« Rien n’arrêtera le mouvement de la réforme. » Ces mots, tenus par Manuel Valls pour défendre la loi Macron, font briller le costume de réformateur social-libéral que le Premier ministre a endossé.
Le projet présenté par Macron n’est plus défendu dans les termes plus classiques de la gauche, qui composaient encore l’argumentaire du projet de loi de Montebourg (« pouvoir d’achat », « renouer avec la classe moyenne », etc.) mais rejoint l’habituelle rhétorique d’un réformisme qui parle d’adaptation à la mondialisation. Sur la forme, comme sur le fond (les deux axes essentiels sont la dérégularisation et un soutien multiforme aux entreprises, se confondant parfois avec une reconnaissance des revendications patronales) cette dynamique rappelle les franches prises de positions libérales de l’ex-président et candidat Sarkozy et réduit encore d’un cran la crédibilité de l’alternative droite/gauche [1].
L’inanité de celle-ci sur les questions économiques ne se retrouve pas seulement dans les reformes affichées, mais aussi dans les manœuvres budgétaires réalisées en coulisses. Tout comme Sarkozy et ses quarante nouvelles taxes/suppressions de niches fiscales de 2007 à 2011 [2], le gouvernement socialiste doit bien en réalité trouver des recettes pour remplir les deux gouffres qui persistent et s’accroissent irrémédiablement : le paiement des intérêts de la dette et l’achat de la paix sociale.
L’une des plus belles illustrations de ce phénomène au cours du quinquennat Hollande sera certainement la hausse de la TICGN (Taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel).
Cette taxe, récoltée par les fournisseurs d’énergie et finissant dans les caisses de l’État, est passé de 1,19 €/MWh à 1,27 €/MWh en 2014, avant d’atteindre 2,64 €/MWh en 2015. Ces augmentations spectaculaires, pratiquement jamais évoquées par les médias, continueront : la taxe est annoncée au dessus des 4 €/MWh pour 2016 [3].
De surcroît, en avril 2014, la TICGN s’est généralisée. Elle ne concerne plus seulement les usagers industriels, mais aussi les usages résidentiels (c’est-à-dire les particuliers).
La généralisation, en elle-même, a permis de récolter environ 300 millions d’euros supplémentaires pour 2014. Les hausses successives, à peine limitées par quelques possibilités d’exonération, représenteront à chaque fois au moins 350 millions d’euros supplémentaires. En 2016, avec ses 4 €/MWh, la taxe rapportera plus de 1,5 milliard d’euros à l’État. On est loin des 400 millions sur deux ans de la fameuse taxe à 75 % qui a tant défrayé la chronique [4].
Au delà de l’impact diffus sur le pouvoir d’achat des ménages (justifié par l’éternelle compensation démagogique de la quasi-gratuité pour les plus démunis, ici par le biais de la redistribution de la Contribution au tarif spécial de solidarité gaz (CTSSG), pour un industriel, ces hausses sont loin d’être neutres : une augmentation de 1 €/MWh entraîne une hausse de 2,5 à 4 % du budget dédié au gaz naturel, une énergie qui a parfois une place très importante, voire prépondérante, dans les coûts de production.