Le gouvernement irakien a confirmé, dans un courrier adressé au début du mois à Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies, que les jihadistes de l’État islamique ont pris le contrôle du site d’Al Muthanna, qui a servi, sous le régime de Saddam Hussein, à fabriquer des armes chimiques. Depuis les années 1990, il était utilisé pour la destruction de cet arsenal.
Toujours selon Bagdad, cette ancienne usine compte deux bunkers où ont été stockés « des restes de l’ancien programme d’armement chimique ». Toutefois, aucune précision n’a été apportée au sujet de la dangerosité des substances en question. En outre, les jihadistes auraient « pillé certains équipements » avant de neutraliser les caméras de surveillance. Que s’est-il passé sur ce site par la suite ? Mystère…
En tout cas, les autorités irakiennes ont prévenu que « l’Irak n’est plus en mesure de respecter ses obligations de destruction de ses armes chimiques en raison de la détérioration de la situation de sécurité » et que les opérations reprendront « dès que la situation de sécurité se sera améliorée et dès que le contrôle du site » sera repris.
Mais ce n’est pas tout. Plus inquiétant encore, les jihadistes de l’EI auraient également saisi du matériel nucléaire utilisé à des fins de recherche à l’université de Mossoul, ville qu’ils ont conquise le 9 juin dernier, après avoir lancé une offensive victorieuse dans le nord de l’Irak. Toujours d’après les autorités irakiennes, qui en ont informé les Nations unies, ce matériel peut servir « à la fabrication d’armes de destruction massive ».
Ce qui reste à démontrer, dans la mesure où le matériau radioactif saisi (40 kg de composants à base d’uranium, a précisé l’ambassadeur irakien à l’ONU) n’est pas de qualité militaire. Du moins, telle est l’estimation de Washington. (D’ailleurs, si cela avait été le cas, une telle information ne serait pas passée inaperçue…).
« Sur la base des premières informations, nous pensons que le matériau concerné est de faible qualité et ne constituerait pas un risque majeur en terme de sécurité et de prolifération nucléaire », a d’ailleurs réagi Gill Tudor, une porte-parole de l’Agence internationale de l’Énergie atomique.
En revanche, si ces matériaux radioactifs ne peuvent pas être utilisés pour concevoir une arme nucléaire, ils sont susceptibles de servir à la fabrication d’une bombe radiologique (ou « bombe sale »), beaucoup plus facile, qui plus est, à mettre au point dans la mesure où il suffit de faire exploser un mélange radioactif pour contaminer un secteur déterminé. L’effet n’est pas spectaculaire (ce que recherchent les terroristes) mais il peut être très meutrier.
Ainsi, à Goiania, au Brésil, en 1987, seulement 20 grammes de césium trouvés dans un appareil de radiologie volé avaient suffi pour contaminer 112 000 personnes en l’espace de quelques heures (7 en mourront). En 2002, à Chicago, José Padilla (alias Abdullah al-Mujahir) fut arrêté alors qu’il comptait faire exploser une bombe radiologique pour le compte d’al-Qaïda. Mais les jihadistes ne sont pas les seuls à avoir eu cette idée : 6 ans plus tard, les autorités colombiennes accusèrent la guérilla marxiste des FARC d’avoir nourri le même dessein après avoir négocié l’achat de matériaux radioactifs.