Il n’y a que chez les enfants, les imbéciles ou les escrocs qu’on croit ou qu’on fait croire qu’une campagne présidentielle ne coûte que 20 millions, 16 pour le 1er tour et jusqu’à 22 avec le second.
Sarkozy avait crevé ce plafond (légal) en 2007 avec 40 briques de dépensées, ce qui lui a valu des démêlés avec la justice qui traînent encore jusqu’à aujourd’hui, merci Macron, qui paralyse ainsi un retour éventuel du champion de l’axe américano-israélien.
En vérité il faut multiplier ce chiffre au moins par 5 pour arriver à quelque chose de réaliste. Déjà, au début des années 2000, une bonne campagne présidentielle pour le futur vainqueur pouvait coûter un petit milliard, mais de francs. Chirac avait dépensé selon les comptables de la Nation (la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, ouf !) 18 millions d’euros en 2002 contre 12 pour Le Pen.
En 2007 Ségolène et Sarkozy avaient cramé officiellement 20 bâtons chacun, quand on sait qu’un gros meeting de campagne peut coûter au moins un million. Le 19 février 2012 à Marseille, grand meeting de lancement de campagne de réélection de Sarkozy, avec aller-retour en Falcon 900 pour le Président et sa suite :
« Mais, en coulisses, l’ambiance ne va pas tarder à virer à l’aigre. Dès le lendemain matin, lors de la séance de debriefing, Franck Louvrier, le conseiller com du président, et son directeur de campagne Guillaume Lambert, découvrent la note astronomique du meeting de la veille : jusqu’à 900 000 euros selon certaines sources ! Ecrans vidéo, loge du candidat avec isolation phonique, générateur électrique de rechange, images réalisées par le parti et fournies aux chaînes d’info... Tout a été fait en grand, en très grand par Bygmalion, l’agence choisie par l’UMP pour les meetings. Et le tarif est élevé, trop élevé. » (L’Obs)
Bref, les comptes officiels sont vraiment des stats pour les nuls. C’est bien pour se payer de belles campagnes que les candidats sortants – eux ont la main sur le robinet à fric – se mettent de grosses rétrocommissions sur les ventes d’armes dans la poche, pour ne prendre que cet exemple.
« Arnaud Montebourg n’est pas loin de partager l’analyse d’Olivier Marleix. Pour le prédécesseur d’Emmanuel Macron à Bercy, cette pluie d’honoraires avait conduit, a-t-il dit devant la commission d’enquête qui l’auditionnait à huis clos, à ce que “tout Paris avait été loué”. Pour l’ancien ministre de l’Économie, la chose est entendue : cette prise de contrôle d’Alstom a été facilitée par ces millions pour les boîtes de lobbying, de communication, banques d’affaires et autres cabinets d’avocats chargés de vendre l’opération aux Français et aux médias. » (Marianne)
Macron, en 2016-2017, pour sa campagne, n’a officiellement dépensé que 16 briques, et la démocratie française lui en a remboursé 10. Marine a dépensé 11 et récupéré 10. Mais la vente organisée sous la présidence d’Hollande, le Président aveugle – à ce moment-là Macron pensait peut-être déjà à son avenir brillant – des meilleurs morceaux d’Alstom aux Américains et aux Allemands a fait tomber 300 bâtons dans la poche de la Macronie en germe, pardon, du ministère de l’Économie.
Et là on parle de « frais », ou de commissions, pas du prix de vente, qui est 10 fois supérieur ! Le député Marleix suppose donc que ces « frais » monstrueux, qui sont d’habitude moindres dans ce genre de deal (1 à 2% indique Marianne), se sont retrouvés en dons de campagne à travers de riches et complaisants donateurs, des prête-noms quoi.
« L’analyse d’Olivier Marleix est qu’une partie de ces fonds se sont finalement retrouvés au travers des dons - particulièrement importants, puisque nombre des donateurs ont saturé le plafond - dans les poches du candidat Macron. Par exemple, sur les 12 millions d’euros récoltés par le parti LREM, la moitié était le fait de dons saturant le plafond de 7 500 euros. »
Le circuit financier en boucle n’est pas encore prouvé mais l’épée de Damoclès pèse de plus en plus lourd sur la tête de Macron. Tout le monde a compris depuis le départ que l’enchaînement chronologique des ventes (il n’y a pas qu’Alstom, il y avait d’autres boîtes juteuses pour la concurrence internationale) et des dons sentait le super roussi, on va donc voir si la justice embraye et dénonce le coupable, ou le gagnant.
C’est le Parquet national financier, qui attend qu’un nouveau procureur soit nommé à sa tête (par Macron, c’est pour ça qu’on est rongés par le doute), qui hérite de l’enquête qui vise aujourd’hui le président de la République. La nomination de ce magistrat tarde, et pour cause : il aura en charge le dossier Sarkozy, et bien sûr le dossier Alstom. Un magistrat, théoriquement indépendant, devrait traiter ces deux affaires sans états d’âme, mais les deux affaires n’ont pas le même impact !
Le magazine Capital a enquêté sur cette très sensible passation de pouvoir judiciaire :
« La désignation du “super-procureur” doit être précédée d’une “procédure de transparence”, rappelle Jacky Coulon à Capital. Une étape qui, pour la Place Vendôme, consiste à dévoiler au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) les noms du candidat retenu et de ceux qui ont été écartés. Cette information "n’interviendra pas nécessairement avant le 28 juin, date du départ d’Éliane Houlette", précise le Secrétaire général de l’Union syndicale des magistrats (USM). C’est ensuite au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), chargé de garantir l’indépendance des magistrats, d’émettre "sous quelques jours" un avis qui ne lie pas le gouvernement. Enfin, le Conseil des ministres aura la responsabilité de prendre un décret portant nomination du nouveau “super-procureur”. Signé par Emmanuel Macron qui en endossera l’entière responsabilité, ce décret fera l’objet d’une publication au Journal officiel. »
Le 28 juin est passé depuis un mois, et la décision de Macron traîne. Le Président doit choisir dans le chenil, passez-nous l’expression, le chien qui lui mordra les fesses. Si ce chien n’a pas de dents, cela lui sera reproché. S’il a des dents, mordra-t-il, et s’il mord, que deviendra celui sur qui plane l’accusation gravissime de « pacte de corruption » ?
« Un pacte de corruption »
À l’origine du signalement à la justice, le député Olivier Marleix (LR) ne cache en effet pas sa cible : Emmanuel Macron. Le parlementaire qui a conduit la commission d’enquête sur Alstom s’interroge sur la concomitance de deux événements. Le premier : Emmanuel Macron, alors à Bercy, avait « formellement donné l’autorisation » de la vente d’Alstom énergie. Mais pas seulement, l’ancien ministre de l’Économie de François Hollande avait « également autorisé » d’autres cessions d’actifs « d’entreprises stratégiques françaises », comme celle d’Alcatel-Lucent au groupe finlandais Nokia ou de Technip à FMC Technologies (Etats-Unis).
Le second tient à la campagne présidentielle de 2017 : Olivier Marleix relève que le candidat Macron a bénéficié d’un « montant de dons records pour sa campagne ». À partir de ces deux éléments, le député interroge « le fait que l’on puisse retrouver dans la liste des donateurs ou des organisateurs de dîners de levée de fonds des personnes qui auraient été intéressées aux ventes précitées ». Et de poursuivre dans sa lettre au parquet : « S’il était vérifié, un tel système pourrait être interprété comme un pacte de corruption. »
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