L’alliance de circonstance passée entre le MNLA et Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi), lors de l’assaut donné aux bases militaires du Nord, n’a pas tardé à tourner au vinaigre. Les rebelles du MNLA ont été chassés par Aqmi de Tombouctou dès le début du mois d’avril, peu après la chute de la ville.
Il en va de même entre Ansar Dine et le MNLA, qui ont proclamé une république islamiste touarègue le 26 mai, avant de se raviser. Une alliance contre-nature selon le chroniqueur malien Adam Thiam, qui l’explique en ces termes : « Le MNLA donne une limite à son territoire. Ansardine veut tout le Mali aujourd’hui et peut-être tout le Sahel demain. Le MNLA construit sa légitimité sur le mythe d’un pays bleu ostracisé sommé de choisir entre l’errance et la rébellion. Ansardine, lui, prêche sur le terrain d’une justice judéo-chrétienne source de corruption et d’injustice. Le MNLA porte en filigrane l’ambition d’une nation touareg. Ansardine bâtit sa citoyenneté sur l’épaisseur de la burqa. »
Des combats ont été signalés dans la nuit du 7 juin à 20 km environ de Kidal, entre MNLA et islamistes d’Ansar Dine. Ce groupe, mené par l’ancien chef rebelle des années 1990 Iyad ag Ghali, serait infiltré par Aqmi, selon les autorités françaises. Ansar Dine serait un prête-nom d’Aqmi pour se faire accepter par les populations locales… De son côté, le MNLA se prépare à un longue guerre contre les islamistes.
En attendant, ce sont les barbus qui imposent leur loi dans le Nord, coupant la main des voleurs, parmi lesquels des rebelles touaregs, ou l’oreille des femmes en jupes courtes, fouettant de jeunes fumeurs et confisquant les cartouches de cigarettes dans les boutiques… Alors qu’à Gao, la jeunesse noire appartenant aux ethnies songhaï et peule commence à protester, les groupes armés se multiplient. L’un des enjeux, à long terme, pourrait être de voir la population majoritaire du Nord-Mali, songhaï et peule, se mobiliser pour chasser les rebelles comme les islamistes…
En attendant, à Tombouctou, des habitants ont formé le 7 juin une milice pour chasser les islamistes. Son nom ? Le Mouvement patriotique de résistance pour la libération de Tombouctou (MPRLT), qui recrute parmi les ethnies songhaï et touarègue, et dont les responsables sont des fonctionnaires et des militaires opposés à l’indépendance de l’Azawad.
Rien ne garantit qu’il ait plus de chances qu’un premier groupe armé formé début avril à Tombouctou, le Front national de libération de l’Azawad (FNLA), qui se déclarait « arabe » et recrutait parmi l’ethnie minoritaire des berrabiches. Ces hommes ont été vite chassés de la ville par Aqmi, Ansar Dine et un troisième larron islamiste, le Mouvement pour l’unicité et jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Le Mujao se présente comme une dissidence d’Aqmi, mais certains soupçonnent Aqmi de vouloir brouiller les cartes avec plusieurs appellations.
Un autre mouvement s’est formé en mai, selon le quotidien algérien El Watan, sous l’appellation de Mouvement républicain pour la restauration de l’Azawad (MRRA). Ce groupe armé serait mené par El Hadj Gamou, un ancien colonel touareg de l’armée malienne ayant fait défection avec ses hommes, pour rejoindre dans un premier temps la rébellion du MNLA.
L’objectif du MRRA serait de lutter contre les islamistes et assurer l’autonomie politique de l’Azawad… Une rébellion contre la rébellion touarègue, en quelque sorte, qui serait là aussi un simple jeu d’illusions : selon le site Toumast Press, un organe touareg, ce mouvement est surtout sorti de l’imagination d’un jeune Touareg installé à Paris. Mais il est vrai qu’en temps de guerre, l’information est une arme, à manipuler avec précautions.