Les Américains ont mis les pieds dans les Balkans pour la première fois en 1995, quand la guerre de Bosnie-Herzégovine s’est achevée par les Accords de Dayton. À l’époque, ils travaillaient modestement sous le drapeau de l’Onu. Mais l’appétit vient en mangeant. La Bosnie-Herzégovine n’a pas suffi au Pentagone, qui a décidé d’aller plus loin : en Serbie, plus exactement dans sa partie sud du Kosovo.
Les bombardements de Belgrade, de Novi Sad, de Podgorica, de grandes et petites villes de la Serbie et du Monténégro ont commencé au printemps 1999. Ils ont cessé le 10 juin 1999 quand Slobodan Milosevic a accepté de laisser les Américains et l’Otan entrer au Kosovo. Officiellement, ils agissaient sous couvert de la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations unies mais en réalité, les États-Unis et l’Otan ont simplement occupé la Serbie avant de la priver du quart de son territoire. Cela s’est produit le 17 février 2008, lorsque le parlement kosovar a unilatéralement proclamé son indépendance.
La CIA et le Pentagone rêvaient depuis longtemps de s’affirmer dans les Balkans. Désormais, plus personne ne cache que l’opération de l’Otan "Ange miséricordieux" de mars 1999 n’était qu’une couverture. Bien avant l’opération, les spécialistes militaires avaient sélectionné 1 000 hectares de terrain près de la ville d’Urosevac pour construire la plus grande base militaire américaine d’Europe. L’entreprise choisie pour mettre en œuvre ce projet ? Halliburton, basée au Texas, spécialisée dans les équipements pétroliers et la maintenance des oléoducs. Finalement, elle n’a pas directement eu la main sur ce projet. La base Bondsteel a été construite par ses succursales KBR – Kellogg, Brown and Root.
À cette époque Bill Clinton présidait les USA. Il rêvait des Balkans et des ressources naturelles du Kosovo : selon la Banque mondiale, le Kosovo abrite plus de 100 milliards de dollars de ressources minérales. Les experts estiment que seules les réserves de lignite (variété de charbon brut) atteignent ici 14 milliards de tonnes. Les réserves d’étain et de zinc sont estimées à 42 millions de tonnes, celles de nickel et de cobalt à 13 millions de tonnes, de bauxites à près de 2 millions de tonnes, ainsi qu’environ 6 millions de tonnes de magnésie. De plus, le Kosovo a toujours produit une quantité importante d’argent, de fer, ainsi que des minéraux rares.
Le territoire renferme également des mines d’or, de platine et de cuivre. Selon certaines estimations, la construction de la base de Bondsteel a coûté presque un milliard de dollars. Au total, 300 sites ont été construits dans cette zone en trois ans et 34 millions de dollars ont notamment été investis dans un hôpital. Les analystes américains reconnaissent que Bondsteel est le plus important "intérêt" des USA en Europe. 7 000 soldats et officiers y sont déployés aujourd’hui - le camp militaire près de Pristina est un véritable État. On y trouve des produits uniquement en provenance des États-Unis, un cinéma, une bibliothèque, internet, des lotissements, un hôtel, des bars, des salles de sport, une piscine, un garage auto et des ateliers de réparation. Le Pentagone a tout fait pour que servir au Kosovo ne soit pas aussi difficile.
Avant chaque opération militaire, le Pentagone et la CIA calculent le profit éventuel qu’ils pourraient en retirer. Il est primordial pour les États-Unis d’avoir au pouvoir des hommes qui se battront pour la démocratie mais aussi qui laissent une part du gâteau à leurs anciens patrons et protecteurs. En 50 ans, la Serbie a investi plus de 17 milliards de dollars dans l’infrastructure du Kosovo, retardé et économiquement dépressif, et de la Metohija. Aujourd’hui Hashim Thaçi et son entourage revendiquent tout ce qui a été fait et construit avec l’argent yougoslave. "Cela nous appartient, nous sommes les propriétaires du Kosovo. Tout ce qui se trouve sur le territoire kosovar appartient uniquement à l’État indépendant", affirme Pristina en permanence.
Aujourd’hui c’est la principale thèse du gouvernement de Pristina. Thaçi et son équipe appellent des investisseurs du monde entier, invitent tous ceux qui sont prêts à prendre le contrôle des sites industriels cruciaux de "l’État kosovar". Qui refuserait de gagner de l’argent là où on attend des bénéfices incroyables ? Tout homme d’affaires européen viendrait en courant avec un sac d’argent si on lui proposait de telles garanties.
Le quotidien serbe Politika a publié un article intitulé "Les espions américains débarquent au Kosovo" : fin mai-début juin, la 525ème brigade de renseignement et de guerre électronique (BRGE) sera effectivement projetée au Kosovo. La brigade sera représentée par un état-major, des bataillons - renseignement aérien, opérationnel, reconnaissance et guerre électronique - ainsi qu’une compagnie de reconnaissance approfondie. La Brigade sera renforcée par un bataillon de renseignement et de guerre électronique de la réserve de l’armée de terre (Caroline du Nord), qui comptera plus de 2 000 hommes.
La principale mission de la BRGE sera d’être les yeux et les oreilles des USA dans la région. Une attention particulière sera accordée à la construction du gazoduc russe South Stream. Washington a toujours voulu être au courant de ce qui se passait réellement en Serbie, tout en considérant que l’intégralité des Balkans devait être sous un contrôle "transatlantique" minutieux.