L’enquête colossale sur les attentats de Paris en janvier s’oriente aujourd’hui, notamment, sur la piste d’un donneur d’ordre.
Une personne susceptible d’avoir coordonné à distance les attaques des frères Kouachi contre Charlie Hebdo, le 7 janvier, et d’Amedy Coulibaly à l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, le 9 janvier. C’est la découverte de quelques-uns des échanges de ce commanditaire avec ce dernier qui ont trahi son existence.
En l’état, impossible d’identifier son nom ou sa localisation exacte. Les éléments qui attestent de sa présence ne sont que des morceaux de mails et des adresses IP disparates repérées dans l’immensité du web.
Mais dix mois jour pour jour après les attentats, l’étau se resserre progressivement, d’après les éléments que Le Monde a pu consulter, autour d’un individu basé à l’étranger. Un homme qui, à l’évidence, avait une vision d’ensemble des tueries qui ont coûté la vie à 17 personnes et en a piloté en partie les opérations.
Rédigés dans le langage lapidaire des SMS mais toujours précis dans leurs instructions, les messages de ce mystérieux commanditaire s’apparentent à chaque fois à de véritables ordres guerriers. « Ok, fé ske ta a fair aujourdhui ms simple com ça tu rentr dormir ensuit tu plank et verifi adress 1 ts les jrs : indications bientot pr recup amis aider toi. debarasse toi puce, maintenant passe sur adress 1, fini adress 2 », écrit-il ainsi à Amedy Coulibaly le 7 janvier, à 14 heures. Soit seulement deux heures après la tuerie de Charlie Hebdo…
Le renfort de plusieurs compagnons d’armes
Un peu plus tôt, à 12 h 48 exactement, le coordinateur inconnu a consulté un message du futur tueur de l’Hyper Cacher contenant plusieurs fichiers intitulés « inventaires ». Un seul d’entre eux n’était pas chiffré et donne une idée du contenu des autres. « J’ai un AK74 avec 275 cartouches. Six tokarev avec 69 cartouche. Trois gillet par balle militaire trois gillet tactique deux bombe a gel et a gaz deux gros couteaux un choqueur ». Un mail à l’orthographe hasardeuse sans doute rédigé par Amedy Coulibaly lui-même.
En plus d’établir qu’il y avait donc bien une personne, en coulisse, tirant les ficelles du drame, ces échanges laissent entrevoir le fait qu’au-delà des frères Kouachi, Amedy Coulibaly devait, semble-t-il, recevoir le renfort de plusieurs compagnons d’armes pour son épopée macabre. Un scénario dont atteste, en filigrane, un dernier mail du commanditaire présumé, dévoilé par BFM TV, le 13 octobre. Le message date cette fois du 8 janvier à 17 h 21. « 1) pas possible amis, travailler tt seul », écrit notamment l’insaisissable correspondant avant d’ajouter « 2) si possible trouver et travailler avec zigotos bien. 3) si possible expliker ds video ke toi donner zigoto les outils au nom de d, préciser leskels. » Les « zigotos » désigneraient les frères Kouachi, alors en pleine cavale. « D » signifierait « Daech ».