Vladimir Poutine a ordonné au ministre de la Défense russe de retirer les troupes de Syrie à partir du mardi 15 mars. RT s’est entretenu avec des députés et chefs des partis français, ex-ministres et experts en géopolitique pour discuter du sujet.
Lundi 14 mars 20h16 CET (heure normale d’Europe centrale) - Roland Dumas
L’ancien ministre français des Affaires étrangères, Roland Dumas, a salué la décision du président russe : « La décision de Poutine va dans le bon sens. Il ne pouvait raisonnablement pas laisser plus longtemps ses troupes en Syrie sans mettre en péril les relations internationales. Au vu notamment du récent accord de cessez-le-feu mis au point avec les États-Unis. »
22h49 - Gérard Bapt, député socialiste :
« Je ne pense pas que la Russie cesse d’intervenir contre Daech et le Front Al-Nosra. Ce n’est pas un hasard que cette annonce intervienne à l’ouverture des négociations à Genève. C’est pour mettre au pied du mur tous les protagonistes du conflit : Bachar el-Assad, la Turquie, les Américains et les Iraniens. Je pense que, de concert avec les Américains, Vladimir Poutine ne veut pas être engagé plus avant dans ce qui ressortirait d’un conflit entre l’Arabie saoudite et l’Iran. Il veut se limiter à la scène syrienne et la stabiliser. »
22h14 - Éric Coquerel, coordinateur politique du Parti de gauche :
« Les objectifs militaires auraient été atteints et la Russie estimerait que le danger représenté par Daech est moindre. C’est nécessaire et positif : il faut passer maintenant par les négociations les accords à Genève. Ce retrait est peut-être aussi fait pour faciliter ces négociations puisque, pour nous, la question syrienne devrait être réglée dans le cadre de l’ONU. Si l’objectif est de faciliter ces accords, on ne peut le prendre que de manière positive.
Manifestement les bombardements ont permis de limiter, si ce n’est d’arrêter, tout le trafic de pétrole auquel se livrait Daesh et qui était une source considérable de revenus financiers. En outre, des coups très durs ont été portés à l’État Islamique. Depuis quelques semaines on sent clairement que la situation de Daech est fragilisée.
Mais on ne pourra pas régler cette situation sans passer par une résolution de l’ONU et sans que toutes les parties concernées soient inclues dans ce processus, que ce soit le pouvoir syrien, l’opposition démocratique, les Kurdes syriens et les autres pays de la région.
Il faut qu’il y ait une coalition sous l’égide de l’ONU qui agisse pour débarasser cette région et le reste du monde de la menace terroriste. »
22h01 - Yves De Kerdrel, rédacteur en chef de Valeurs Actuelles
« Je trouve que c’est une réaction tout à fait rationnelle du président Poutine. Il a stoppé l’offensive de Daech et des rebelles djihadistes, beaucoup de choses ont été réglées sur le plan diplomatique et notamment la mise en place d’un cessez-le-feu.
Le président Poutine a montré qu’à la différence d’autres grandes puissances, notamment les États-Unis lors de la guerre en Irak, il intervenait ponctuellement pour régler un problème et qu’une fois que le problème était réglé, il s’en allait et retirait ses troupes. Cela a été une action parfaitement menée sur le plan militaire.
Le président Poutine a donc agi de manière extrêmement rationnelle et c’est un exemple d’intervention militaire réussie que doivent retenir tous les Occidentaux.
L’avenir de la Syrie dépend de la conférence inter-syrienne qui a commencé aujourd’hui mais il existe un gouvernement syrien, avec Bachar el-Assad comme président légitime réélu il y a deux ans pour un mandat de sept ans. Il va y avoir des élections législatives dans quelques mois, il y a déjà de nombreux candidats déclarés, ce qui montre qu’il y a une vraie démocratie en Syrie, contrairement à ce que racontent un certain nombre de médias occidentaux. »
21h38 - Romain Caillet, chercheur et consultant sur les questions islamistes :
« Je suis le premier surpris et je me demande s’il s’agit d’un véritable retrait ou si c’est juste l’annonce du début d’un retrait et surtout si ce retrait signifie une diminution de l’engagement de l’aviation russe. Pour l’instant cela me paraît surprenant que les Russes mettent fin à leurs opérations avant la reprise de Palmyre. Finalement, Alep n’a pas été totalement reprise par le régime syrien, à Racca, les forces syriennes sont très loin, à Deir ez-Zor, il y a une dynamique laissant penser que le ville pourrait tomber aux mains de l’EI. Il n’y a qu’à Palmyre que les forces syriennes sont difficilement entrées à l’ouest de la ville. S’agissant du Front Al-Nosra, Idleb est toujours entre les mains d’Al-Nosra et de ses alliés. Il n’y a que le littoral alaouite qui a véritablement été sécurisé, [mais] pour le reste, cela me paraît surprenant que la Russie mette fin à ses bombardements car cela signifierait un retour des rebelles, modérés ou radicaux, et un retour de Daech sur le front contre le régime.
Je vois mal les Occidentaux prendre le relais des Russes pour bombarder les djihadistes, même si c’est un scénario possible. Je n’en suis pas convaincu parce que cela voudrait dire que les Américains traiteraient Bachar el-Assad comme un allié, ce qui n’est pas encore le cas. »