La célèbre revue consumériste (la seule véritable acception du mot consumérisme) Que Choisir ? a analysé la hausse des tarifs du pétrole à la pompe consécutive à la guerre en Ukraine.
Il n’y a eu pourtant aucune rupture d’approvisionnement ou de demande supplémentaire du fait de la guerre. Mais les investisseurs ont préféré prendre les devants et ont artificiellement fait monter la demande et les prix. En effet, comme le rappelle la revue de défense des consommateurs : « L’AIE et l’Opep le reconnaissent donc de concert : la montée des prix du pétrole de ces dernières semaines ne s’est fondée que sur des craintes et des hypothèses, mais à aucun moment sur le moindre fait tangible ».
Tandis que les prix des produits pétroliers atteignent des sommets partout en Europe, les pays fournisseurs d’or noir refusent d’augmenter leur production. Au plus grand bonheur des « majors » du pétrole (Total, Shell, BP ou ExxonMobil) qui ont augmenté la rémunération de leurs actionnaires.
La hausse des cours du pétrole est une aubaine pour les sociétés impliquées dans le secteur. Lorsque les prix grimpent pour des motifs géopolitiques, comme à l’heure actuelle avec la guerre en Ukraine et l’arrêt progressif de l’approvisionnement en pétrole russe, les marges de raffinage explosent.
Selon les données du ministère de la Transition écologique, la marge brute de raffinage sur une tonne de pétrole Brent est passée de 29 € en février dernier à 84 € en mars, pour se fixer à 156 € en avril. Si ce calcul effectué par les services du ministère de la Transition écologique demeure purement théorique, il n’en dépeint pas moins la réalité : Total s’est satisfait, lors de la présentation de ses résultats pour le premier trimestre 2022, de la « surperformance des activités de négoce pétrolier ». Le groupe français a dégagé un résultat net IFRS de 4,9 milliards de dollars, soit +48 % par rapport au 1er trimestre 2021, ce en dépit d’une provision de 4,1 milliards pour faire face aux aléas russes. Le résultat opérationnel ajusté a été de 1,4 milliard de dollars, celui-ci s’est donc trouvé multiplié par 2,6 sur 1 an, ou a progressé de 35 % par rapport au 4e trimestre 2021.
Devant de tels résultats, Total a choisi d’augmenter de 5 % « le premier acompte sur dividende au titre de l’exercice 2022 », mais a aussi provisionné de l’argent afin « d’investir dans des projets rentables pour mettre en œuvre la transformation de TotalEnergies en une compagnie multi-énergies durables ».
Le concurrent britannique BP a pour sa part volontairement présenté un bilan financier trimestriel négatif. Devant l’impératif de faire cesser ses activités implantées en Russie, BP a provisionné 25,5 milliards de dollars, ce qui a engendré un résultat net en perte de 20,3 milliards de dollars. Néanmoins, BP vient de réaliser son meilleur trimestre depuis 10 ans : le « bénéfice récurrent » a été de 6,2 milliards de dollars, contre 4,1 milliards sur 1 an. La hausse atteint 53 %. De ce fait, à l’image de Total, le cours de l’action est passé de 5,25 cents à 5,46 cents, soit +4 %.
Les résultats de Shell ont enfin été conformes à ceux de ses challengers : 9,1 milliards de dollars de résultat net au 1er trimestre 2022 (+182,3 % sur 1 an), et un dividende par action augmenté de 4 %.
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