, Union nationale d’apiculture française.

Le rapporteur publique reconnaît tout d’abord le bienfondé de l’ensemble des interventions présentées : chaque structure, que ce soit en défense du moratoire ou au contraire pour demander son annulation, a été reconnue comme ayant un intérêt à agir dans cette affaire. Mais il conclut surtout à l’annulation de l’arrêté interdisant la mise en culture.

Mme Cortot-Boucher a rappelé que selon le droit européen, il existe deux hypothèses dans lesquelles un État peut prendre une mesure d’urgence. Tout d’abord, lorsqu’un OGM autorisé présente des risques graves pour la santé humaine et animale, ou l’environnement, sur la base de preuves scientifiques nouvelles, ou lorsque l’Autorité compétente (c’est-à-dire l’AESA) a rendu un avis qui rend nécessaire de modifier l’autorisation d’un OGM. Or, selon le rapporteur, le ministre de l’Agriculture qui a basé sa décision sur ces deux points, n’arrive cependant pas à justifier sa décision et n’apporte pas la preuve de l’existence d’un risque grave et d’une urgence à agir. Il écarte également l’ensemble des arguments des structures de la société civile qui invoquaient notamment la nécessité du moratoire pour la protection de l’apiculture et des filières agricoles biologiques et conventionnelles.

Il propose enfin au Conseil d’État de décider l’indemnisation des frais judiciaires de l’ensemble des entreprises attaquant le moratoire.

Rappel des faits

Le gouvernement français a considéré que la culture du maïs génétiquement modifié MON810, mis au point par Monsanto et produisant un insecticide contre la pyrale, présentait plus de risques ou d’inconvénients que d’avantages et a donc souhaité interdire sa culture sur le territoire français. Il a pris un arrêté d’interdiction, qu’il a précédemment notifié à la Commission européenne. Cette fois-ci, le gouvernement a pris soin de bien respecter la procédure européenne pour déposer une « mesure d’urgence », le nom juridique d’un moratoire selon le règlement 1829/2003. En effet, un premier moratoire avait été décidé par la France, en 2008, mais ce dernier avait été annulé par le Conseil d’État, suite à une décision de la cour de justice de l’Union européenne. Autre grief à l’encontre de la France : elle n’avait pas informé la Commission européenne en temps voulu de sa décision de prendre un moratoire. Le Conseil d’État avait alors annulé les arrêtés ministériels interdisant la culture du MON810 sur le territoire hexagonal, pour des motifs procéduraux mais aussi de fond, estimant que le gouvernement n’avait pas réussi à prouver « outre l’urgence, l’existence d’une situation susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l’environnement ».

Le maïs MON810 avait été autorisé à la culture, par l’Union européenne, dès 1998, alors que le cadre législatif était encore balbutiant, voire lacunaire. Depuis, la réglementation a évolué et les connaissances scientifiques et la perception socio-économique de cette PGM aussi. Avec l’arrivée de la directive 2001/18, les autorisations européennes ont été limitées à dix ans... et le MON810 a donc lui aussi dû se plier à cette exigence. Ainsi, en 2008, une demande de renouvellement de l’autorisation a été déposée par Monsanto. Aucune réponse n’a encore été donnée officiellement à cette demande de renouvellement, mais par un tour de passe-passe dont la Commission européenne a le secret, l’autorisation de 1998 est toujours valable, dans l’attente d’une décision sur la demande de renouvellement.

Suite à l’annulation du moratoire, la France a adressé à la Commission européenne, le 20 février 2012, une lettre lui demandant explicitement de prendre une mesure de suspension de la culture du maïs MON810, et un mois après, le 16 mars 2012, le ministre de l’Agriculture interdisait, par arrêté, la culture de ce maïs. Lequel a donc été immédiatement attaqué par plusieurs entreprises [1].

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