Le raid israélien contre la flottille internationale à destination de Gaza, l’année dernière, était « excessif et déraisonnable », selon un rapport d’un comité de l’ONU, qui blâme aussi la Turquie et les organisateurs de l’expédition pour avoir contribué à la mort de neuf militants.
Le rapport longuement attendu du comité, publié vendredi en fin de journée, avait pour but d’améliorer les relations entre Israël et la Turquie, mais il a déjà provoqué une quasi-rupture des liens entre les deux pays à cause du refus d’Israël de s’excuser pour les morts à bord du navire Mavi Marmara.
Plus tôt dans la journée, la Turquie a expulsé l’ambassadeur israélien et suspendu sa coopération militaire avec Israël. L’ambassadeur devra quitter la Turquie d’ici mercredi.
Cette rupture des relations entre Israël et le pays qui était autrefois son plus important allié dans le monde musulman laisse présager un isolement accru de l’État hébreu dans la région.
La Turquie avait exigé des excuses du gouvernement israélien avant toute amélioration de ses relations avec ce pays. Mais Israël a affirmé que ses forces avaient agi en légitime défense et a refusé de présenter des excuses, exprimant seulement des « regrets » pour les victimes du raid.
Le rapport de l’ONU n’exige pas d’excuses d’Israël, mais recommande que l’État hébreu exprime ses regrets et indemnise les proches des victimes.
Le document de 105 pages affirme que le blocus imposé par Israël à la bande de Gaza est légal en tant que « mesure de sécurité légitime » afin d’éviter le trafic d’armes, mais ajoute que la mort des neufs militants est « inacceptable ».
« Les événements du 31 mai 2010 n’auraient jamais dû avoir lieu de cette façon, et des efforts énergiques devraient être faits pour éviter la répétition de tels incidents dans l’avenir », dit le rapport.
Le document critique Israël pour ne pas avoir averti clairement les militants que les navires seraient arraisonnés, et pour ne pas avoir d’abord utilisé des « options non violentes ».
Le rapport recommande qu’Israël dédommage les blessés et les proches des victimes par l’entremise d’un fonds en fidéicommis administré par les deux gouvernements.
Mais le comité estime aussi que les organisateurs de la flottille ont « agi de façon imprudente dans une tentative de forcer le blocus naval ». Même si la majorité des participants n’avaient pas d’intentions violentes, « il existe de sérieuses questions quant à la conduite, à la nature réelle et aux objectifs des organisateurs de la flottille ».
Le gouvernement turc aurait dû en faire plus pour prévenir les participants de la flottille des risques potentiels et les dissuader d’y participer, ajoute le comité.
La Turquie était autrefois le plus proche allié d’Israël dans la région. Le gouvernement turc a joué un rôle de médiateur dans plusieurs rondes de négociations indirectes entre Israël et la Syrie en 2008, mais les discussions n’ont permis aucune avancée significative et ont été suspendues après l’offensive militaire israélienne dans la bande de Gaza l’année suivante.
Les relations entre les deux pays se sont dégradées pendant les années suivantes, et se sont brutalement détériorées après le raid israélien contre la flottille. L’expulsion de l’ambassadeur israélien est le plus grave signe de la dégradation des relations entre les deux pays.
Si ce conflit s’arrête à la Turquie, « ce sera un miracle », a estimé Alon Liel, ancien ambassadeur d’Israël en Turquie. « Il y a beaucoup de pression interne en Égypte, et la Turquie pourrait se servir de son influence dans le monde arabe et musulman pour inciter d’autres pays à suivre son exemple. »
La décision de la Turquie accroît l’isolement d’Israël dans la région à un moment délicat. Israël fait face à des difficultés dans ses relations avec un autre allié régional de longue date, l’Égypte, où le dictateur Hosni Moubarak a été contraint à la démission plus tôt cette année après des jours de manifestations populaires, et où plusieurs appellent maintenant à la révocation de l’accord de paix entre les deux pays. Le mois dernier, l’Égypte a menacé de retirer son ambassadeur en Israël après une fusillade à la frontière entre les deux pays qui a tué cinq soldats égyptiens.
La dégradation des relations avec la Turquie survient également au moment où Israël tente de rallier des soutiens internationaux contre la volonté des Palestiniens de faire reconnaître leur État par l’ONU plus tard en septembre.