Un organisme, le SEDIF, est chargé d’effectuer le plus gros appel d’offres de gestion de l’eau du monde entier et parmi les trois concurrents, un a abandonné, le deuxième a été éliminé sans que le SEDIF précise pourquoi et il ne reste que le troisième : Veolia. Retour sur la gestion de l’eau dans le monde et en particulier en Île-de-France. Premier volet de l’article.
Rappelons d’abord qu’à l´échelle mondiale l´approvisionnement en eau est encore à plus de 80% d’origine publique. Ainsi, plus de 90% de la gestion des eaux en Allemagne se fait en régie communale. En revanche en France, grâce à Suez, Veolia et la Saur, 8 Français sur 10 achètent leur eau à un fournisseur privé, un record ! Dans les agglomérations ce chiffre atteint même 9 sur 10 ! Suez et Veolia, les géants sont présents dans 69 pays sur les 5 continents.
Le rapport explosif de l’UFC Que Choisir
Pourtant, ce système n’est pas plébiscité par tous en France. En 2008, l’UFC Que Choisir publie dans son numéro de février 2008 une synthèse de l’étude sur la facturation de l’eau. Ses conclusions sont sans appel : « Parmi les 19 collectivités que nous avons étudiées, la majorité facture à un prix trop élevé, mais rares sont les syndicats qui présentent des résultats aussi inquiétants que ceux du SEDIF : selon nous, sur 100 euros facturés hors taxe et hors redevance pour l’eau potable, 61 euros ne correspondent pas à un coût justifié » ! Elle remarque qu’un branchement est facturé 2500 euros pour les Franciliens, et 850 euros à Nantes, alors que les économies d’échelle devraient, au contraire, faire baisser les prix. Ces travaux étant réalisés par des filiales de Véolia : « le pactole reste en famille », souligne l’UFC. Après ces révélations explosives, le SEDIF envisage de porter plainte puis se ravise et opte finalement pour le dialogue. Le résultat de ce dialogue ? Un rapport préconisant de nombreux points d’amélioration pour le renouvellement de contrat en 2010.
« Nous pensons qu’au minimum, plus de 90 millions d’euros peuvent être économisés sur les seules dépenses qui concernent l’activité du présent régisseur », il y a donc une grosse marge de progrès. Si UFC Que Choisir ne prend pas part au débat sur le choix d’une externalisation ou d’une régie municipale (publique donc), il désire fortement que cette option soit étudiée sérieusement. De même, il préconise fortement que ce contrat regroupant 144 communes soit découpé en lots, ce qui permettrait à des entreprises plus petites que Veolia et Suez d’entrer en concurrence : « Une entreprise A peut être la plus compétente pour la production et une entreprise B être le plus à même de gérer les abonnés. » Et « Il apparait plutôt sain que le SEDIF, s’il décide de déléguer, envisage de recourir à plusieurs entreprises afin d’avoir un retour d’expérience sur les avantages et les inconvénients de chaque acteur du marché. », « Toutes les fonctions ne nécessitent pas les mêmes durées d’engagement contractuel. Distinguer la gestion des abonnés de la gestion de la production permettrait, par exemple, de raccourcir la durée du contrat pour la première activité. ». Sur la durée justement, l’UFC Que Choisir préconise des durées de 10 ans maximums. « La concertation avec les usagers ne doit pas s’arrêter au renouvellement du contrat, mais doit être constante pour porter tant sur la qualité du service que sur le prix. » et enfin étant donné la surcapacité couteuse de production de l’eau, l’UFC Que Choisir préconise la création d’un « Grand Paris de la production d’eau »
Les recommandations ont-elles était suivies ?
Qu’en est-il de ces recommandations en 2010 ? La collaboration entre UFC Que Choisir et le SEDIF a-t-il été fructueux pour les usagers ? La réponse est hélas, sans appel : c’est précisément tout le contraire des préconisations qui a été choisi. Détail : La séparation en lots différents par activité n’a pas été retenue par le SEDIF, cela aurait été pourtant une source d’économie et d’efficacité importante Le débat entre externalisation et régie municipale a tourné court au profit de l’externalisation La durée d’engagement de 10 ans maximum est en fait de 12 ans. Aucune avancée sérieuse n’a été faite sur la concertation avec les usagers Le Grand Paris de la production d’eau n’a pas été réalisé La réduction de 61% des coûts de l’eau n’est pas connue, mais devrait l’être lors de la décision officielle de conserver Veolia, le 24 juin. Il est également fort a parier que ce point ne sera pas satisfait (et de loin) non plus
Qui est le SEDIF ?
Au vu de ce bilan négatif par rapport aux recommandations de l’UFC Que Choisir préconise, il convient d’en savoir plus sur le SEDIF. Qui est-il ?
Le Syndicat des eaux d’Île-de-France (SEDIF) SEDIF, présidé par André Santini, maire d’Issy-les-Moulineaux, regroupe 144 communes de banlieue, approvisionne plus de 4 millions d’usagers et produit 800 000 m3 d’eau potable par an. Il a délégué la distribution de l’eau à la Générale des Eaux (Veolia, ex-Vivendi) depuis plus de 80 ans ! Une fidélité record… C’est par un courrier reçu le 12 mai que la société Suez a appris avoir été écarté du plus gros marché public d’Europe, la délégation de la distribution de l’eau dans 144 communes d’Ile-de-France. D’après ce courrier, Suez « n’entre pas dans la phase de mise au point du marché ». Pour le porte-parole de Suez, il n’y a pas de surprise, mais des questions : « Nous prenons acte de sa décision d’écarter notre candidature, mais nous attendons maintenant de savoir sur quels critères s’est fait ce choix ». Ceci met fin à quinze mois d’une compétition soutenue : un questionnaire de 400 questions a dû être rempli par les candidats. Veolia, reste donc le seul candidat et ancien responsable de la gestion de l’eau en ile de France depuis 1923. Du coup, il ne demeure aucun suspense sur la décision finale qui sera rendue le 24 juin.
Selon Dominique Voynet, la situation actuelle n’est pas surprenante : « Il n’y avait, à mon sens, aucun suspense. L’histoire a été écrite par étapes. Le bureau du Sedif a tout d’abord écarté tout scénario permettant un retour en gestion publique de l’eau. Par ailleurs, c’est un nombre restreint de grands élus, membre du bureau, qui ont été amenés à piloter le dossier, en l’absence d’un certain nombre de forces critiques du Sedif. Ensuite, les plus petits groupes, qui ne pouvaient pas répondre à la totalité du marché pour quatre millions de personnes, ont été d’emblée éliminés. Enfin, il était de notoriété publique que Veolia, qui est dans la place depuis plusieurs décennies, tenait la corde. »
Le mélange des genres ne peut être évité et les verts se font entendre sur le sujet : sur son site, les verts de Bagnolet, donnent une copie d’un courrier d’André Santini, écrivant au nom du SEDIF, aux représentants des communes délégués au SEDIF pour les informer des résultats 2007 de l’observatoire de la qualité du « service public » de l’eau. « Ce courrier d’André Santini, au lieu de porter l’en-tête, comme il eût fallu, du SEDIF porte l’estampille du groupe privé VÉOLIA. » ! Très fort…
Qui est Veolia ?
Veolia dans de nombreuses villes ne contrôle pas seulement l´eau, mais de nombreux autres secteurs du service public, jugez plutôt : le gaz, l´électricité, le traitement des ordures, le chauffage urbain, le nettoyage municipal, les transports en commun, les cantines, les services sanitaires… Si bien que l’on peut dire que l’entreprise a mis la main sur les services aux municipalités qui dépendent fortement de l’entreprise. Cette position dominante n’est jamais bonne pour les usagers qui risquent de payer plus cher un service par manque de concurrence.
Veolia à Rennes
Rennes : Veolia depuis 1882. 2004 renouvellements de 10 ans avec ristourne. Dans le nouveau contrat, Veolia montre qu’il ne gagnera pas d’argent avec ce nouveau contrat, voir en perdra un peu. La raison de cette situation vient de l’historique avec la ville : Le marché passé avec la ville a un montant de 150 millions d’euros. L’entretien réseau représente ¼ des frais engagés chaque année. Pourtant entre 96 et 99, 3 millions d’euros versés au groupe pour la maintenance du réseau (dont le remplacement des tuyaux de plomb) ne seront pas utilisés à cette fin par Veolia mais placés financièrement chez une société de réassurance irlandaise pour un montant total de 1 milliard d’euros pour le groupe. Finalement, les travaux seront faits. Une partie de la dotation non utilisée (191 000 euros) réinjectée dans le contrat actuel. La mairie a finalement calculé que cette somme était en fait de 800 000 euros. Ce passif a permis à la ville de Rennes de négocier ce nouveau contrat en apparence très avantageux, le groupe Veolia voulant rester un important acteur de l’eau en Bretagne.
Pourtant, certains doutent de la réalité de la bonne affaire réalisée par la ville. Si la marge apparaît légèrement négative (-0,42%) dans le document présenté à la ville, certains postes importants sont opaques et pourraient bien cacher les profits : frais de structure, dotation pour l’entretien du réseau se monte à 12 millions pour 10 ans et des frais de maîtrise d’œuvre à hauteur de 800.000 euros. Le détail de ces postes n’a jamais été donné par Veolia. Sont aussi incluses la formation du personnel (3%), les activités sociales du groupe, la redevance d’occupation (droit d’usage du réseau existant)…
Le 15 décembre dernier, sur ordonnance du TGI de Paris, la DGCCRF – la Direction de la Répression des fraudes – a perquisitionné les locaux de cinq entreprises de travaux publics franciliennes. Particulièrement visée, la Sade, une filiale de Veolia spécialisée dans la pose de canalisations, a subi quatre descentes simultanées : trois dans ces agences et une au siège, dans le 8e arrondissement de Paris. Le bureau et le PC du PDG, Dominique Bouillot, ont été passés au peigne fin. Descente qui ne bouleverse pas l’intéressé : « Ça n’a pas gâché mon Noël. » Indique-t-il à la presse. Quelques jours après le passage des enquêteurs, des cadres supérieurs de la Sade ont changé de numéro de téléphone portable. Était-ce pour prévenir d’éventuelles écoutes ?
Veolia à Toulouse
En 2003, l’association « Eau Secours 31 » découvrit ce que signifiait « ticket d’entrée » que la Compagnie Générale des Eaux (Veolia maintenant) a payée lors de la signature du contrat de concession avec Toulouse. Ce sont 473,5 millions de francs que l’entreprise aurait donnés à la mairie en échange du contrat. Dominique Baudis, maire de l’époque, présentait cette somme comme une véritable prouesse dans le contrat avec l’entreprise. Cette somme permettait d’assainir le budget de la ville et même de subventionner la construction de bâtiments publics, baisser les impôts locaux, etc. Pourtant, l’association « Eau Secours 31 » a finalement compris la nature de ce ticket en mettant la main sur un passage resté secret du contrat de concession. Le ticket était financé par une augmentation du prix de l’eau ! De l’état de « cadeau », la somme d’argent passait a celui de poison : ce n’était plus la Générale des Eaux mais bel et bien l’usager toulousain qui payait chèrement le ticket d’entrée. Le contrat était si bien fait pour l’entreprise que le ticket aurait été payé à fin 2020, date prévue d’échéance du contrat, le triple de sa valeur ! Ce cadeau empoisonné à permis à la ville de financer des dépenses importantes.
Ailleurs, ce n’est pas mieux !
L’entreprise a pourtant récidivé à Braunschweig en Allemagne où la municipalité s’est finalement endettée pendant 30 ans grâce à Veolia… À Berlin en 2000 à Berlin, la moitié du service des eaux de la capitale fut vendu à l´allemand RWE et au français Veolia. Pourtant un contrat secret garantissait aux deux sociétés un gain de 8% environ ainsi qu’une augmentation garantie compensée par le Sénat Berlinois qui les dédommagerait si ces bénéfices n´étaient pas atteints, conclusion : une perte de 41,2 millions d’euros en 2004 et une augmentation du prix de l´eau de 15% (ainsi que les trois années suivantes) !
Sur Bordeaux, c’est Suez qui doit rembourser 200 millions d’euros de trop-perçu… Dans certains cas les deux géants s’allient pour exploiter les contrats juteux : « Véolia et Suez ont créé douze sociétés communes qui exploitent les contrats de grandes collectivités dont trois, Lille, Marseille et Nancy, faisaient partie de notre étude. Ces filiales communes sont une aberration puisque, sur ces contrats, les deux grandes sociétés unissent leurs forces, ce qui réduit à la portion congrue le jeu de la concurrence. » Le Conseil de la Concurrence dans un avis daté du 11 juillet 2002 a jugé que ces deux entreprises avaient « abusé de leur position dominante collective ». Le Conseil a donc « demandé aux ministres chargés de l’économie d’enjoindre aux sociétés Compagnie Générale des eaux et Lyonnaise des eaux de modifier, compléter ou de résilier, dans un délai déterminé, tous les accords et tous actes qui ont conduit ces entreprises à associer leurs moyens dans le cadre des filiales communes ».
Veolia à Paris
Quant à la ville de Paris, en novembre 2008, le Conseil de Paris a voté la "remunicipalisation" de l’eau. Une promesse de campagne du candidat Delanoë, pour en finir avec l’ère Chirac, qui avait privatisé l’eau de Paris en 1984. Veolia avait installé des capteurs de rupture sur les canalisations, une invention brevetée de Veolia et certifiée comme technique standard par l’Union européenne, ce qui permet de localiser les fissures automatiquement. La régie communale « Eau de Paris » a dû acheter le droit d’usage du système à Veolia... Cette belle réussite pour Veolia est le résultat de tous les efforts de lobbying de cette entreprise en Europe : Veolia participe activement aux programmes de recherche sur l´eau de l´UE. Par exemple, la WSSTP, la plate-forme technologique pour l´eau et l´assainissement, possède un comité de 10 membres dont 3 employés de Veolia parmi lesquels le vice-président de WSSTP, Xavier Chazelle. La encore les liens sont étroits, ainsi le PDG de Suez, Yves Thibault de Silguy est un ancien commissaire européen.
Et la qualité de l’eau ?
De nombreuses polémiques ont eu lieu ces dernières années sur la qualité de l’eau fournie par les entreprises privées de gestion de l’eau potable en France. Nitrates, pesticides, métaux lourds, radioactivité, médicaments… Certains problèmes de qualité d’eau durent depuis plus de dix ans sans qu’une solution efficace soit trouvée. Ainsi en Seine et Marne certaines communes ont des taux de nitrates de plus de 60. La raison de ces dérives ? Les mairies qui n’investissement pas assez et les compagnies des eaux qui exploitent des sources contaminées. Ainsi à Mouthiers-sur-Boëme, des taux de pesticides 6 à 7 fois supérieurs à la norme ont été découverts par les habitants. Ces derniers ont finalement attaqué la SAUR. La bataille à été difficile puis qu’il a fallu apporter la preuve de ces dépassements dans le passé. Finalement, la SAUR a abandonné la source contaminée et a du payer le remboursement de bouteilles d’eau durant 12 ans 32575,96 euros pour les 11 familles qui avaient porté plainte, négligeant du même coup tous les autres habitants soit 11 000 habitants tout de même…
Pour quelle efficacité ?
La maintenance des tuyaux est régulièrement critiquée en France ou elle est généralement substituée par une gestion du risque qui ne répare que lorsqu´il y a un incident. Cette manière de procéder fait que la grande majorité des canalisations d’eau française ont plus de 30 ans d´âge. Ceci explique que la moyenne des fuites d´eau en France est de 26,4% contre 7,3% en Allemagne ou l’eau est gérée publiquement. Nous savons tous combien l’eau est précieuse et nous la gaspillons pour raison de rentabilité financière… Les mesures à prendre pour protéger les nappes phréatiques sont également prises en regard de problématiques financières, mais quel en sera le coût pour les générations futures ?
Liaisons dangereuses ?
Les échanges de personnel entre les grandes entreprises de l’eau et le monde politique sont symptomatiques des liaisons dangereuses qu’entretiennent les deux mondes. C’est pas un hasard si l’on disait que le nom de Vivendi (qui devient Veolia en 2003) n’était rien d’autre qu’une abréviation pour « VIVier pour ENarques en DIsponibilité » tant l’ENA est un gros fournisseur de managers chez Veolia. En retours, n’oublions pas que l’état est un gros actionnaire de Veolia. Voici quelques exemples lumineux de transferts entre les deux mondes :
Henri Proglio, PDG de Veolia, est un grand ami de Rachida Dati, ex-ministre de la Justice Dominique de Villepin, ministre des Affaires étrangères, puis ministre de l’Intérieur et enfin Premier ministre, a été conseiller international chez Veolia Éric Besson, à la tête de la Fondation Vivendi (Veolia) a été responsable du programme économique du parti socialiste, puis ministre de Sarkozy Stéphane Richard, directeur de Veolia Transport, passe en 2007 directeurs de cabinet au ministère de l´Économie et des Finances Sylvain de Forges, directeur financier de Veolia, cumule ce titre avec celui de PDG de l’organe du Ministère des Finances chargé de la gestion du patrimoine et des dettes de l’État : l’Agence France Trésor Rainier d’Haussonville, directeur Affaires européenne chez Veolia, a été chef du Secrétariat général des affaires européennes au Ministère des Affaires étrangères, puis Conseiller aux affaires économiques européennes dans le Cabinet du Premier Ministre Gérard Le Gall, conseiller du premier ministre Jospin pour les sondages d’opinion, a rejoint Suez Jean-Pierre Denis, président de Dalkia (Veolia-Environnement), après avoir été secrétaire général adjoint de l’Elysée, est passé conseiller de Jacques Chirac Joachim Bitterlich, vice-président exécutif de Veolia, fut un proche collaborateur du chancelier Allemand Helmut Kohl Selon Dominique Voynet « Le Syndicat des eaux est une sorte de caricature d’un certain système. Depuis des décennies, les grands partis se répartissent les présidences de syndicats : à l’UMP, le Sedif ; au Parti communiste, les services funéraires ; au PS, les ordures ménagères. Au moment de voter, les accords tacites passés il y a bien longtemps sont reconduits, ce qui assure une certaine stabilité, à la fois des équipes et des pratiques, à la tête de ces grands syndicats ». Tout est dit.
Et dans le monde ?
Veolia Environnement propose ses services à de nombreuses villes françaises, mais aussi anglaises, allemandes et du monde entier. Veolia disposant, de fait, d’un savoir-faire considérable dans les domaines de la recherche-développement et de l’ingénierie financière. En période de crise, les compétences dans les domaines financiers sont au moins aussi importantes que la maîtrise technique des problèmes de gestion de l’eau. C’est ainsi que bon nombre de municipalités dans le monde font appel à Veolia…
Dans un article sur la privatisation, j’avais cité l’exemple de la Bolivie : En Bolivie, une grande vague de privatisations a eu lieu. Ainsi en 1999, l’entreprise gérant l’eau potable de la 3e ville de Bolivie, Cochabamba, a été privatisée et une concession jusqu’en 2039 a été négociée avec une compagnie jusqu’alors inconnue dans le pays « AGUAS DEL TUNARI ». Dès cette date, le prix de l’eau a augmenté de 30% à 300% suivant les cas. Avec cette augmentation, certaines familles modestes consacraient plus d’un quart de leur budget à l’eau potable. Les sources qui appartenaient aux paysans ont également été confisquées et privatisées. Des lois votées sur mesure protégeaient la société privée gérant l’eau. Les textes de loi suivant la lecture que l’on en faisait pouvaient même prévoir l’interdiction de récupérer l’eau de pluie. Devant cette pression insoutenable pour la population, des émeutes ont eu lieu. La situation pour le gouvernement est devenue réellement dangereuse lorsque les habitants apprirent que l’entreprise « AGUAS DEL TUNARI » était en réalité la propriété du groupe américain « BECHTEL ». Étant donné l’ampleur de la protestation citoyenne, le président n’a pas d’autre choix que d’instaurer, en avril 2000, la loi martiale. Cela conduit à de nombreuses arrestations de contestataires et syndicalistes. Le but de la loi martiale étant de rétablir l’ordre et d’acter les privatisations. Au plus fort de la crise qui devenait incontrôlable, des tireurs d’élite ont été employés par le gouvernement. C’est ainsi que le jeune Victor Hugo Daza (16 ans) a été abattu ainsi que six autres personnes. Des dizaines de femmes et adolescents furent blessés par ces tireurs. Finalement, après six mois de manifestations intenses, l’entreprise BECHTEL qui quitta la ville rapidement et le gouvernement firent marche arrière sur cette privatisation.
Alors ?
On peut se demander combien de temps encore devrons-nous payer l’eau plus chère qu’elle ne coûte réellement alors que des solutions simples existent. Temps qu’il existera des liaisons dangereuses entre les politiques et les grandes entreprises de l’eau la situation ne sera pas saine et il faudra se résigner a payer toujours plus pour un bien, l’eau, qui sera toujours plus rare.