« Le Seigneur me procura… la faveur des princes qui tenaient la première place dans le royaume… Le Seigneur les disposa favorablement à mon égard… et j’étais proche d’eux pendant longtemps… je fus à leur service huit ans durant. J’acquis également richesses et honneurs dans leurs palais et leurs châteaux. » (Don Isaac Abravanel, conseiller des princes, Espagne, 1491)
Comme dirait Marc Ladreit de Lacharrière, les politiques ne sont que des fondés de pouvoir. Le vrai pouvoir, il est derrière. Ce n’est pas du complotisme, et de toute façon, le grand reporter Ariel Wizman de La Nouvelle Édission nous préviendra si on dérape. Transfuge de la matinale (défunte) de Canal+, Caroline Roux officie désormais sur France 5, où elle reçoit les politiques, à qui elle pose des questions violemment obséquieuses.
Caroline présente son invité :
« Il agace ceux qui fustigent les élites et les donneurs de leçons. Il fascine ceux qui admirent sa capacité à rester au cœur du pouvoir depuis 40 ans, les majorités passent, et Alain Minc reste. L’économiste et essayiste a longtemps conseillé Nicolas Sarkozy, il a souvent porté le fer contre la politique de François Hollande, mais quand le président assume un discours pro-entreprise, Alain Minc se montre bon joueur et salue le tournant… » (C politique, 16 février 2014)
On dirait qu’Alain Minc arrive toujours à être du côté, et à côté des puissants. Quels qu’ils soient. Saluons cet art du grand écart… apparent. Caroline, pour sortir ça, il faut être soit aveugle, soit prendre les téléspectateurs du service public pour des abrutis. Dans les deux cas, c’est indigne d’un journaliste dit politique : la « capacité à rester au cœur du pouvoir » prouve qu’on EST le cœur du pouvoir, banane. Pour comprendre qui détient le vrai pouvoir, il suffit d’inverser conseillers et ministres. Les ministres passent, les conseillers restent. Depuis 40 ans. L’alternance, c’est pour les caves.
Les juifs de cour sont les nouveaux princes
L’alternance, ce diaporama de nouvelles têtes, est organisé par ces fameux « conseillers », en place depuis 40 ans, qui alternent le chaud et le froid sur le devant de la scène. Mitterrand accueilli en libérateur des Français prisonniers de Giscard, puis Chirac accueilli en libérateur des prisonniers du socialisme mitterrandien, puis Sarkozy accueilli en libérateur des prisonniers du chiraquisme, puis Hollande accueilli en libérateur des prisonniers de la droite sarkozyste… Une série d’enchaînements soulagement/colère, jusqu’à la nausée. Une claque de gauche, une claque de droite, une gauche une droite, dans la gueule de la France.
« C’est la réaffirmation de l’alliance stratégique avec les États-Unis, et moi j’ai une certaine fierté à voir la France être aujourd’hui le meilleur ou le plus fiable partenaire européen sur des sujets euh, où on est seuls comme le Mali ou la Centrafrique, sur la Syrie, où il était courageux d’y aller, sur l’Iran, où on a été plus fermes que les Américains. » (Minc commente le voyage de Hollande aux États-Unis, C politique)
Il y a le Pouvoir et le pouvoir
« On met des mois avant de réaliser qui détient vraiment le pouvoir, quels sont les conseillers occultes qui sont vraiment les gens qui comptent, vous pouvez être plusieurs années dans la machine en passant à côté de gens qui ont le réel pouvoir de décision, et sans les avoir détectés… » (Roselyne Bachelot, La Parenthèse inattendue, France 2, 16 janvier 2013)
Seuls les naïfs qui refusent une douloureuse désillusion acceptent aujourd’hui d’ignorer que le pouvoir réel n’est pas dans les mains des gouvernements qui se sont succédé depuis 40 ans « chez nous ». Il appartient aux marionnettistes, qui se dessinent en filigrane de tous ces gouvernements ficelés. Pour être concrets, voici les postes réels :
1. ministre à vie en charge de la géopolitique : Bernard-Henri Lévy
2. ministre à vie en charge des finances : Jacques Attali
3. ministre à vie en charge des médias : Jean-Pierre Elkabbach
4. ministre à vie en charge de l’économie : Alain Minc.
On peut y ajouter un cinquième mousquetaire, ministre à vie en charge de la justice (et de la police) : Alain Jakubowicz. Derrière, il y a immanquablement les banques Rothschild (Macron) ou Lazard (Pigasse), cette dernière étant domiciliée aux Bermudes, car il fait plus chaud. C’est Lazard qui « conseille » l’État dans la création de la BPI, banque publique d’investissement. Conseiller, quel euphémisme !
« C’est un pays qui épargne beaucoup, c’est un pays immensément riche, et d’ailleurs c’est à la fois sa chance et son problème. Sa chance parce que ça permet d’amortir les coûts, son problème parce que ça permet de croire qu’on peut éternellement ruser avec la réalité. » (Minc de la France, C politique, 16 février 2014)
Les énarques et polytechniciens, cette fine fleur de la Nation, font le job pour ces maîtres. Bien rémunérés, ils trahissent l’idéal national. Quand on voit leurs choix, stratégiques pour le pays, on a l’impression qu’ils se gourent, mais au final, c’est plus une série d’erreurs, c’est une politique. Toujours le Trésor national nous échappe. Minc le dit à Caroline Roux, la France est immensément riche. Car les conseillers, si on les écoute bien, depuis que leurs conseils murmurés sont médiatisés, depuis qu’ils recherchent les médias, disent tout. Ils peuvent prédire l’avenir, car ils sont aux manettes : « Eh, les gars, ça sent le virage à droite. »
Paf, un coup de barre à droite, et le tour est joué :
« Ce qui me rassure, c’est qu’en 2017, quel que soit le vainqueur de l’élection, la France connaîtra une politique, la politique libérale dont elle a besoin. Si la droite gagne, évidemment, mais aussi si François Hollande veut être réélu… S’il veut être réélu, il ne le sera pas sur une équation extrême gauche/gauche, il ne pourra l’être que sur une équation gauche/électorat modéré. » (Minc, C politique)
Politiques corrompus, journalistes de diversion
Aphatie, ce commentateur de commentaires à 50 000 € par mois (et on ne parle que du Grand Journal de Canal+), dont on attend toujours les enquêtes, rapporte de dangereux propos : « François Baroin dit les ministres ne sont que des marionnettes. » Heureusement, il se rattrape aussitôt : « Ici nous n’avançons que des choses que nous pouvons prouver. » (Le Grand Journal de Canal+, 29 octobre 2009)
Ouf, comme un réseau ne peut pas se prouver… à moins d’enregistrer les appels des uns aux autres sur des années, de croiser leurs échanges privés avec leurs décisions publiques, et de prouver une collusion – l’amitié n’étant pas interdite –, Aphatie peut nous endormir pendant un bon moment encore. En revanche, quand les membres du réseau sortent de l’ombre, par goût de la lumière, tout nous est offert. Sur un plateau.
Minc :
« Je crois que ces marchés financiers qui nous regardent, qui nous régissent et qui nous sanctionnent, ont compris cela, parce que c’est parce qu’ils savent que la France de toute façon aura une politique plus libérale, qu’ils acceptent aujourd’hui de payer aussi peu cher la dette française. »
Et Caroline, bien sagement :
« Et de prêter à la France à des taux très bas, ce qui fait qu’elle s’en sort pour l’instant. »
Récemment, le ministre de l’Intérieur, c’est-à-dire principalement de la Répression de l’antisémitisme, a prouvé en plateau qu’il n’avait pas le niveau. De ses maîtres, bien entendu, mais aussi de ses adversaires, ce qui est plus grave… pour le Pouvoir. Bien sûr, la bande des Quatre… ministres à vie (comme dans la dictature chinoise, tiens), une fois que l’ambitieux se sera totalement brûlé pour elle, le jettera aux orties, c’est-à-dire à la foule, qui ne demande que ça. Ainsi, quand la colère populaire se sera repue du Valls, elle se calmera pendant la digestion, se disant qu’il y a une justice (punir le puissant), et que l’esprit de la révolution est magique. Macache oualou ! De la révolution il ne reste plus rien, et c’était même une arnaque. Le pouvoir, une fois de plus, échappe au peuple, cette marionnette de marionnettes. Et lui échappera toujours, c’est écrit dans les textes, anciens et nouveaux.
Pour la petite histoire, lorsque tous les juifs furent expulsés d’Espagne, les rois catholiques, qui jouissaient des conseils financiers de Don Isaac Abravanel, grand responsable de sa communauté, tentèrent vainement de le retenir. Sa puissance était telle qu’il faillit, en offrant des fortunes à Ferdinand II d’Aragon et à la reine Isabelle, faire annuler l’édit d’expulsion des juifs, dit décret de l’Alhambra. Argent qui servit par ailleurs à financer l’expédition de Christophe Colomb en 1492… Torquemada ne lui laissa pas le choix. Refusant de se convertir, Abravanel quitta l’Espagne pour l’Italie, emportant 2 000 ducats en or, pour ses services exceptionnels.