Le « nouvel ordre mondial », surgi des Accords de Bretton Woods, qui ont établi les règles de l’échange financier global et ont mis en place l’hégémonie du dollar à perpétuité dans les transactions internationales, est trop usé pour rester un paradigme de la domination planétaire.
Le 22 juillet 1944, il y a exactement 70 ans, s’achevait la réunion dans un hôtel du New Hampshire dans laquelle les États-Unis firent prévaloir leurs intérêts devant les délégués de 44 pays et imposèrent la planche à billet illimitée du dollar pour remplacer l’or en tant qu’étalon de la valeur de chaque monnaie dans le monde. C’est là que sont nés le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, deux institutions qui, depuis lors, ont fixé les normes de l’impérialisme économique et ont décidé du sort de peuples entiers. Mais la planète a changé pendant ces sept décennies : le déclin des États-Unis et de ses satellites européens semble inévitable alors que le modèle hégémonique né de Bretton Woods est confronté à de nouvelles approches venues d’autres centres de pouvoir et d’alliances toujours plus vigoureuses entre des pays qui s’opposent aux directives élaborées par Washington pour son propre profit.
Pendant que l’empire états-unien lutte encore contre les effets de l’explosion de la bulle spéculative de 2008 et que les pays d’Europe sont pris dans les crises sociales et les dysfonctionnements de leur monnaie unique, un groupe de pays émergents prend l’initiative de la création de deux organismes multilatéraux, qui se substitueront aux tout-puissants FMI et BM dans une limite de compétence qui comprend, pour l’instant, la moitié de la population mondiale, 30 % du produit intérieur brut global et 23 % de la surface de la terre. Le groupe du BRICS (Brésil, Inde, Russie, Chine et Afrique du Sud) a décidé lors de son récent sommet au Brésil de créer une banque de développement (la New Development Bank, NDB) et un fonds de réserve (le Contingency Reserve Arrangement, CRA), qui rempliront les mêmes fonctions que celles pour lesquelles ont été créés le FMI et la BM, c’est-à-dire mobiliser des ressources pour financer des projets d’infrastructure et servir de mécanisme préventif face à des épisodes de volatilité financière. Il s’agit de l’accord financier multilatéral le plus important depuis la création des institutions de Bretton Woods, selon Alicia Barcena, la secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPAL).