Il n’y a rien d’étonnant à ce que des militants islamistes se retouvent aux côtés des rebelles libyens, étant donné qu’ils ont toujours cherché à renverser le colonel Kadhafi et que le successeur d’Oussama Ben Laden, l’Egyptien Ayman al-Zawahiri les avait encouragés à le faire en 2007.
D’ailleurs, la présence de combattants islamistes dans les rangs insurgés est connue depuis le début de l’intervention de la coalition internationale en Libye. Voire même avant. Le pays abrite, à l’est, un foyer radical, précisément à Derna. Cette ville, qui subit l’influence de jihadistes passés par l’Afghanistan, a même été un « vivier de combattant libyens » pour l’Irak, avait indiqué un câble diplomatique américain récemment dévoilé par WikiLeaks.
Alors que l’on s’interroge sur l’avenir de la Libye maintenant que le colonel Kadhafi est en mauvaise posture, ainsi que sur la composition exacte du Conseil National de Transition (CNT), l’organe politique de l’insurrection libyenne, le quotidien Libération indique, dans son édition de ce jour, que le nouveau gouverneur militaire de Tripoli ne serait autre qu’Abdelhakim Belhaj, alias Abou Abdallah al-Sadek, qui fut l’un des fondateurs du Groupe islamique combattant libyen (GICL).
Ce mouvement a disposé d’au moins deux camps d’entraînement en Afghanistan, sous le patronnage d’al-Qaïda. Quant à Belhaj, il a été arrêté par la CIA en Malaisie, en 2003, puis remis aux services secrets libyens un an plus tard. Il a finalement été libéré en 2009, dans le cadre de la politique de réconciliation menée par Saïf al-Islam, le dauphin du colonel Kadhafi. On retrouve sa trace cette année, lorsqu’il prend la tête de rebelles dans l’ouest de la Libye et qu’il est à la manoeuvre, avec l’aide de l’Otan, pour faire tomber Tripoli du côté de l’insurrection.
En juillet, le New York Times avait rapporté les propos d’un responsable d’un service de renseignement arabe, selon lesquels les Américains et les Européens s’inquiétaient « de l’influence d’anciens membres » du GICL sur l’insurrection libyenne. « Il est facile de changer de nom et de dire ‘nous n’appartenons pas à al-Qaïda’, mais la vraie question est de savoir s’ils ont changé d’idéologie » avait-il confié. D’ailleurs, c’est ce qui explique, sans doute et en partie (mais en partie seulement), la réticence d’Alger à reconnaître le CNT, tant que ce dernier ne se sera pas engagé à lutter contre al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).
Enfin, cette influence de ces anciens du GICL est peut-être la clé de l’assassinat du général Younès, alors chef militaire de l’insurrection, qui traqua, à la tête des forces spéciales libyennes, les éléments liés aux jihadistes libyens dans les années 1990. Le CNT a assuré connaître les auteurs de ce meurtre mais refuse, pour le moment, de communiquer leur identité.