Des commentateurs se demandent si les alternatives au président Assad ne sont pas pires, en d’autres termes si Israël ne risque pas d’y perdre au change.
Sur le papier, les dirigeants israéliens ont toutes les raisons de se réjouir de la déstabilisation du régime de Bachar el-Assad. La Syrie fait partie de « l’axe du mal ». Elle est alliée de l’Iran, du Hezbollah libanais et abrite les QG des islamistes palestiniens du Hamas et du Djihad islamique qui prônent tous la disparition de l’État d’Israël. Pourtant, les manifestations en Syrie suscitent plus d’interrogations que d’applaudissements. Côté officiel, la prudence est de rigueur. « On ne se mêle pas de cette affaire », proclame Matan Vilnaï, ministre chargé de la Protection des civils. Plus prolixes, des commentateurs se demandent si les alternatives au président Assad ne sont pas pires, en d’autres termes si Israël ne risque pas d’y perdre au change.
Parmi les scénarios catastrophes figurent une prise du pouvoir des islamistes ou un chaos général. « Depuis près de quarante ans, la frontière entre Israël et la Syrie est la plus calme », souligne Yoav Limor, commentateur militaire de la télévision publique. Il ne manque pas non plus de rappeler que la Syrie dispose de missiles capables d’atteindre n’importe quel point du territoire israélien ainsi qu’un arsenal comprenant des armes chimiques et bactériologiques. « Que se passerait-il si le pouvoir à Damas tombait dans des mains irresponsables ? »
« Les dictatures sont stables »
Ben Ami, ancien ministre des Affaires étrangères, reconnaît qu’à « long terme, la démocratie dans les pays arabes constituera un élément positif pour la paix, mais dans l’immédiat, il faut bien admettre que les dictatures sont stables et savent imposer leur volonté aux éléments incontrôlés ». Ehoud Yaari, spécialiste des affaires arabes à la deuxième chaîne de télévision privée, relève que les « Frères musulmans se rapprochent du pouvoir dès qu’un régime dictatorial tombe, comme c’est le cas en Égypte et peut-être aussi en Syrie prochainement ».
Itamar Rabinovitch, ancien ambassadeur d’Israël à Washington, se déclare soulagé qu’Israël n’ait pas restitué à la Syrie le plateau du Golan au vu des incertitudes pesant désormais sur l’avenir politique de ce pays. Médias et responsables excluent pour le moment que les Américains ou les Européens se portent au secours des manifestants syriens. « Contrairement à Kadhafi, Bachar el-Assad est perçu comme quelqu’un de sérieux et d’efficace, ce qui pourrait le sauver », souligne un diplomate israélien.
Marc Henry