Arnaud Montebourg s’est démarqué lors des primaires socialistes en se faisant le défenseur de la démondialisation. Mais l’épreuve du pouvoir, avec le plan social de PSA, est un exercice cruel comme l’a montré son passage sur France 2 jeudi soir, d’où n’est pas ressorti grand chose.
Un diagnostic juste
En reprenant le terme de démondialisation, inventé par Jacques Sapir, le député de Saône et Loire avait touché le gros lot lors des primaires, terminant devant Ségolène Royal, avec 17% des suffrages, ce qui lui a valu un beau ministère. Mais il était bien évidemment illusoire d’espérer appliquer ces idées sous la présidence du jospino-deloriste qu’est François Hollande. Le nouveau président sait faire des synthèses improbables mais pas sortir du cadre européen.
Résultat, Arnaud Montebourg est dans une équipe qui ne compte pas remettre en cause la mondialisation et qui cherche seulement à s’y adapter. Et c’est dommage car toutes les analyses qu’il avait reprises à Jacques Sapir (proches des idées de Jean-Luc Gréau) étaient justes. Les ravages de l’euro cher, de l’ouverture anarchique du marché européen aux importations et des politiques d’austérité sauvages expliquent toutes trois la crise que traverse le secteur automobile.
En effet, le cas du plan social de PSA n’est pas celui d’un licenciement boursier pour augmenter les dividendes d’actionnaires cupides, mais le plan d’ajustement d’une entreprise qui a perdu tout de même 700 millions d’euros au premier semestre. Pire, PSA était resté beaucoup plus patriote que Renault en conservant 44% de sa production en France, contre 23% pour l’ancienne régie. En fait, le constructeur automobile est emporté par le marasme du marché européen.
« Un ministre, ça ferme sa g… ou ça démissionne »
Arnaud Montebourg ne pourra pas être mieux que l’infirmier de notre industrie. Jeudi soir, il a eu des mots sévères, mais la seule annonce concrète était de demander un rapport à un expert pour le 25 juillet ! Que peut-il faire dans ce cadre européen qui sanctifie le libre-échange, même avec des pays qui se protègent comme le Japon, la Corée du Sud ou la Chine ? La compétition est déloyale et seule une véritable politique protectionniste pourra changer les choses.
Que peut-il faire sans remettre en cause la liberté totale de circulation des mouvements de capitaux, qui permet aux entreprises de produire là où elles en ont le plus intérêt ? Bref, Arnaud Montebourg veut redresser notre industrie avec un pistolet à eau, pour reprendre l’image de Paul Krugman. Il n’a aucun moyen et n’en aura aucun dans une équipe gouvernementale qui n’a pas pensé un moment rompre avec les dogmes de la libéralisation et refuse toute frontière…
Arnaud Montebourg a deux possibilités. La première consiste à devenir un nouveau Chevènement en démissionant. Mais aura-t-il l’envie de sacrifier le confort des ministères pour défendre ces idées ? S’il choisit de rester dans le gouvernement, il deviendra l’homme des belles paroles, qui aura oublié la démondialisation et le protectionnisme (non évoqué hier soir) pour un plat de lentilles. Nous allons rapidement voir de quel bois est fait le ministre du redressement national.
Il était bien évident qu’un héritier de Jacques Delors et Lionel Jospin comme François Hollande n’allait pas remettre en cause le cadre actuel de cette mondialisation qui détruit nos emplois. Etant donnée sa prestation d’hier soir, il semble qu’Arnaud Montebourg préfère défendre sa place plutôt que ses idées.