L’État hébreu doit admettre le droit international et reconnaître que les territoires conquis par la force doivent être rendus. Cela reste un préalable aux discussions pour trouver une solution au conflit.
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La question, centrale, de la colonisation éclaire cette problématique. Comment ne pas tirer les leçons de l’« oubli » des négociateurs de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui n’exigèrent pas l’inclusion dans la « déclaration de principes sur les arrangements intérimaires d’"autogouvernement" », de septembre 1993, d’une clause interdisant tout développement des implantations israéliennes dans les Territoires occupés ? Depuis, en vingt-trois ans, le nombre de colons juifs est passé de 120 000 à 450 000 en Cisjordanie et de 160 000 à 200 000 à Jérusalem-Est.
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Or, le droit international considère la colonisation comme illégale. Avec sa résolution 242, le Conseil de sécurité de l’ONU a défini, le 22 novembre 1967, plusieurs principes pour un règlement pacifique du conflit, à commencer par le retrait israélien des territoires arabes occupés pendant la guerre des Six Jours. Et, dans ce texte fondamental, l’affirmation du caractère inadmissible de l’acquisition de territoires par la force l’emporte sur l’ambiguïté, bien connue, entre les versions française et anglaise sur le retrait « des » ou « de » territoires occupés…
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Nombreuses sont les résolutions du Conseil de sécurité statuant dans le même sens, notamment la résolution 446 du 22 mars 1979 concernant la Cisjordanie et la résolution 1860 du 8 janvier 2009 concernant la bande de Gaza, toujours considérée comme territoire occupé malgré le retrait israélien de 2005. Concernant Jérusalem, il faut rappeler que le plan de partage de l’ONU du 29 novembre 1947 faisait de la ville et de ses environs un « corpus separatum sous régime international spécial ». C’est donc logiquement que le Conseil de sécurité a condamné les décisions unilatérales successives de la Knesset : en 1953 celle faisant de Jérusalem la capitale du jeune État ; en juillet 1967, le vote déclarant la ville « réunifiée capitale éternelle d’Israël » ; en 1980, la loi fondamentale proclamant « Jérusalem entière et réunifiée […] capitale de l’État d’Israël » [1]. La meilleure preuve de l’unanimité de la communauté internationale sur cette question : Jérusalem n’accueille plus aucune ambassade, elles se trouvent toutes à Tel-Aviv…
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Dès lors que la Cisjordanie, Jérusalem-Est et la bande de Gaza constituent des territoires occupés, la IVe Convention de Genève et notamment son article 49 s’appliquent : ils interdisent notamment toute implantation par la puissance occupante de ses ressortissants. Quant au statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), il qualifie même cette démarche de « crime de guerre » dans son article 8-2-a - applicable puisque l’État de Palestine est membre de la CPI depuis le 1er avril 2015 et peut déposer plainte pour des faits remontant jusqu’au 13 juin 2014. Dans ces conditions, toute installation de colons est un crime de guerre relevant non seulement de la compétence de la CPI, mais encore de celle de tribunaux nationaux, la compétence de la CPI n’étant que subsidiaire.
Un dernier point souligne le caractère central de la question de la colonisation : c’est l’évolution de la composition du gouvernement israélien. On a noté, à juste titre, que celui-ci avait connu une nette radicalisation. Les coalitions entre la droite et le centre ont cédé la place à des équipes unissant la droite et l’extrême droite. Mais ce déplacement du centre de gravité de l’exécutif, particulièrement sensible depuis les élections législatives du 17 mars 2015 et plus encore récemment avec la nomination d’Avigdor Lieberman comme ministre de la Défense, signifie aussi que les colons sont plus que jamais au pouvoir en Israël. L’actuel gouvernement est leur gouvernement. Si elle veut agir efficacement, la communauté internationale doit en tenir le plus grand compte.