Trois bombes ont explosé vendredi dans l’enceinte de la mosquée d’un des dignitaires musulmans les plus importants du Nigeria, l’émir de Kano, au moment de la prière hebdomadaire faisant au moins 64 morts et 126 blessés, selon des secouristes.
« Deux bombes ont explosé l’une après l’autre dans l’enceinte de la grande mosquée, quelques secondes après le début des prières », puis une troisième bombe a explosé non loin de là, a quant à lui déclaré Aminu Abdullahi, un des fidèles sur place.
L’émir Sanusi Lamido Sanusi se trouvait apparemment à l’intérieur de la mosquée au moment du triple attentat, survenu dans la cour extérieure du bâtiment. Selon M. Abdullahi et Hajara Tukur, qui habite non loin de la mosquée, la police s’est mise à tirer durant le chaos qui a suivi les explosions, au moment où les fidèles tentaient de fuir pour se mettre à l’abri.
C’est à la grande mosquée de Kano, la plus grande ville du Nord du Nigeria, que l’émir avait appelé la semaine dernière la population du nord du pays à prendre les armes contre les islamistes de Boko Haram, mettant en doute la capacité de l’armée à défendre les civils face aux insurgés.
L’émir de Kano est une personnalité très influente au Nigeria, qui compte plus de 80 millions de musulmans (dont la majorité vit dans le Nord), sur quelque 170 millions d’habitants dans le pays.
Officiellement, il s’agit du deuxième responsable musulman le plus important du pays, après l’émir de Sokoto, considéré comme le chef des musulmans nigérians.
M. Sanusi a été nommé émir cette année, après avoir été démis de ses fonctions à la tête de la Banque centrale nigériane par le président Goodluck Jonathan.
Une cinquantaine de morts et 3 000 déplacés
L’attaque lundi par Boko Haram de la ville de Damasak, une ville du nord-est du Nigeria frontalière du Niger, a fait une cinquantaine de morts et a provoqué la fuite de 3 000 habitants au Niger, a déclaré vendredi le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés.
L’attaque « a tué jusqu’à cinquante personnes et en a forcé au moins 3 000 à fuir pour sauver leur vie dans la région de Diffa, au Niger voisin », a indiqué à la presse Adrian Edwards, porte-parole du HCR.
« Notre équipe à Diffa indique que des gens continuent à arriver du Nigeria. La plupart attendent des bateaux pour traverser la rivière Komadougou Yobé qui sépare les deux pays, mais certains essaient de passer à la nage et les habitants locaux ont fait état de noyades », a-t-il ajouté.
Boko Haram a pourchassé et tué des habitants jusque sur les rives de la rivière, ont raconté les habitants cités. Ils ont dit que « beaucoup de civils ont été tués dans l’attaque de Damasak, en particulier des jeunes, mais les insurgés ont aussi tiré sur les femmes et les enfants », a précisé le porte-parole.
Selon certaines informations, l’attaque aurait été menée en représailles au fait que les jeunes de la ville rejoignaient les groupes d’autodéfense pour combattre les insurgés nigérians, a indiqué M. Edwards. L’attaque a été soudaine et les gens ont fui en abandonnant tout.
« De nombreux enfants ont été séparés de leurs parents durant l’attaque et la fuite vers le Niger », selon le HCR, certains essayant de retrouver de la famille dans la ville la plus proche, Chétimari.
Un raid similaire des djihadistes le weekend dernier a fait 48 morts dans la ville nigériane voisine de Doron Baga.
Plus de 100 000 Nigérians ont fui au Niger depuis mai 2013 suite à ces attaques selon le HCR qui estime que 30 000 sont partis au cours des deux derniers mois.
Quelque 39 000 autres ont également fui au Cameroun et 2 800 au Tchad, les structures économiques déjà fragiles de la région risquant maintenant de ne plus pouvoir fonctionner, selon le HCR.
Le groupe islamiste s’est emparé depuis le printemps 2014 d’une vingtaine de villes dans les trois États de Borno, d’Adamawa et de Yobe, et affirme avoir instauré un « califat islamique » dans les zones sous son contrôle.
Plus de 13 000 personnes ont été tuées depuis le début de l’insurrection de Boko Haram en 2009, et près de 1,5 million d’habitants ont été déplacés par les violences.