Douze mesures, 750 millions d’euros sur la table… et beaucoup de questions. Ce lundi [9 septembre 2019], à 15h, Agnès Buzyn recevait les représentants des personnels et dirigeants hospitaliers, les syndicats et le collectif Inter-Urgences. Après deux séries d’annonces, mi-juin puis début septembre, qui n’ont pas mis fin au mouvement social des paramédicaux des urgences, la ministre leur a dévoilé son « plan d’actions » pour la « refondation des urgences ». Un plan inspiré des propositions du député (LREM) de Charente, Thomas Mesnier, et du chef du Samu de Paris, Pierre Carli.
Alors que cette nouvelle réunion semblait être celle de la dernière chance, le mouvement de grève, qui dure depuis six mois et touche la moitié des services d’urgences publics, ne semble pas près de s’arrêter. Car après un tour de table plus long que prévu, syndicalistes comme représentants des médecins libéraux et du collectif Inter-Urgences ont détaillé leurs critiques et déceptions.
Un financement insuffisant
Le ministre a donc promis une enveloppe de 750 millions d’euros sur trois ans. Insuffisant, répondent les représentants du syndicat CGT. « La ministre n’est plus dans le déni, mais dans le mépris », tranche Christophe Prudhomme, représentant à la fois de l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf) et de la CGT.
« Cette somme, c’est une goutte d’eau dans l’océan, renchérit Patrick Bourdillon, secrétaire fédéral de la CGT Santé. Les urgences, c’est le haut de l’iceberg, mais tout l’hôpital est très malade… »
Surtout, nombre de délégués présents lors de cette rencontre au sommet s’interrogent sur la provenance de cette enveloppe. « Le principal manque, c’est de savoir d’où vont venir ces financements. Car si c’est pour déshabiller un autre service, cela revient à transférer le problème », s’inquiète Patrick Bourdillon. « Ce sont des non-annonces », tempête Mireille Stivala, secrétaire générale de CGT. Qui rappelle que le syndicat demande que l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) (proche des 200 milliards d’euros, selon le PLFSS 2018) soit augmenté de 5 %, et non de 2,3 %.
Rien sur les effectifs
« Il n’y a rien sur les engagements que l’on porte depuis six mois », regrette de son côté Orianne Plumet, vice-présidente du collectif Inter-Urgences et infirmière à la Pitié Salpêtrière (AP-HP). Sachant que le mouvement de grève des paramédicaux avait été lancé avec trois mots d’ordre : un moratoire sur la fermeture des lits en aval, une augmentation de 300 euros mensuels, et 10 000 postes en plus. Sur le premier point, la ministre semble favorable à un moratoire, mais pas sur une ouverture de lits dans les services. « C’est une bouffée d’oxygène, mais ce qui m’inquiète, c’est qu’elle a parlé de conditions sans préciser lesquelles », nuance Mireille Stivala, de la CGT.
Reste que pour beaucoup, ce plan oublie l’essentiel, à savoir des effectifs supplémentaires aux urgences, mais aussi ailleurs. « Ouvrir un lit, cela veut dire embaucher », rappelle Christophe Prudhomme, de l’Amuf.
« S’il n’y a pas de médecins, d’infirmières, d’aides-soignantes en plus dans les Ehpad, par exemple, les personnes âgées continueront d’aller aux urgences, prévient Patrick Bourdillon (CGT). Dans six mois, on aura à faire face aux mêmes problèmes, surtout avec la grippe… »
Et la CGT de rappeler qu’elle demande 10 000 postes supplémentaires pour les urgences (tout comme le collectif qui a lancé la grève), mais aussi 40 000 postes pour les Ehpad.
L’autre souci, c’est le manque de généralistes. « La ministre a commencé la réunion en expliquant que le vrai problème, c’était le manque de médecins traitants. Or, dans toutes ces propositions, elle ne fait rien pour enrayer la désertification », s’agace Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France. La création annoncée d’un « service d’accès aux soins » (SAS), qui pourrait orienter 24h sur 24 vers une consultation en ville ou une téléconsultation ou vers les urgences, ne résoudrait donc pas le problème. « Aujourd’hui, on manque de médecins libéraux. On déplacerait le problème au lieu de le régler ! », reprend Jean-Paul Hamon.
Pour certains, l’une des solutions serait d’imposer pour les jeunes médecins un exercice de généraliste dans les déserts médicaux. Ce que le ministre veut éviter et que les syndicats de médecins généralistes refusent.
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