La lecture du rapport du CFR (Council on Foreign Relations), que nous avons publié sur Mecanopolis la nuit dernière [lire l’article sur le site d’Égalité et Réconciliation]– et qui indique que l’acquisition par l’Iran de l’arme nucléaire aura pour effet de rendre le Proche-Orient plus stable – aura surpris plus d’un de nos lecteurs. Pourtant, ce document confirme une étude commandée par 16 agences de renseignements US, qui prétend qu’ « Israël est la plus grande menace pour les intérêts nationaux étasuniens ».
Israël est-il devenu un boulet politique et économique pour les États-Unis ? Malgré les pressions du puissant lobby juif, il semble en effet qu’une frange très large de la communauté du renseignement US ait de moins en moins envie de subvenir, militairement, politiquement et financièrement, à l’État hébreux.
C’est ce que démontre une étude commandée par 16 agences de renseignements étasuniens, dont les départements de la marine, l’armée de terre, l’armée de l’air, les corps de Marines, les gardes-côtes, le ministère de la Défense, les départements de l’Énergie, de la Sécurité intérieure, du Trésor, l’agence de lutte anti-drogue, le FBI, l’Agence de sécurité nationale, l’Agence de renseignement géo-spacial, l’Agence de reconnaissance nationale et la CIA.
Il faut toutefois rester prudent car, même si les arguments avancés par cette étude sont objectivement justes et qu’il est certain qu’une frange importante des élites US ne semblent plus aussi prompte à supporter le poids d’Israël, les fuites d’une partie de ce document quelques semaines avant l’élection US pourraient servir d’autres buts.
Il nous semble néanmoins important de présenter les grandes lignes de cette étude de 82 pages intitulée « Preparing For A Post-Israel Middle East » (Se préparer pour un Moyen-Orient post-Israël).
Israël, compte tenu de son occupation brutale et de son bellicisme, ne peut pas être sauvé, tout comme le régime d’apartheid de l’Afrique du Sud n’a pu l’être alors même qu’Israël a été le seul pays « occidental » à entretenir des relations diplomatiques jusqu’en 1987 avec l’Afrique du Sud et a été le dernier pays à se joindre à la campagne de boycott avant que le régime ne s’effondre.
La direction israélienne est de plus en plus éloignée des réalités politiques, militaires, et économiques du Moyen-Orient, en accroissant son soutien aux 700 000 colons illégaux vivant en Cisjordanie occupée.
Le gouvernement de coalition post-travailliste du Likoud est profondément complice et influencé par le pouvoir politique et financier des colons, et celui-ci devra faire face à de plus en plus de soulèvements civils avec lesquels le gouvernement US ne doit pas s’associer ou s’impliquer.
Le Printemps arabe et le réveil islamique ont dans un large mesure libéré une grande partie des 1,2 milliard d’Arabes et musulmans pour lutter contre ce qu’une très grande majorité considère comme une occupation européenne de la Palestine et de la population indigène, ce qui est illégal, immoral et insoutenable.
Le pouvoir arabe et musulman qui s’étend rapidement dans la région, comme en témoignent le Printemps arabe, le réveil islamique et la montée en puissance de l’Iran, se fait simultanément – bien que préexistant – au déclin de la puissance et de l’influence américaine, et le soutien US à un Israël belliqueux et oppressif devient impossible à défendre ou concrétiser compte tenu des intérêts nationaux US, comprenant la normalisation des relations avec les 57 pays islamiques.
L’énorme ingérence d’Israël dans les affaires intérieures des États-Unis par l’espionnage et des transferts illégaux d’armes. Cela comprend le soutien à plus de 60 « organisations majeures » et approximativement 7 500 fonctionnaires US qui obéissent au diktat d’Israël et cherchent à intimider les médias et les organisations gouvernementales US, et cela ne devrait plus être toléré.
Le gouvernement US n’a plus les ressources financières ni le soutien populaire pour continuer à financer Israël. Il n’est plus envisageable d’ajouter aux plus de 3 000 milliards de dollars d’aide directe ou indirecte d’argent des contribuables versés à Israël depuis 1967, ces derniers s’opposant à ce que l’armée américaine continue de s’impliquer au Moyen-Orient. L’opinion publique américaine ne soutient plus le financement et les guerres US, largement perçues comme illégales et pour le compte d’Israël. Cette opinion est de plus en plus partagée en Europe et en Asie au sein de l’opinion publique internationale.
Les infrastructures d’occupation ségrégationniste d’Israël sont la preuve d’une discrimination légalisée et de systèmes de justice de plus en plus séparés et inégaux qui ne doivent plus être directement ou indirectement financés par les contribuables US ou ignorés par les gouvernements US.
Israël a échoué comme état démocratique auto-proclamé ; le soutien financier et politique américain ne changera pas sa dérive comme état paria international.
Les « colons » juifs manifestent de plus en plus un violent racisme rampant en Cisjordanie, soutenus par le gouvernement israélien devenu leur protecteur et leur partenaire.
De plus en plus de Juifs américains sont contre le sionisme et les pratiques israéliennes, incluant les assassinats et les brutalités à l’encontre des Palestiniens vivant sous occupation, et les considèrent comme des violations flagrantes du droit américain et international. Cela soulève des questions au sein de la communauté juive américaine eut égard à la responsabilité de protéger (R2P) des civils innocents vivant sous occupation.
L’opposition internationale à un régime de plus en plus d’Apartheid se fait l’écho de la défense des valeurs humanitaires américaines ou des attentes US dans le cadre des relations bilatérales des États-Unis avec les 193 pays membres de l’ONU.
Spencer Delane, pour Mecanopolis