« J’ai perdu ma ville pendant la guerre. C’est pourquoi je voulais construire mon propre village. Il porte un nom allemand : Küstendorf. J’organiserai des séminaires pour des personnes souhaitant faire du cinéma, des concerts, de la céramique, de la peinture. C’est un lieu où je vivrai et où certains seront capables de venir de temps en temps. Il y aura bien sûr d’autres habitants qui travailleront là. Je rêve d’un lieu ouvert avec une diversité culturelle qui luttera contre la globalisation. »
Cette profession de foi est d’Emir Kusturica. La première vidéo date de 2013 mais le lieu n’a pas énormément changé : le réalisateur doublement palmé a financé cet ethnovillage, tout de bois bâti, dans un univers serbe typique. Küstendorf (nom allemand du village de Mecavnik, ou Drvengrad) ne se résume pas aux 7 jours du festival, même si Kusta en profite pour faire la promotion de son idéal : un lieu empreint de respect de la nature, des hommes et des idées.
La version 2017 :
En réalisant ce rêve en dur, Kusta a relancé l’emploi dans la région, car la Serbie est durement touchée depuis la fin de l’URSS, l’agression de l’OTAN et l’éclatement de la fédération yougoslave. Avec la venue des touristes l’économie locale est repartie, employant jusqu’à 60 personnes selon les saisons. Et Kusta ose tout : restaurant, hôtel, église, tout ça en en bois, station de ski, sans oublier la petite gare de Golubici (offerte à la SNCF serbe) et le parc naturel où foisonnent les animaux.
Dans la forêt de Tara vivent ours, renards, sangliers et lièvres. Afin de faire vivre son village, Kusta l’utilise pour les tournages, comme celui de La Vie est un miracle en 2004, date à laquelle le village a été ouvert au public.
Chaque jour, en pleine saison, 500 personnes montent en bus visiter le village et prient pour que la star locale débarque en hélico, mais le réalisateur, véritable globe-trotter, est très occupé. Les touristes se consolent avec « le kaïmac – beurre de petit-lait –, l’échine fumée, le fromage, le pain maison et le raki, cet alcool de prunes » (source : Le Monde 2 du 14 mai 2005), tout cela au petit déjeuner.
Un régime qui change du hamburger mou des centres identiques des grandes villes occidentales... D’ailleurs, on ne boit pas de coca-cola à Mokra Gora, encore un autre nom de la localité (enfin, de ses montagnes), mais de la boza, un breuvage fermenté frais d’origine ottomane.
On rappelle que Kusta ne nous a pas donné le moindre fifrelin pour cet article qui n’est pas un publi-rédactionnel. Il s’agissait juste de montrer qu’il y avait des destinations de vacances un peu différentes de ce qu’on voit à la télé.