Critiquées pour leur passivité face à l’expansion du groupe jihadiste Boko Haram, désormais lié à l’État islamique (EI), les forces armées nigérianes ont obtenu plusieurs succès au cours de ces dernières semaines… Au point de pouvoir revendiquer la reprise de 36 localités dans le nord-est du pays. Et cela, à quelques jours de l’élection présidentielle.
Comment expliquer ce retournement de situation alors que les forces nigérianes subissaient encore récemment des échecs cinglants, comme à Baga ? Selon Abuja, l’intervention militaire du Tchad à partir du Niger et du Cameroun a été déterminante dans la mesure où elle a permis de « couper les lignes de ravitaillement des terroristes ». Et Mike Omeri, le porte-parole du gouvernement nigérian, d’ajouter : « On espère que la coopération régionale en cours va précipiter la défaite et l’extermination de Boko Haram au Nigeria et dans la région ».
Si l’intervention militaire tchadienne est déterminante, une autre raison peut expliquer les succès des forces nigérianes. La rumeur circule depuis plusieurs jours et elle vient d’être indirectement confirmée : les autorités nigérianes ont engagé des mercenaires pour combattre les jihadistes.
La diffusion, via les réseaux sociaux, d’une photographie d’un homme blanc habillé en kaki et circulant à bord d’un véhicule blindé dans les rues de Maiduguri, la capitale de l’État de Borno qui reste l’objectif prioritaire de Boko Haram, avait laissé supposer cette hypothèse. Puis les doutes ont été levés après l’annonce de la mort, par la presse sud-africaine, d’un certain Leon Lotz.
Cet ancien de la Kevoet (une unité paramilitaire contre-insurrectionnelle active lors de la guerre d’indépendance de la Namibie) a été tué par le tir d’un char nigérian qui s’est trompé de cible, lors de combats contre Boko Haram, dans l’État de Borno. Selon le quotidien Daily Maverick, il aurait été employé par la société Pilgrim Africa Ltd, qui, fondée à Lagos en 2008, fournit des prestations dans le domaine de la sécurité aux autorités nigérianes.
Selon l’agence de presse suisse ATS, qui s’appuie sur des sources sécuritaires et diplomatiques, le Nigeria « a fait venir des centaines de mercenaires originaires d’Afrique du Sud et d’anciennes républiques soviétiques pour appuyer son offensive contre le groupe extrémiste Boko Haram ».
Ces « affreux » seraient payés 400 dollars par jour. Et leur déploiement coïnciderait avec l’annonce du report de 6 semaines de l’élection présidentielle nigériane, qui, normalement, aurait dû avoir eu lieu le mois dernier. Les autorités nigérianes n’ont pas souhaité commenté ces informations.
Mais, dans un entretien accordé à Voice of America, l’actuel président, Goodluck Jonathan, qui vise sa réélection, a admis la présence de « techniciens étrangers » dans le nord-est du pays. Selon lui, ces derniers apprennent aux troupes nigérianes à « utiliser leurs nouvelles armes », car cela n’avait pas été possible de le faire avant leur déploiement.
« Cela ressemble à un stratagème de dernière minute pour obtenir quelques succès sur le terrain en six semaines et obtenir un coup de pouce électoral », a commenté un diplomate en poste à Abuja, d’après l’ATS.
Quoi qu’il en soit, Mme le ministre sud-africain de la Défense, Nosiviwe Mapisa-Nqakula, n’apprécie pas de voir des « instructeurs » originaires de son pays être au service de l’armée nigériane. « Qu’ils entraînent ou apportent leur savoir-faire, ce sont des mercenaires. Ils n’ont rien à faire là-bas », a-t-elle dit. Et de promettre, lors d’un entretien à la BBC, de lancer des enquêtes de police sur chaque personne suspectée d’avoir combattu au Nigeria.