La minute de silence est désormais l’invitée de chaque événement sportif. Entre hommages aux morts au Proche-Orient ou attentat d’Arras, le match de rugby France-Afrique du Sud de dimanche soir n’a pas dérogé à la règle. Au point de se demander si ce décorum ne pèse pas négativement sur les résultats sportifs...
Ni coups de canon, ni bruits de cor. Contrairement aux idées reçues, la minute de silence est un phénomène récent mais aussi ontologiquement républicain. Ayant été célébrée pour la première fois en 1910 au Portugal, elle a servi de rituel pour enterrer un ministre républicain en lieu et place des sonneries d’alerte militaire et du glas à connotation trop traditionnelle.
Peu à peu, en commémorant tous ses martyrs, qu’ils soient journalistes (Charlie Hebdo) ou hussards noirs (Samuel Paty), ce phénomène est devenu un rite républicain à part entière, dont la perturbation engendre l’anathème. En quelques jours, le footballeur Jean-Clair Todibo, trop détendu avant le match France-Pays-Bas, est sommé d’excuser ses rires devant les tribunaux de l’Inquisition représenté par le comité d’éthique de la Fédération française de football. Toujours plus loin dans le délire, Gabriel Attal poursuit 179 apologistes du terrorisme en culottes courtes, en demandant également à chaque chef d’établissement l’exclusion immédiate de ses élèves.
Une société et une nation se définissent avant tout par leurs symboles. La Marseillaise, hymne guerrier, appelle au réveil une nation dont les élites travaillent à la destruction et tolèrent qu’on la siffle. En attendant qu’une masse critique ait ouvert les yeux, c’est en toute logique que cette République dans laquelle nous vivons, où l’on ne peut plus rien dire, se célèbre elle-même par l’omerta qu’elle fait régner et le néant qu’elle diffuse.