Chantre de la beauté européenne, amoureux de la langue française, Lounes Darbois est le jeune patron de l’émission radiophonique Éloquence du vulgaire sur ERFM. Très critique envers l’Éducation nationale qu’il accuse d’avoir empoisonné le goût de plusieurs générations pour la littérature, il appelle aussi les jeunes générations à la résistance contre la pornographie, l’un des aspects les plus répugnants de la dégénérescence occidentale. Dans une vie antérieure (il y a presque quatre ans), il a consacré un ouvrage à cette question. Interview.
Rivarol : Vous rattachez-vous à une école littéraire ?
Lounès Darbois : Non. Des catégories comme l’intuition, comme la grâce, me parlent davantage que l’idéologie ou la stratégie. J’ai été très touché par les textes courts de Jean-Louis Costes vers 2003, dans l’antique forum « subversiv », sur sa conversion, sur Jean Genet, sur le téléchargement illégal, vous savez : « Je ramasse un Libé pourri dans une poubelle du métro et qu’est-ce que je lis ? » etc.. Les bons auteurs mettent en mots ce que tout honnête homme pense en son for intérieur. Costes m’a fait préférer la force vitale, la clarté au baratin. Ensuite j’ai lu Houellebecq, puis Dantec, puis Soral, puis les auteurs cités chez Zentropa. Céline est le meilleur à mon avis. On admire ceux qui arrivent à exprimer clairement ce que nous ressentons confusément, nous qui avons été élevés dans une culture de l’inhibition et de la « pensée contre soi-même ».
Le roman français après Balzac, sauf exception, est une école qui me semble très néfaste : cette rage qu’ont ces auteurs jamais aux prises avec la vraie rue, de créer des personnages pour les faire déchoir pendant cinq cents pages, en les soumettant à des lignes de force irrévocables, ça, c’est une école criminelle. C’est l’idée chrétienne devenue folle, c’est la passion pour le perdant magnifique, c’est conditionner les lycéens à se résoudre aux futures saloperies du monde et à dire « ça a toujours été comme ça ». Maupassant, Zola, Flaubert (hormis son journal et sa correspondance), m’avaient écœuré de la lecture. L’Éducation nationale a massivement diffusé cette tendance-là, romans où des hommes droits, laborieux, intègres, sont battus à la fin par des salauds. C’est ça la « haute culture » ? Pourquoi fait-on si peu étudier Balzac, et pas seulement Gobseck ou L’envers de l’histoire, mais ses essais méconnus ?
Finalement, pour les jeunes Français qui croient encore au génie de leur nation et de leur race, le livre, c’est quoi ? C’est le roman mou, quelque chose d’un peu déprimant, vaguement malsain, avec des personnages qui sont systématiquement soumis à des lignes de force hors de portée du politique et de l’action. Et ça, c’est un apprentissage de la défaite, une culture de l’inéluctable, un conditionnement. L’objet véritable des vrais romans, école Balzac, c’est de faire dire par des personnages fictifs des vérités sur le monde réel qui tomberaient sous le coup de la loi sans la médiation de ces personnages. Après Balzac, ce soubassement sérieux dégénère en divertissement pour jeune lettré désœuvré.
La vraie tradition française commence au XVe siècle avec les vers très resserrés de Villon, fleurit au XVIIe siècle dans la retenue des La Fontaine, Pascal, Saint-Simon, La Bruyère, etc., auteurs qui sont des avertisseurs, pas ces déprimeurs qui entraînent leurs lecteurs dans une sorte de croisière amollissante. Trop souvent, les romanciers font de leurs lecteurs des passagers, non des capitaines.
Votre livre parle de la pornographie comme d’un moyen de contrôle social. Il commence par une citation de Soljenitsyne : « On asservit les peuples plus facilement avec la pornographie que par des miradors ». Vous parlez de mise en esclavage mentale. Pouvez-vous préciser ?
La pornographie est l’une forme d’asservissement parmi les plus méchantes, les plus cruelles, les plus efficaces. Elle est omniprésente sur Internet où elle représente entre un tiers et la moitié des connections quotidiennes mondiales. Soljenitsyne, en substance, avertit que la pornographie enferme les hommes sans le leur dire, mais les isole vraiment, les détraque vraiment. C’est sournois ; c’est une prison toute de barreaux invisibles qui fonctionne comme une drogue dure ; le type y retourne de lui-même chaque jour, pendant que dans la vraie vie la rencontre saine, la vie de famille saine, la procréation deviennent quasi impossibles, un destin de bagnard isolé qui ne sait plus, ne peut plus, rencontrer l’autre sexe.
Détruire une nation ne suppose plus le recours aux guerres avec armées (ça coûte cher), mais la destruction de la fonction génésique : d’abord endoctrinement pseudo-libertaire, puis contraception, puis avortement... Un cran d’étranglement supplémentaire est passé en silence vers 2000 avec la pornographie gratuite. Plus besoin de rien opposer dans le réel à la procréation : elle devient virtuelle.
Lounès Darbois et Pierre de Brague : Du branleur au hardeur : la pornocratisation des esprits
Quel est le modèle économique dominant de la pornographie aujourd’hui ?
La mafia du porno s’est recyclée : elle détenait les studios, elle gère maintenant les canaux de distribution. Le modèle économique a complètement changé depuis 2000-2010, l’époque décrite dans le livre, mais celui d’alors a enfanté le modèle actuel. Il y avait à l’époque un « Hollywood du porno » (Chatsworth et San Fernando. Ndlr), aujourd’hui, il y a un Uber du porno. Chacun créé son petit compte et son mini-studio. Voilà que le virus de la pornographie, jadis émanant de studios qui vendaient leur « production », est désormais transmis par les consommateurs eux-mêmes. Les contaminés sont devenus contaminants !
Mais est apparu aujourd’hui un troisième étage à la fusée direction l’enfer, celui du féminisme sex workers, dans l’esprit « c’est mon corps, je fais ce que je veux, et je me venge des hommes en leur faisant acheter des minutes de mes prestations filmées pour gagner ma vie sur eux ». Vous lisez la Bible ? Lisez un peu Osée, chapitre 5, verset 4.
Vous évoquez une division raciale du travail dans la pornographie au sein de laquelle les actrices seraient des « métaphores de l’Occident humilié, rabaissé, souillé, agressé et qui aime ça ».
Il y a une sociologie très nette dans ce milieu. En haut, il y a des investissements, des stockages de contenu, des canaux de distribution, des plateformes avec adhésion payante, ensemble sur-représenté par des membres de la Synagogue (il y a des listes qui existent, et dont même AVN, le syndicat du porno, se vante). En-dessous, il y a disons « l’église », les brebis, les cheptels féminins. À côté, il y a disons « la case », vous voyez, ou « la brousse » pour employer des périphrases, catégories masculines que le haut de la pyramide engraine dans une haine des Blancs d’une virulence mais alors, inimaginable, et dont la figure de la « Blanche » stupide et soumise serait l’exutoire. Et tout en-dessous encore vous avez... les couillons, masculins, souvent blancs, qui « consomment » comme des bolos.
La pornographie comme arme de guerre : vous soulignez que, contrairement aux civilisations d’origine des immigrés, les Blancs laissent leurs femmes en libre-service. La pornographie, c’est l’enlèvement des Sabines en version gore ? Où est passé l’esprit de l’Iliade ? Vous n’hésitez pas à convoquer Louis- Ferdinand Céline.
Céline a mis en évidence dans Bagatelles pour un massacre, dans des termes très sévères, l’absence de conscience raciale, d’esprit grégaire d’entraide, chez les Blancs. La conscience est la face douloureuse de la lucidité, et pèse lourd, et se paye par des actes et des choix de vie difficiles. La plupart des gens n’aspirent pas à une conscience plus aiguë mais moins aiguë : la léthargie, l’oubli. La pornographie, l’alcoolisme, les drogues, sont des moyens d’oublier et de refiler à d’autres la conscience douloureuse, autres dont je prétends faire partie. Ils ne veulent pas surmonter leur conditionnement, se rencontrer, se révolter. Ils prennent la fiole, et quelque part, c’est très violent à dire, mais c’est bien fait pour eux ; à choix honteux, vies honteuses.
Mais laissons un instant la pornographie.
J’admire plus que tout les hommes qui mettent des actes au bout de leur conscience supérieure. D’autre part, les disquages de caméras de surveillance, les incendies de radars, certains sabotages sur des appareils à onde, sur des éoliennes, sur des écrans publicitaires ne me choquent nullement. Appareils de nuisance, notons-le, que personne n’a demandé ni voté, appareils de pure tyrannie. Et qui sont les genres d’hommes qui osent agir ? Trois catégories distinctes que le système pousse à l’affrontement horizontal : les hommes « fachos » issus de la droite, les hommes « anars » issus de la gauche, les hommes « cailleras » issus des cités. Curieusement ce sont eux peut-être les seuls hommes, au sens traditionnel.
Sur Céline, je suis intarissable. Savez-vous que 52 % des hommes nés en 1894 sont morts avant l’âge de 25 ans ? C’est-à-dire directement ou indirectement de la guerre de 14-18. 1894, c’est l’année de naissance de Céline qui a traversé ces épreuves inouïes et survécu pour incarner cette conscience et la transmettre en une œuvre. La plupart des hommes de sa génération – qui étaient de la même trempe – tués au combat n’ont par conséquent pas pu transmettre leurs gènes ni innerver le pays de leur conscience. Des vagues d’immigration postérieures a résulté un escamotage du nom français, ce nom de famille français, important témoin du lignage, pièce essentielle de la continuité cohésive nationale dans le temps, car le nom est le dépôt de la paternité, sorte de surmoi qui, même absent, décide de tout chez un enfant. « Ne savez-vous pas que je me dois aux affaires de mon Père ? » s’exclame le Messie enfant, dans le temple.
La pornographie, dites-vous « répand la zizanie, le divorce, la honte, le viol, la dépression », la haine de soi aussi ? La pornographie, c’est le grand démoralisateur pour la jeunesse ? D’où vient la vulnérabilité blanche ?
Les jeunes fuient dans le virtuel, loin du terrain occupé par d’autres qui les en ont chassé, et se sont mis à prendre la carte pour le territoire.
Les « Français » comme les appelle la rue – qui ne rêvent qu’à des postes de cadres, de « managers » – c’est-à-dire à des vies sur cartes d’État-Major, anti-physiques, sont soumis physiquement dans la rue, ils sont des individus contre des communautés tandis que dans leur vie, par écran interposé, ils sont dans une guerre stérile du tous contre tous (Twitter, Youtubage, etc.). Doit-on les détester ou les plaindre ? Chaque Français qui se soumet pour éviter les ennuis, qui joue sa partition antiraciste, entraîne tous les autres dans le même standard qui se ren- force à chaque fois. « Tu nous fais du tort à tous quand tu te couches » dixit le film Les Princes de la ville.
Mais que dire de toute façon ? Céline a tout dit. Quand je lis : « Dans le milieu ; examinez les vieilles mômes : elles finissent toutes par les nègres, bien contentes, bien ivrognes, bien régalées, bien enc..., bien battues... », je me demande comment un homme de 1937 pouvait risquer sous les quolibets des imbéciles une prédiction aussi improbable, et finalement avoir raison. Peu d’hommes osent l’examen critique de Bagatelles : est-ce que ce livre dit vrai, sous couvert de satire, ou pas ? Livre d’une conscience trop lourde à porter. Beaucoup bifurquent donc vers Zemmour, vers Nietzsche, Heidegger, vers toutes sortes de « penseurs de la complexité », très peu physiques. Céline disait : « Tout ce qui est compliqué est faux et pourri ». La vie est très simple, d’où nos souffrances, la résistance est très simple, d’où nos peurs et arguties pour ne pas agir. S’ils refusent de lire Céline, leur plus grand prédécesseur, alors pourquoi veulent-ils donner des opinions sur la France et le monde ? Et s’ils l’ont lu, oseraient-ils dire, s’ils connaissent la vie, que ces pages soient exagérées ou fausses ? Bagatelles pour un massacre, c’est le cheval au milieu du salon que tous les salonnards font semblant de ne pas avoir vu.
Et les femmes ?
Une seule vraie Européenne dotée d’une conscience raciale est beaucoup plus dangereuse pour le Système, qu’un légionnaire par exemple, parce que dans notre société elle est quasi-inattaquable. Il leur suffit juste de refuser ce que le Système veut d’elles (la citation de Céline précédemment) et d’agir en conséquence. En outre, une femme avec une conscience peut faire de son homme un légionnaire pour la Cause. L’inverse est moins évident. J’ai une admiration sans borne pour Charlotte Corday, c’est-à-dire pour la fanatique bien élevée. Jeanne d’Arc, Diana Mitford sont d’autres exemples de courage pour toutes les mères discrètes qui ont compris que le système est radicalement hostile à elles et à leurs enfants. Elles pourront aussi regarder le beau traité de Plutarque consacré aux femmes. Si l’État était la saine expression de la nation, les boulevards Gambetta seraient tous des boulevards Charlotte Corday.
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