Récent adhérent au Front National, et professeur d’histoire-géographie dans les Ardennes, j’ai écouté avec énormément d’intérêt le débat récent qui vous a opposée à Marine Le Pen sur Radio-Orient.
Je dois dire que j’ai été particulièrement impressionné par certains de vos arguments, notamment lorsque vous avez évoqué la responsabilité de l’Etat français « néocolonisateur » dans le développement du phénomène communautariste, ou encore lorsque vous avez souligné le caractère abject de la « Françafrique » et la contradiction qui consisterait à vouloir contrôler les flux migratoires sans mettre un terme à cette dernière.
Militant du Front National, je sais bien que mes propos risquent d’être interprétés comme un piège destiné à dissimuler des intentions inavouables. Vous allez probablement m’opposer le racisme plus ou moins latent qui caractériserait la société française et que je serais supposé devoir assumer.
Pourtant, je vous l’assure, c’est précisément le basculement de notre société dans la violence que je voudrais combattre. De votre côté, en mettant en exergue le supposé racisme de la société française, sans vous interroger sur ses causes, vous participez à ce basculement.
Je pense en effet que les manifestations violentes irrationnelles qui font la une de l’actualité sont instrumentalisées dans le but de dissimuler la violence « systémique » qui est au fondement de toute l’architecture économique et sociale du système libéral. Cette violence consiste dans une mise en concurrence mondiale des travailleurs, permettant, par une réduction drastique des coûts de production, la maximisation délirante des profits financiers.
Contrairement à ce qu’affirment, avec un mépris sous-jacent, les professionnels de la compassion, les flux migratoires ne servent pas les intérêts des pays pauvres. Ils engendrent au contraire une précarisation bien commode, aussi bien des populations immigrées arrachées de chez elles par le pillage de leurs pays, que des travailleurs occidentaux qui se voient infliger un chômage de masse et réduits au statut d’assistés. Tant que ce système procurait suffisamment de croissance pour que quelques miettes puissent être redistribuées aux classes populaires sous forme de crédits à la consommation, cela pouvait tenir.
Aujourd’hui, l’essoufflement de la croissance, ainsi que la mise en évidence de ses effets dévastateurs (notamment sur la nature), engendrent un très fort ressentiment. Pour se sauver, les « néocolonisateurs » – que j’identifie aux oligarques mondialistes et non pas aux chômeurs français…– font tout pour que leurs victimes, au lieu d’identifier les causes profondes du problème, s’en attribuent mutuellement la responsabilité. C’est ainsi que des salafistes improvisés prennent le contrôle des cités et transforment leur délinquance de hall d’immeuble en guerre sainte tandis que, pour leur donner la réplique, de soi-disant « Français de souche » se lancent dans une nouvelle croisade par internet. Le système a beau jeu ensuite d’attiser la haine des uns contre les autres.
Sarkozy vante les « racines chrétiennes de la France » alors qu’il est celui qui a capitulé en rase campagne devant le grand patronat. Quant aux socialistes, ils font mine de défendre la « diversité » alors qu’ils ne font qu’alimenter en « chair à canon » les négriers modernes. Comment oser faire croire à des Africains que leur seul horizon d’espérance, pendant que l’on pille leur continent, est de venir travailler comme clandestins dans des MacDo en échange de l’AME et d’hébergements d’urgence qui brûlent pendant l’été !
Il me semble donc que la violence raciste ordinaire, violence de nature pulsionnelle, est la fois la conséquence et le masque de la violence systémique que j’ai tâché de décrire. Lutter contre la première n’est, chez certains, qu’un prétexte pour faire oublier la seconde.
Au fond, le système politique actuel pourrait être comparé à de gigantesques ciseaux dont les branches, naguère considérées comme les termes d’une alternative, sont en train de refermer sur l’humanité leur sanglante lame.
D’abord, la branche droite : c’est la dimension économique du système, celle qui se propose de déchirer les tissus productifs traditionnels en vue de réaliser toujours plus de profits financiers. Elle a besoin de déracinés – les immigrés, les « sans-papiers », les Chinois... – pour produire à bas coût ce que d’autres déracinés – les « précaires », les « assistés » et tous ceux, d’une manière générale, que l’on a privés de leur fierté et de leur outil de travail – vont consommer à crédit.
Ensuite, la branche gauche : c’est la dimension « sociétale » du système, celle qui, depuis mai 68, aide la branche droite à créer le consommateur dont elle a besoin en organisant la destruction planifiée de la famille, de l’éducation et des valeurs. Sous prétexte de défendre les « opprimés » et autres « discriminés », elle se charge de mettre en concurrence les déracinés pour mieux les empêcher d’identifier la cause commune de leurs malheurs et de mettre en commun leur légitime ressentiment (cf. la Halde et autres associations stipendiées).
Il est donc bien commode d’accuser le Front National de « racisme » quand, pour mettre un terme à ce dialogue complice de la « droite » et de la « gauche », il met en avant le concept de nation. La nation, me semble-t-il, n’est pas un concept racial ou ethnique. La nation est une communauté de destin, héritée de l’histoire, et qui n’exclut, a priori, aucun de ceux qui ont contribué à la fabriquer. Elle apparaît aujourd’hui comme la seule réponse possible à la mondialisation, comme la seule garantie de nos libertés, comme la seule assurance de relations sociales apaisées.
Il ne s’agit pas, je le précise, de promouvoir une nation contre d’autres nations, mais d’encourager toutes les nations à mettre leurs énergies en commun pour ébranler l’actuel système d’oppression des peuples.
Naturellement, je ne prétends pas vous convaincre du bien-fondé de ma démarche politique.
Je voulais juste vous apporter ce témoignage afin que vous sachiez qu’il y a, dans tous les camps, des hommes et des femmes qui aspirent à une réconciliation nationale authentique, réconciliation sans laquelle nous allons sombrer dans la guerre civile pour le plus grand profit de nos adversaires communs.
Bien cordialement,
B.Girard
* Houria Bouteldja est Présidente du Parti des Indigènes de la République