Si l’agression avait été signée E&R, cela aurait été notre arrêt de mort : 150 gendarmes, 600 policiers, 3 hélicos, 1 train blindé, 1 bandeau « Alerte » sur toutes les chaînes, le ministre de l’Intérieur sur place, le préfet en transe, la spéciale en direct sur BFM, le deuil national, trois jours fériés, la marche blanche, la tour Eiffel aux couleurs de Thomas, les tee-shirts Je Suis Thomas, etc., etc.
Malheureusement pour le Système, l’agression n’est pas venue de nous, qui sommes non violents – nous sommes un site politique –, mais d’un copain de Thomas Huchon, qui lui a écrasé une carafe sur la tête et la main, occasionnant 10 jours d’ITT. Or, ce vieux copain est « complotiste », soudain, tout s’éclaire : le chaînon manquant ! C’est les soraliens ! Et pourquoi pas Daech ? Le FSB pendant qu’on y est ?
Thomas Huchon a donné plus de détails à « Libération », qui s’intéressait aux conséquences néfastes de ces nouvelles religions dans les liens d’amitié. « Je n’ai plus de relations avec ce monsieur, depuis qu’il a basculé dans une forme de croyance complotiste à travers les discours d’Alain Soral et de Dieudonné notamment », livre Thomas Huchon. (Sud-Ouest)
Une brouille entre potes quarantenaires qui vire au pugilat, ça existe, surtout quand les deux divergent sérieusement politiquement. On appelle ça un fait divers, pas la peine de politiser cet épiphénomène à l’excès. S’il n’est pas facile d’être Thomas Huchon, il n’est pas facile non plus d’être résistant aujourd’hui dans un cadre familial, amical, professionnel. C’était encore moins facile de l’être en 1942, parce qu’en plus, on risquait sa peau.
Mettre cette embrouille post-estudiantine sur le dos de la complosphère, c’est aller un peu vite en besogne, même si le thread de Thomas respire la vengeance, la haine de l’Adversité (qui lui assure pourtant ses émoluments de spécialiste des fake news, c’est le cas de le dire). Mais contre qui ? Ici, on a toujours combattu les idées – pas les hommes – et avancé des idées. Jamais un mot d’ordre de mobilisation générale, d’« équipe » envoyée chez un adversaire politique, pas de haine, juste des idées qui avancent, et font leur chemin, et c’est ça, bien sûr, qui dérange. Passons au thread.
Il y a exactement un an, à quelques heures près, je subissais un violente agression d’un complotiste, qui était il ya longtemps un copain. Tout ce que je dénonçais dans mes films, mes livres, mes articles, tout ce que je disais ici se trouvait dramatiquement matérialisé. #Thread
— Thomas Huchon (@ThomasHuchon) November 10, 2022
Un diner entre amis… Des gens que l’on a pas vu depuis longtemps… ce sont les 40 ans du héros du jour, ça méritait bien de réunir des vieux routiers de nos métiers.
Assez vite tout dérape, mon agresseur déverse propos complotistes sur remarques antisémites (@RReichstadt à ce moment-là ils parlent de toi, il faut dire qu’on a autour de la table les mecs qui font les images de Grimault pour les Pyramides 2 #maisquestcequejefouslà
Il m’accuse de protéger les pédophiles satanistes qui dirigent le monde en secret et se protègent (#karlzero sors de ce corps), entre autres dingueries.
Et là, ce petit minable m’agresse, par surprise et sans que je puisse me défendre, m’explosant un objet sur la tête.
Les médecins des urgences m’ont dit qu’il aurait pu me crever l’oeil, voire me tuer. Il a passé 48 en GAV, et j’ai porté plainte.
Après les faits, passons à l’analyse des faits, par Thomas en personne. Ensuite, nous analyserons son analyse. Chacun son tour.
Cet homme, poussé par sa haine vicerale nourrie par les algorithmes, ne mérite ni vos quolibets ni votre indignation. Il n’est rien, ou plutôt il n’est que l’incarnation d’une époque qui laisse la haine et la violence triompher.
J’ai raconté cette histoire à 2 confrères de @libe, @pierre_plottu et @MaskymMace. Eux-mêmes victimes de violences numériques ils comprenaient ce qu’il m’est arrivé. Leur article est ici
N’en doutez pas une seconde, ces croyances complotistes engendrent de la violence. Et cette violence à des conséquences. Et alors que mon agresseur refuse de payer ce pour quoi il a été condamné, la justice a oublié de nommer l’expert qui doit juger de mes potentiels dommages…
Un an après, des heures d’angoisse, des heures de psy. Des heures passer sur le terrain à lutter contre la désinformation. Parce que ce qu’il m’est arrivé ne doit pas se reproduire. Faites attention à vous. Je pense aux amis @RReichstadt @pierre_plottu @tristanmf @MaskymMace
Je le précise ici : je ne lâche rien, je ne pardonne rien, et je vais continuer. Tenez-vous le pour dit. #nopasaran
Merci à tous pour vos messages de soutien. Aux trolls, aux conspis, à tout ceux qui m’attaquent sous ce message qui raconte une agression injustifiée (10 jours d’ITT, un trauma crânien et une main cassée), vous venez confirmer tout ce que l’on dit depuis des années.
Cela montre encore plus la nécessité de ce travail que nous sommes nombreux à faire. Cela montre aussi que ce qui nous sépare n’est plus une ligne ou une frontière mais un gouffre. C’est terrifiant.
J’en profite pour remercier ici les personnels de santé qui m’ont pris en charge aux urgences, les policiers qui ont pris mon témoignage et ma plainte, la médecin qui a établi le diagnostic de 10 jours ITT. Tous ont fait leur travail de manière remarquable et avec humanité.
La chance ! Nous, nos plaintes pour insultes, menaces de mort ou violences, elles passent rarement le premier tour. Quant à la justice...
Bref, voici notre analyse : on sait que généraliser – ou essentialiser – est source d’erreurs. Nous avons affaire à un cas particulier où un copain de Thomas l’a attaqué à la carafe après une discussion un peu chaude sur les élites. Qu’est-ce que ça a à voir avec ceux qui travaillent dans la réinformation, comme nous ? Si un fou qui a UN jour lu UN article sur E&R fomente le projet de faire un croche-pied à un collaborateur du Système, on n’y peut rien, et on n’a jamais appelé à la violence physique.
La réciproque n’est pas vraie : en permanence, les agents du Système, dont Thomas fait partie, passent leur temps, avec des moyens très confortables en termes financiers et médiatiques, à nous dénoncer, harceler, insulter, on en passe et des pires. Nous, la violence du Système, l’injustice du Système, on vit ça au quotidien.
Si Thomas en doute, on lui montrera les menaces de mort en vidéo, en audio, les ennuis quotidiens, administratifs, bancaires, et il verra que le pétage de plombs de son ex-pote, aussi douloureux soit-il, est l’exception qui confirme la règle : dans le camp du Bien, on ne risque rien. On est du côté du manche.
En 2014, lors de manifs pro gaza, j’ai du me cacher derrière un cordon de CRS a cause d’un groupe qui me hurlait « sale juif ». Soutien à vous
— Thomas Huchon (@ThomasHuchon) November 11, 2022
Alors, c’est vrai, sur les réseaux sociaux, certains partisans anti-oligarchiques se lâchent un peu, mais c’est le seul espace d’expression encore public, et en plus, il se réduit. Le camp du bien n’aime pas la contradiction.
La paille et la poutre
Il y a une loi qui dit que plus on restreint l’espace d’expression des gens, et surtout des gens qui souffrent d’injustices flagrantes et de violences physiques (les Gilets jaunes tabassés) ou psychologiques (les opposants persécutés) produites par un régime, plus cette expression se durcit. En physique des fluides, il y a une analogie très simple : prenez un tuyau avec un débit moyen, réduisez le diamètre du tuyau, le flux n’en sera que plus fort. Ça peut même finir en kärcher, l’instrument qui fait sauter le crépi des murs. C’est le laser du pauvre.
N’en doutez pas une seconde, ces croyances complotistes engendrent de la violence. Et cette violence à des conséquences.
Thomas, qui passe son temps à harceler, dénoncer, rabaisser les résistants, ne se rend tout simplement pas compte qu’il fait partie du mécanisme de violence oligarchique, qui va du haut vers le bas et qui fait souffrir de plus en plus de gens. La plupart, impuissants, se laissent écraser ; d’autres se mettent en colère ; enfin, une partie essaye d’expliquer les choses, parce qu’il n’y a que ça qui peut faire baisser les tensions.