Hier soir, Nicolas Sarkozy est intervenu sur France 2 et TF1. Bizarrement, il a choisi un couple de journalistes bien mal assortis avec le pugnace et crédible Yves Calvi qui a totalement éclipsé un Jean-Pierre Pernault dont on se demandait bien ce qu’il faisait là.
Le service après-vente de l’accord européen
Entre mercredi soir et jeudi matin, les dirigeants européens ont conçu le 5ème plan « définitif » de sauvetage de l’euro, après le printemps 2010 (1er plan grec), l’automne 2010 (plan irlandais), le printemps 2011 (plan portugais), l’été 2011 (2ème plan grec). Nicolas Sarkozy a commencé par essayer de dramatiser l’enjeu de la réunion d’hier alors que même les marchés, pourtant très fébriles, n’avaient quasiment pas bronché avant les réunions de la semaine dernière et de mercredi.
Il a ensuite essayé de donner le change en affirmant que la France et l’Allemagne marchaient ensemble alors qu’il suffit de reprendre les journaux de la semaine dernière pour constater que Berlin et Paris n’avaient pas du tout la même position et que c’est Nicolas Sarkozy qui a cédé. De manière révélatrice, il a évité la question de l’augmentation des moyens du FESF, qui n’est toujours pas claire. Comme le dit Jacques Sapir, l’accord ne fait que prolonger l’agonie de l’euro.
« C’est pas ma faute à moi »
Le président de la République a eu le culot de dire qu’il n’était pas du style à rejeter la faute sur les autres. Pourtant, cela a été un festival de critiques de ces prédécesseurs. Nicolas Sarkozy a attaqué le choix d’accepter la Grèce dans la zone euro, oubliant au passage que la crise de l’euro touche aussi l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et l’Italie. En outre, je n’ai pas le souvenir que l’actuel président se soit exprimé contre l’entrée d’Athènes dans la monnaie unique à l’époque.
Ensuite, le président de la République a essayé de vendre l’idée qu’il n’est pas responsable de la situation financière de l’Etat puisque nous sommes en déficit depuis 1974. Outre le fait qu’il passe sous silence la loi de 1973, il faut souligner qu’il a présidé aux destinées de 5 des 6 plus gros déficits de la 5ème République (93,94,95,2009,10,11) et que la Cour des Comptes avait affirmé début 2010 que la crise n’expliquait qu’une moitié de l’augmentation des déficits depuis 2007.
L’impasse économique
Plus globalement, cette émission a démontré l’impasse dans laquelle le gouvernement actuel se trouve. Nicolas Sarkozy a abaissé la prévision de croissance pour l’an prochain, ce qui va accentuer les déficits et a annoncé de nouvelles mesures d’économies. Mais, comme on le voit bien en Grèce ou même en France cette année, les mesures d’économie vont pénaliser la croissance et donc à nouveau accroître les déficits, ce qui nécessitera de nouvelles économies… Il a repris son discours contre les banquiers mais il n’a quasiment rien fait depuis 2008.
Cette impasse s’illustrait également par son discours sur le commerce. Comment exiger une plus grande réciprocité dans les échanges commerciaux tout en dénonçant le protectionnisme et alors qu’il n’a absolument rien fait sur le sujet depuis quatre ans et demi ? Bref, le discours économique du président de la République était totalement inintelligible. Comme l’a bien écrit David Desgouilles récemment, Philippe Séguin avait malheureusement vingt ans d’avance.
Cette émission a été également l’occasion de lever les moindres doutes qui pouvaient encore exister sur la candidature de Nicolas Sarkozy, qui rode déjà son discours de candidat. Mais il butera sur le fait qu’il n’est absolument pas crédible et s’est fracassé sur la réalité.